Hugo Broos dit tout à Compétition : «Je n’entraînerai plus jamais en Algérie »

 

Le coach du Cameroun est à son avant-dernier match avec les Lions, en novembre, il devrait entraîner l’équipe pour la dernière fois, son contrat prend fin en février et la FecaFoot ne compte pas le reconduire, dans cet entretien exclusif qu’il nous a accordé hier au QG de sa sélection à l’hôtel Mont Febé dans les hauteurs de Douala, il revient avec nous sur son aventure en Algérie qu’il n’est pas intéressé de revivre.

 

Le public algérien ne vous a pas oublié, spécialement celui de la JSK  et à degré moindre celui du NAHD, alors qu’en est-il de vous est-ce que vous suivez un peu ce qui se passe chez nous ?

Je reste quand même branché à ce qui se passe en Algérie, j’ai encore un contact avec mon assistant de l’époque Zemiti, donc le lien reste quand même malgré mes autres préoccupations.

 

Entrons directement dans le vif du sujet, est-ce que vous savez que Hannachi a été destitué, et qu’il n’est plus président de la JSK ?

(Il ouvre grand les yeux) Sérieux ? Ben dis donc, je n’arrive pas à y croire, vous venez de me l’apprendre, et ben je peux vous vous dire qu’il était temps, cet homme était malade dans sa tête, il fait beaucoup d’erreurs et beaucoup de conneries, il a même dit beaucoup de conneries, je crois donc que c’est une bonne nouvelle pour la JSK et pour le football algérien, car un tel homme ne doit pas avoir un tel poste de gestion, qui est président maintenant ?

 

C’est un ancien joueur qui essaye tant bien que mal à rectifier les erreurs commises par Hannachi…

J’imagine, ça ne va pas être facile, mais la JSK reste la JSK, elle va s’en sortir.

 

Vous tenez toujours rancune à Hannachi visiblement, allez dites-nous, selon vous comment un président titré comme lui peut faire du mal à son club ?

Je ne sais pas, je ne l’ai pas connu quand ça allait bien, mais quand je l’ai connu, 3 mois plus tard, j’ai su quel genre de type ce monsieur était, et ce qui s’est passé ensuite m’a donné raison, c’est un type malade dans sa tête.

 

Le club joue depuis plus de 7 ans la relégation, c’est lui le problème ?

Ben oui, il ne laisse pas les entraîneurs travailler, il se mêle de tout, avec une telle attitude, il y a des problèmes avec les joueurs, avec le coach, c’était lui le mal de la JSK et il a osé parler de moi l’an passé avant notre visite à Blida.

 

Oui, c’était sur nos colonnes…

J’imagine qu’il a eu à dire aussi après mon sacre au Gabon.

 

Naturellement il a dit que c’était l’œuvre de vos adjoints

Ô que oui, mais bien sûr.

 

Ici au Cameroun, il y a des gens qui pensent que Hannachi est responsable de la mort d’Ebossé…

Pas à ce point, mais sa gestion a fait que les tensions augmentent autour du club, et le résultat était prévisible.

 

Et si on parlait du NAHD, que gardez-vous de cette aventure ?

Là aussi, j’étais toujours surpris que certains gens soient dans la direction, le président m’a paru quand même quelqu’un de correct (Bachir Ould Zmirli en l’occurrence).

 

Vous savez qu’il est maintenant 2e vice-président de la FAF ?

Ah bon ! En voilà une deuxième nouvelle à laquelle je m’attendais pas, mais comme je vous l’ai dit c’est quelqu’un de correct. Mais à cette époque-là, il y avait un certain Kamel (NDLR : Saoudi), il n’était certainement pas transparent et clair dans ses actions, le genre d’énergumènes qu’il ne faut pas laisser traîner dans un club.

 

Est-ce qu’on peut dire que vous avez été déçu par votre aventure algérienne ?

Oui, vraiment, ça ne m’a pas du tout plu, des gens m’ont déçu…

 

Est-ce que l’aventure est plus décevante de ce que vous vivez actuellement avec le Cameroun ?

