C’est en exclusivité et dans nos colonnes que l’ancien milieu de terrain et l’un des héros d’Oum Dourman, Hassan Yebda, a choisi de s’exprimer. Ayant été sous la coupe de Lucas Alcaraz pendant près d’un an et demi à Grenade, le joueur qui a pris part aux deux Coupes du monde avec les Verts, nous parle, dans un premier temps, de son actualité, mais surtout des deux matchs disputés par l’EN ces derniers joueurs. Bien évidemment, il évoque son ancien coach dans cette interview, ses forces mais aussi les choses qu’Alcaraz devra améliorer dans son comportement s’il veut réussir dans cette sélection. Enfin, Yebda, qui a joué cette saison au Portugal avec le club de Belenenses, nous fait savoir qu’il pense toujours à l’équipe nationale du moment qu’il est en forme et compétitif. Il affirme qu’à aucun moment l’idée de prendre sa retraite internationale ne lui a traversé l’esprit. Entretien.
On vous a un peu perdu de vue ici en Algérie, qu’est-ce que vous devenez ?
J’ai disparu de la circulation et c’est un peu normal, car après la Coupe du monde j’ai signé à Dubaï. Suite à cela j’ai arrêté pendant un an parce que j’ai eu des soucis là-bas, mais au final je suis revenu en début de saison au Portugal et plus exactement à Belenenses pour retrouver la compétition et ma forme, et tout s’est très bien passé…
Donc, une saison plutôt réussie…
Après une saison sans jouer, c’était un peu compliqué surtout que j’ai dû faire face à des blessures, mais à partir du mois de décembre tout est rentré dans l’ordre et j’ai joué presque tous les matchs. C’est pour dire que je suis content et satisfait de ma saison. Maintenant est-ce que je vais rester ou pas, je ne sais pas encore, on en discute avec le club depuis le mois de février, mais on n’est pas encore arrivés à un accord. Actuellement, je suis libre mais on poursuit les discussions avec les dirigeants du club portugais.
Avec du recul, ne regrettez-vous pas votre départ prématuré de Naples, après une superbe saison, c’était peut-être le tournant de votre carrière ?
Que ce soit sur le plan du jeu ou même avec les dirigeants napolitains, ça se passait super bien car j’avais joué 75% des matchs. J’avais signé un an de prêt avec une option d’achat que le club devait lever s’il me voulait avec un contrat de trois ans, un contrat déjà négocié préalablement. Eux, ils voulaient lever l’option d’achat mais moi je n’étais pas d’accord avec ce contrat négocié…
Et pourquoi ?
Et bien tout simplement parce qu’ils m’avaient dit que ça se passerait bien, on se remettra autour d’une table pour renégocier le contrat. Et comme ça s’est très bien passé, on devait revoir certaines choses, mais on n’est pas tombés d’accord car ils ne voulaient pas faire des efforts sur certains aspects et donc j’ai préféré partir.
C’était le tournant de votre carrière ce départ de Naples…
Oui et non, parce qu’il ne faut pas trop regretter les choix qu’on faits dans une carrière. En plus, je suis parti à Grenade où j’ai eu les ligaments croisés avec les deux ménisques, deux blessures qui m’ont valu un an et demi d’indisponibilité. A partir de là c’était un peu plus dur. Bon, ça s’est passé comme ça et il faut faire avec.
Justement parlons de Grenade où vous étiez sous la coupe de Lucas Alcaraz, mais avant cela vous en avez pensé quoi des deux matchs disputés par les Verts ces derniers jours ?
D’abord, j’estime que face à la Guinée on a vu une équipe un peu plus organisée que contre le Togo, mais pour ces deux rencontres, franchement je n’ai pas vu trop de différence avec Georges Leekens. Il n’y a pas eu de réels changements et pour l’instant il n’y a aucune touche d’Alcaraz, mais bon pour qu’il puisse le faire, il faut lui laisser du temps.
Sa touche, c’était d’avoir déniché le jeune Attal et de lui avoir fait confiance…
C’est vrai que ce qu’il a fait avec Attal tout le monde ne peut qu’applaudir, parce que ça a l’air d’être un super joueur. Il est très bon défensivement et offensivement il peut apporter des choses. Franchement, je lui tire chapeau pour avoir cru en ce jeune joueur qui a montré beaucoup de belles choses.
Sinon, que pouvez-vous nous dire sur cet entraîneur que vous avez eu pendant un an et demi ?
C’est un entraîneur que je connais très bien et je peux vous dire qu’il est très défensif. Tactiquement, il est très bon et il faut lui reconnaître ça. Mais comme je viens de vous le préciser, il est très défensif alors que notre équipe est composée de joueurs très offensifs. On l’a vu dans le deuxième match, la première mi-temps, ça s’est plutôt bien passé, mais en deuxième période tactiquement on n’était pas vraiment au point, il y avait de grands espaces entre les lignes et du coup ce n’était pas terrible.
Qu’est-ce qu’Alcaraz peut apporter à cette équipe ?
Incontestablement la rigueur défensive, car c’est un très bon tacticien. On a pu voir Bensebaïni qui s’est super bien débrouillé et qui a fait deux bons matchs, mais après il faut trouver la bonne paire derrière.
