Le dernier USMH-MCA a été émaillé de graves incidents, qu’avez-vous à dire à ce propos, vous qui avez porté le maillot des deux clubs ?
J’ai été très déçu et très affecté en apprenant que des incidents aussi graves aient été enregistrés avant le match USMH-MCA. Ce n’est pas normal, ce ne sont pas des choses qui doivent se produire lors d’un match de football. Pour moi, ce sont des problèmes entre X et Y qui règlent leurs comptes à travers une rencontre de football.
A qui faites-vous allusion ?
Il y a eu quelques incidents au match aller, à Bologhine, entre membres des deux comités de supporters, alors certains ont mis de l’huile sur le feu et ont vite évoqué la revanche au retour, à Lavigerie. Moi et tous les anciens Harrachis, que ce soit les ex-joueurs, les ex-dirigeants ou les anciens supporters qui ne vont plus au stade, nous tenons à condamner ces actes et nous en démarquer. Il n’est pas logique de voir de telles choses entre des Algériens, des frères. Vous m’offrez, ici, une occasion pour répondre à un dirigeant harrachi qui laisse entendre que tout ce qui arrive entre le MCA et l’USMH est à cause de deux anciens joueurs.
Pouvez-vous être plus explicite ?
Les gens disent, à tort, que tout s’est enflammé depuis le problème survenu entre moi et Ouahid, l’ancien joueur du MCA. Après avoir quitté le MCA, j’ai critiqué dans les journaux son président, M. Djouad. Ouahid m’a répondu à la place de Djouad, je lui ai répliqué et la polémique s’est installée entre nous deux. En cette saison-là, le MCA et l’USMH étaient en D2 et jouaient l’accession. Peu avant le match retour à El-Harrach, on a fait croire que j’avais dit que je ne voulais voir aucun drapeau du MCA au stade Lavigerie. Ce qui est complètement faux. En vérité, on m’avait posé une question sur le MCA, j’avais répondu que son équipe est forte surtout grâce à ses supporters. Et c’est vrai, avec les Chnaoua, les joueurs du MCA se transcendent. De là, on a assimilé mon propos à une invitation à la chasse aux supporters du Mouloudia. En fait, j’avais juste donné mon avis. C’était de bonne guerre, comme on dit, mais les gens ignorent une chose.
Laquelle ?
Les gens ne savent peut-être pas qu’il n’y a aucun problème réel entre moi et Ouahid. La preuve, une année plus tard, je suis devenu manager général de l’USMH, et c’est moi qui l’ai fait signer à El-Harrach ! C’est même moi qui ai négocié à sa place. Voilà qui prouvait que l’incident entre nous était clos.
Certains affirment que l’animosité entre les deux clubs est antérieure au problème Lounici-Ouahid…
Il est vrai que la rivalité entre le MCA et l’USMH est vieille, mais elle est restée sportive et jamais de tels incidents ne se sont produits. Je me souviens qu’on avait battu le MCA 3 à 0 à Bologhine, en 1987, mais il ne s’est rien passé dans les tribunes. Certes, de temps à autre, il y avait des échauffourées en dehors du stade, mais cela se produisait aussi avec le CRB, le NAHD et d’autres clubs de la capitale. Seulement, jamais les choses n’ont atteint une telle proportion.
Que fau-il faire maintenant pour stopper le phénomène ?
C’est le rôle des dirigeants, des responsables sages qui doivent éteindre le feu. Les supporters, eux, sont pour la plupart des jeunes qui ignorent leurs liens de frères en tant qu’Algériens. Il faut prendre exemple sur Barça-Real où le spectacle sur le terrain est la seule attraction. Entre le MCA et l’USMH, les choses empirent depuis six ou sept ans, il faut que ça cesse !
Que pouvez-vous faire personnellement pour que les esprits se calment ?
Déjà, au nom des anciens de l’USMH, je lance un appel à tous les Harrachis pour les inviter à prôner la sagesse. Les Chnaoua sont les frères des Harrachis, comme eux ils sont issus de quartiers populaires. C’est bien d’encourager son équipe, mais il ne faut plus dépasser les limites. Aujourd’hui, quand un supporter part au stade, il n’est pas sûr de revenir à la maison, c’est grave et cela doit cesser. De nos jours, après le stade, c’est dans les hôpitaux, les morgues ou les cimetières qu’on retrouve les supporters, c’est très, très grave ! Alors, Mouloudéens, Harrachis, autorités, tous doivent unir leurs efforts pour stopper l’hémorragie. De mon côté, je peux vous apprendre qu’on est sur une bonne initiative pour sensibiliser les gens.
Laquelle ?