Même si je suis venu ici dans les moments les plus difficiles, on m’a laissé travailler, on a vu le résultat, j’ai décidé de me battre contre certaines gens, mais à la fin ils ont vu que ma façon de travailler était la bonne, on a gagné la CAN, actuellement avec les résultats moins bons ça recommence, le coach est en danger, c’est la même chose ici ou partout dans le monde.

 

Votre compatriote Paul Put a pris l’USMA, et il va jouer dans 10 jours le match retour de la 1/2 finale de la C1, un commentaire... ?

Comme je le dis toujours, l’USMA fait exception, c’est un club bien structuré sur la bonne voie du professionnalisme, ils laissent travailler le coach, il prend ses responsabilités, car quand tout le monde se mêle et magouille, le coach est perturbé s’il est viré ça ne peut pas être sa faute, je connais bien Put, c’est un bon entraîneur, il peut donner encore plus.

 

Revenons à vous, au Cameroun on sait que c’est loin d’être la lune de miel avec la FecaFoot, votre contrat prend fin quand ?

En février prochain.

 

Vous vivez vos derniers mois, voire semaines ici, c’est ça ?

Je ne sais pas, pour le moment je me concentre beaucoup plus sur le match de demain, sur le match qui va suivre contre la Zambie, après je pense qu’on va évaluer la situation.

 

Il y a tout juste un an il y avait d’autres données, vous avez bien débuté contre nous, et vous voilà, un an après : le champion d’Afrique, éliminé du Mondial et proche de la porte de sortie, vous vous attendiez à tout ce contraste en si peu de temps ?

C’est ça la vie d’un entraîneur, les conditions changent, mais ce qui compte c’est le moment actuel, on va tout faire pour gagner le match de l’Algérie, on a le statut de champion d’Afrique à défendre, et terminer dernier du groupe en étant éliminés serait une honte, on fera appel à notre fierté pour essayer de vous battre.

 

Pensez-vous que le Nigeria mérite d’être l’heureux élu dans ce groupe ?

Le Nigeria est une très bonne équipe, mais dans l’autre sens l’Algérie et le Cameroun déçoivent.

 

Vous voulez dire qu’ils en ont profité…

Voilà, nous ne sommes pas à notre meilleur niveau.

 

De loin vous suivez ce qui se passe chez les Verts, quelle analyse faites-vous de leur situation ?

Pour moi c’est inexplicable, ces derniers jours quand je préparais mon match, je regardais vos joueurs qui sont normalement, le noyau de l’EN, surtout ceux qui jouent dans les grands clubs, Séville, Porto et d’autres… Je ne peux pas vous dire, c’est inexplicable, des joueurs avec un tel talent, pourquoi, c’est la grande interrogation…

 

On parle d’une mauvaise gestion du groupe et de l’ambiance en son sein, pensez-vous que c’est le rôle du coach ou de la fédé de mettre de l’ordre ?

D’abord les responsables de la fédération, à eux d’instaurer un climat et un mode de vie, ensuite c’est au coach de faire son travail, ma première mission ici c’était de monter un groupe, mais parfois il y a des interventions de l’extérieur qui entravent notre boulot, qui rendent le travail de notre coach impossible.

 

Ecarter des joueurs comme Mahrez et Slimani, que vous connaissez si bien, vous l’auriez osé ?

Tout est faisable, mais y a un grand danger, car il n’y a pas seulement ces deux-là, Bentaleb aussi et Ghoulam qui…

 

Qui se dit malade…

Hein, vous voyez, alors ? Qu’est-ce que le coach peut faire face à ça ? C’est la FAF qui doit intervenir.

 

Vous vivez ce genre de choses chez vous ici, avec Toko Ekambi récemment…

Oui, c’est presque le même cas, et pour revenir à vos joueurs, je me dis que ceux qui sont là vont avoir l’occasion de montrer quelque chose, la motivation sera là, et cela fait que le match sera difficile.