Pour vous Bensebaïni-Mandi, ce n’est pas encore la paire qui faut…
Personnellement, je ne pense pas que ce soit la paire parfaite, après il y a eu beaucoup de paires qui ont été essayées au cours de ces dernières années, mais aucune n’a donné satisfaction. Quand il y avait Bougherra, ça se passait bien, parce qu’il avait cette faculté à être complémentaire avec n’importe quel joueur, mais ce n’est plus le cas maintenant. Et j’espère justement que cet entraîneur pourra régler ces détails.
Et sur le plan offensif…
Ça sera peut-être ça le débat. On sait que la qualité, offensivement, on l’a avec Yacine, Mahrez, Hanni et aussi Boudebbouz qui peut apporter beaucoup. Ce dernier, le pauvre, a été boycotté et à qui on a collé une fausse étiquette alors qu’il a toujours fait preuve d’un grand professionnalisme. Donc, avec toute cette qualité de joueurs, c’est beaucoup plus facile offensivement et cela pour n’importe quel coach surtout si on défend bien. Mais concernant Alcaraz, personnellement, devant je ne sais pas ce qu’il peut apporter, mais défensivement il apportera sa touche, ça c’est sûr.
Le gros souci reste aussi le milieu de terrain, car après votre départ et celui de Lacen, rien ne va plus dans ce compartiment ?
Il est vrai qu’il y avait beaucoup d’espaces entre les lignes et les milieux de terrain adverses pouvaient facilement jouer avec Adebayor. Certes, il y a un petit souci à ce poste-là, après les joueurs qui sont là essayent de faire de leur mieux et donner le maximum. Il y a des jours où ça se passe bien et d’autres où ça se passe moins bien. Malheureusement, en ce moment, ce n’est pas encore ça et j’espère qu’ils pourront trouver le remède.
D’après nos échos de ce premier stage, on dit qu’Alcaraz est plus strict que Halilhodzic, vous qui avait connu les deux, le confirmez-vous ?
Ah oui, c’est exactement ça. Alcaraz est quelqu’un de très strict, rigoureux et c’est aussi quelqu’un de rancunier…
Rancunier, dans quel sens ?
Déjà sur le terrain un joueur qui fait des erreurs notamment sur le plan défensif, il a du mal à laisser passer. Mais aussi dans la vie de tous les jours. Les retards, il n’admet pas du tout ça…
D’ailleurs, Taïder aurait déjà fait les frais après qu’il soit arrivé en retard au stage…
Je ne sais pas pour Saphir, mais ça pourrait être vrai, car on a vu Adlène qui n’est pas du tout en forme et qui a été préféré à Taïder.
Donc, ce coach est tout à fait capable de se passer de n’importe quel joueur, c’est ça ?
Tout à fait. Si un cadre ne se donne pas à 100% ou qui n’est pas en forme, Alcaraz ne va pas passer par trente-six chemins, il le mettra sur le banc ou se passer de ses services. Vraiment, il ne blague pas avec ça et je peux le confirmer. Personne ne peut lui enlever cette particularité, il est vraiment comme ça.
Croyez-vous que ce coach peut réussir en Algérie ?
Je pense qu’avec cette équipe, il y a beaucoup de coaches qui peuvent réussir. Après, on est en Afrique c’est complétement différent. Je l’ai entendu dire qu’il avait entraîné beaucoup d’Africains et d’Algériens, ce n’est pas du tout pareil. Jouer en Afrique c’est très particulier, mais j’espère qu’il réussira et qu’on pourra retrouver cet état d’esprit qui a animé cette équipe durant plusieurs années. En tout cas c’est tout le mal que je lui souhaite.
Justement, c’est cet état d’esprit qui manque à ce groupe depuis la Coupe du monde…
Pour que le groupe puisse retrouver cet état d’esprit, il faut que les joueurs passent beaucoup de temps ensemble, mais que le coach aussi vive avec les joueurs et pas rester dans ce coin, se disant qu’il est là juste pour le football. Il devrait donc être plus ouvert et ça ferait beaucoup de bien à l’équipe.
Vous le trouvez un peu renfermé sur lui-même…
Moi, je suis resté un an et demi avec lui, j’ai dû lui parler deux fois max. Donc, côté relationnel il doit faire des efforts, surtout nous les Algériens qui aimons communiquer et le contact. Parler avec les joueurs qui ne jouent pas, faire sentir que tout le monde est concerné afin d’éviter une mauvaise ambiance au sein de l’équipe.
Contrairement à beaucoup d’autres anciens internationaux, vous venez jamais voir les matchs de la sélection, pourquoi ?
Tout simplement parce que les matchs tombent souvent au mauvais moment. Un problème d’indisponibilité, d’ailleurs ce vendredi je serai à Skikda pour un match caritatif, c’est pour vous dire que quand je peux venir, je viens toujours avec plaisir, ou sinon je reviendrai en sélection si le coach me fera appel…
Ah bon, défendre les couleurs nationales vous tente toujours…
Bien sûr que oui. Il faut savoir que je n’ai jamais pris ma retraite internationale. Moi, je considère que du moment qu’on est compétitif dans un championnat dont le niveau est bon et que qu’on estime qu’on peut encore apporter quelque chose à la sélection et bien oui. Certes, j’ai 33 ans mais football parlant je dois avoir 28 ans, car avec toutes les blessures que j’ai eues je me sens très bien et en forme, donc oui je serai ravi de porter à nouveau le maillot de mon pays.
Asma H. A.