Le 31 mai prochain, on organisera le jubilé de Mohamed Rahem, l’ancien joueur international de l’USMH qu’on surnomme Bouboune, au stade Lavigerie. Les Mouloudéens y sont conviés et ce sera l’occasion de faire la réconciliation. Je souhaite que les supporters des deux clubs s’assoient dans les tribunes et fassent la fête ensemble pour l’USMH, pour le MCA, pour Mohamed Rahem. Ceux qui n’en veulent pas, qu’ils nous laissent en paix, on sait qu’ils ont beaucoup d’intérêts, personnels, pour que la situation demeure en l’état.
C’est-à-dire ?
Il y a des gens, par exemple, qui voient d’un bon œil le fait que les supporters harrachis envahissent le terrain, c’est parce qu’ils savent que c’est la meilleure manière de s’assurer la perte du match par la suite. Il y a des gens qui n’aiment pas El-Harrach et font tout pour le détruire. Les jeunes supporters du club doivent faire attention. Un homme, ce n’est pas celui qui frappe son frère et le blesse ou le tue avec un couteau. Et là, je ne parle pas que de l’USMH, je m’adresse à toutes les galeries algéroises. Un supporter doit se montrer vigilant et ne pas rentrer dans le jeu de ce que se disent les joueurs ou les présidents dans les journaux. Les déclarations dans les médias sont de bonne guerre. Il faut savoir qu’après 90 minutes, les joueurs et les dirigeants restent amis, alors aux supporters d’en faire autant. Et surtout, il faut bien réaliser qu’un supporter, une fois mort, ne reviendra jamais chez lui, que ses parents ne le reverront plus et que le coupable en sera comptable devant Dieu !
Certains préconisent de faire comme entre Lyon et Saint-Etienne ou Marseille et Paris où les supporters sont interdits de déplacement, qu’en dites-vous ?
Ce n’est pas une solution. C’est une faiblesse que de songer à ça, c’est vraiment grave de l’envisager. Cela veut dire qu’on n’est même pas capables de gérer deux galeries. Et on veut ensuite gérer le football national… Que je sache, entre El-Harrach et le Mouloudia, ce n’est quand même pas le conflit entre Israël et la Palestine ! Non, la solution doit venir des anciens, joueurs, entraîneurs et dirigeants des deux clubs. Les jeunes d’aujourd’hui ne connaissent pas l’histoire des deux clubs. Beaucoup ignorent, par exemple, que jadis le MCA recevait ses adversaires à El-Harrach. Aussi, je dois mettre l’accent sur une chose : les journalistes ont un rôle éducatif dans leur fonction, ils doivent le jouer pleinement et ne plus attiser les haines. D’ailleurs, nous aurons l’opportunité d’en reparler lors d’une conférence de presse que nous teindrons prochainement.
Quand et à quelle occasion ?
Cela aura lieu la semaine prochaine, à l’occasion des préparatifs du jubilé de Mohamed Rahem. J’ai été très content de lire dans Compétition que le président de l’USMH est soucieux de régler ce problème une fois pour toutes. La tenue du jubilé de Rahem nous en offre une grande opportunité. Alors, allons-y tous main dans la main, Harrachis et Mouloudéens !
H. D.
«Faites la réconciliation le 31 mai au jubilé de Rahem
«Tout ça n’est pas à cause de moi et Ouahid
«Un supporter mort, ses parents ne le reverront plus…
Bio express
Né le 9 juillet 1967 à Alger, Khaled Lounici est un ancien joueur de l’USM Harrach où il a fait toutes ses classes étant jeune puis l’essentiel de sa carrière en seniors. En 1992, il a opté pour le club turc d’Aydinspor, pour deux saisons, avant de rentrer au pays pour porter le maillot de la JSB Ménaïel et faire, ensuite, le tour des grands clubs de la capitale. C’est ainsi qu’il joua à l’USM Alger, au MC Alger et au CR Belouizdad. Devenu entraîneur en 2005, il coacha l’équipe harrachie avant de prendre en charge les formations du MO Béjaïa, de l’O Médéa, de l’USM Annaba, du Paradou AC et de la JSM Skikda. En tant que joueur, il a gagné la coupe d’Algérie et le championnat d’Algérie avec l’USM Harrach.
On le surnommait Djeha…
Khaled Lounici était un joueur très malin sur le terrain. En plus de son habilité technique, il maniait très bien le verbe. Ainsi, il avait toujours un mot pour taquiner ses vis-à-vis et les déstabiliser. Cela se vérifiait dans ses déclarations dans les journaux. En dehors du terrain, Lounici restait aussi habile, quand il s’agissait de passer à la table des négociations, il s’arrangeait toujours pour tirer le meilleur profit. Pour toutes ces raisons, il a hérité du sobriquet de Djeha, celui à qui on ne la fait pas…