Brahimi, Belkalem et Yebda ou la «mondialisation du football»

Yacine Brahimi, Hassan Yebda et Essaïd Belkalem, ont, hormis le fait d’être trois footballeurs professionnels talentueux, une maman originaire de Tizi Ouzou et d’être international algérien, mais ont un autre point en commun.

Ils ont tous les trois le même employeur. Comment cela peut être possible, me diriez-vous, puisque l’un joue en Liga dans le club de Granada CF, alors que l’autre évolue en Serie A dans le club d’Udinese, et que le troisième, enfin, évolue dans la pluvieuse banlieue de Londres chez les «Guêpes» de Watford, en Championship, la deuxième division anglaise.

Ils n’ont pas le même maillot, mais le même patron

Pourtant, c’est la même personne qui signe les fiches de paie de ces trois joueurs, à savoir Monsieur Pozzo, le très fortuné milliardaire italien, qui travaille entouré de sa famille. Avec la transformation des clubs en sociétés anonymes et leur cotation en bourse, nous sommes arrivés à des situations rocambolesques dans lesquelles nous sommes actuellement. Mais dans cette économie de marché où Renault et Nissan appartiennent au même patron, pourquoi Watford, Granada et Udinese n’appartiendraient-ils pas au même actionnaire majoritaire ? Car même si l’UEFA avait posé comme «garde-fou» l’interdiction pour un même propriétaire d’acheter deux clubs de même pays, même s’ils évoluent dans des divisions différentes, rien n’interdit d’acheter plusieurs clubs dans le même continent. Mais cette situation inédite, bien que licite, a des effets pervers dont nous ne commençons à voir que la partie émergée de l’iceberg.

Des «auto-transferts» devenus des «mutations internes»

Car du côté de la famille Pozzo, l’argent, lorsqu’il rentre, il ne sort plus, puisqu’il autoalimente et remplit les caisses de ses différents clubs, avec ses propres joueurs. 80% des transferts d’Udinese, de Granada ou de Watford se font avec des joueurs d’Udinese, de Granada ou de Watford. Pourquoi donner de l’argent à d’autres clubs concurrents lorsqu’on peut équilibrer le bilan de son groupe. Car le groupe Pozzo, en prêtant Essaid Belkalem de l’Udinese à Watford et en prêtant Yebda de Granada à l’Udinese, Gianluca Pozzo, l’homme dont en Italie on dit qu’il a le plus grand réseau du football européen, équilibre à la fois ses équipes sportivement, tout en équilibrant les comptes. Car il allège par la même la masse salariale de Granada en la transférant à Udinese qui se porte mieux et qui pourra avoir plus de charges à déclarer au fisc et donc moins d’impôts à payer. Alors qu’en prêtant Belkalem à Watford, c’est un renfort sportif. Il renforce la défense d’un club de Ligue 2 avec un international mondialiste.

Et si demain Granada, Watford et Udinese venaient à s’affronter ?

Cette stratégie de Gianluca Pozzo et de sa famille s’avère pour le moment très payante, et les trois clubs progressent dans la feuille de route qui est la leur. Le problème est que cette stratégie, si elle continue à se développer aussi rapidement, va être confrontée à une situation inédite en sport, et en particulier en football, celle du conflit d’intérêt. Car ce qui fait la beauté du football, c’est l’équité et le côté aléatoire du résultat où le champion de cinquième division peut battre le Real Madrid. Imaginez une finale de Ligue des champions opposant l’Udinese au Granada CF ? Est-ce que les équipes s’affronteront sans calcul aucun ou est-ce que Gianluca Pozzo désignera a priori et par rapport à ses intérêts le nom du champion d’Europe ?

 

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