 

Parmi ces nouveaux un de vos anciens joueurs, à savoir Bendebka…

Oui, je lui souhaite bonne chance.

 

Le nouveau patron de la FAF a opté pour un Espagnol, vous qui connaissez bien le foot algérien, pensez-vous que c’est le bon choix ?

Je n’ai pas d’avis là-dessus.

 

Zetchi pensait que le style de jeu espagnol ressemble au nôtre…

Je pense qu’il faut voir la façon de travailler du coach, sa façon de gérer, parfois, il faut avoir quelqu’un qui agit plus comme un père de famille que quelqu’un de très sévère.

 

Vahid savait jouer les deux rôles…

Voilà, donc c’est à la FAF de savoir ce qu’il faut, ça n’a rien avoir avec la nationalité.

 

Pensez-vous que le fait de continuer à chercher un Vahid-bis est une mauvaise chose ?

Il y en a beaucoup comme lui, les coachs, ce n’est pas ce qui manque, Vahid a fait de grandes choses, mais le coach doit savoir aussi faire adapter son groupe à sa façon de voir les choses.

 

Savez-vous qu’Alcaraz est déjà menacé ?

(Il claque les mains) C’est la vie du coach, quand ça va mal on cherche des coupables, il y a des personnes qui disparaissent et d’autres qui reviennent, imaginons, le coach sera viré en cas de défaite, ça sera votre 4e entraîneur en un an ? Est-ce la faute du coach ? Je peux vous dire que la FAF a fait son travail d’une manière très mauvaise, car ils ont toujours pris de mauvais entraîneurs, je dis ça parce que ce sont eux qui sont virés à chaque fois.

 

Même si votre nul à Blida a aussi précipité le départ du président Raouraoua aussi…

(Il sourit)…

 

Gourcuff a bien débuté mais il a cédé, on lui reprochait son entêtement à vouloir coûte que coûte faire passer son 4-4-2…

Avant d’appliquer un schéma, il faut d’abord voir ce que qu’on a sous la main, les joueurs, et puis quand il y a des tensions externes qui vous imposent des joueurs, c’est foutu.

 

Il y a une question qui s’impose, surtout que vous avez gagné la CAN en un temps record, est-ce vrai il y a un jeu à l’africaine auquel on doit s’adapter, ça parle trop dans ce sens chez nous, est-ce une obligation de jouer un jeu direct et d’éviter de trop faire circuler la balle sur des terrains pas souvent bons ?

Moi je n’ai certainement pas pensé à ça, à cette façon africaine de jouer, moi j’ai essayé d’instaurer quelque chose, une collectivité, une solidarité, mais je n’ai pas insisté sur l’efficacité ni sur le jeu direct, car soit on est efficace soit on ne l’est pas, ça n’a rien avoir avec le coach, c’est une qualité chez les joueurs, mais il faut montrer une façon précise de jouer aux joueurs, et il faut y tenir, mais il faut un soutien de tout le monde, de l’extérieur notamment, éviter de critiquer dès le début d’une mission d’un entraîneur, car à chaque entraîneur sa façon de gérer l’équipe.

 

La solution, selon vous, pour l’Algérie, on doit laisser le temps à Alcaraz ?

Il doit retrouver une équipe.

 

C’est pour ça qu’il a écarté pas mal d’éléments, il cherche l’esprit d’équipe…

Dans des situation pareille, la pression est tellement grande sur le dos du coach qu’il panique un peu, car il sait que si ça ne va pas… , il est possible qu’il ne soit pas d’accord avec la mise à l’écart de Slimani et Mahrez, et qu’il veuille les faire jouer, mais s’ils sont critiqués, il va céder, je dis ça comme ça en étant très loin de chez vous, c’est mon avis, un coach peut aussi bénéficier du soutien, et quoi qu’il fasse, il reste, et là il pourrait mettre en marche son plan.

 

Une dernière question, ça vous concerne, si un club algérien structuré comme l’USMA fait appel à vous un jour, allez-vous accepter de revenir ?

Non, ça ne m’intéresse pas.

  1. M. A.

 

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