Des points positifs difficilement décelables à chaud, où, la déception aidant, l’être humain a souvent plus tendance à voir le verre à moitié vide qu’à moitié plein. Mais à froid, en faisant le bilan que ce genre de grands tournois impose, on s’aperçoit qu’il y a de quoi être optimiste pour la suite.
Une équipe qui a un fond et une identité de jeu
Car cette équipe, même si elle a eu d’énormes problèmes pour marquer, a produit du jeu et du mouvement offensif, alors que, dans le passé, c’est ce qui nous manquait. Et ce constat fait l’unanimité chez toutes les personnes objectives que nous avons rencontrées ici en Afrique du Sud. De l’entraîneur, au consultant, en passant par le journaliste ou l’homme de la rue. Ils nous ont tous dit : «L’Algérie a joué le meilleur football durant cette CAN et a bizarrement été éliminée.
Belfodil, le «tueur des surfaces» tant espéré ?
C’est pour toutes ces raisons et la proximité des prochaines échéances que la FAF a décidé de continuer avec Vahid Halilhodzic sans tout chambouler, en essayant de régler uniquement ce qui n’a pas marché : l’efficacité offensive, en annonçant le renfort, notamment, de celui que ses fans surnomment le «Ibrahimovic algérien», le Parmesan, Ishak Belfodil. Mais la plus grande réussite de Vahid Halilhodzic, c’est l’union de tous les joueurs qui composent la liste des 23 de l’équipe nationale, et ça, de mémoire de suiveur de l’équipe nationale, c’est la première fois que ça se produit.
Pas de pros, pas de locaux, juste 23 Algériens
Depuis sa création, au lendemain de l’indépendance, notre équipe nationale a toujours été polluée, n’ayons pas peur du mot, par le problème qu’en Tunisie ils appellent plus justement «joueurs locaux/joueurs expatriés» et que chez nous, nous appelons dans le langage usuel «pros/locaux». Là où nombre de sélectionneurs nationaux, et pas des moindres, se sont cassés les dents, Vahid Halilhodzic a réussi.
De Dahleb à Feghouli
L’Algérie étant un pays d’émigration, nombre de personnes sont allés, depuis toujours, travailler ou tenter l’aventure à l’étranger. Ces Algériens déracinés ont toujours transmis à leurs enfants l’amour du football et du pays. Ces Algériens d’outre-mer sont devenus footballeurs professionnels et, depuis l’indépendance, par vagues massives comme aujourd’hui, ou à dose homéopathique, comme par le passé, des jeunes footballeuses et footballeurs ont de tout temps rejoint l’équipe nationale. Mais différence culturelle oblige, il y a toujours eu des soucis plus ou moins grands.
Du clash de 1986 à l’entente cordiale de 2009 et à l’exception Zaoui
Ces relations pros-locaux en équipe nationale ont été durant des décennies plus ou moins tendues. Car si un joueur comme Dahleb a toujours fait l’unanimité, pour d’autres, les relations avec leurs compatriotes évoluant au pays ont été tendues. Souvenons-nous du clash Belloumi-Benmabrouk de 1986 ou la sortie d’Arafat Mezouar en 2009 alors que l’équipe était en passe de se qualifier au Mondial. Mais, dans la majorité des cas, comme l’a fait l’équipe de Rabah Saadane, par exemple, avec un système d’entente cordiale et de coexistence pacifique. On se serre la main, on s’entraîne ensemble, on se soutient sur le terrain, mais, pour le reste, on se regroupe par affinité en deux groupes distincts, celui des locaux et celui des «immigrés». Car, dans le code de l’équipe nationale de ces années-là, un local qui devient pro en Europe reste quand même dans le groupe des joueurs locaux (Saïfi, Zarabi et Bezzaz par exemple). Seule exception, le Chélifien Samir Zaoui, qui a toujours été à l’aise avec les deux groupes.
Ali Fergani a essayé de changer les choses, mais…
Un seul sélectionneur a essayé de s’attaquer au problème : Ali Fergani. L’ancien capitaine des Verts de 82, qui connaissait bien le problème, a voulu casser cette cloison entre locaux et pros de manière coercitive lors d’un de ses passages en sélection. Il a voulu forcer les pros et les locaux à dormir et à manger ensemble, mais a échoué, les joueurs lui faisant remarquer que cela relevait de la sphère privée. Et depuis, même le «taureau d’échauffement» était divisé en deux.
Il aura fallu attendre la génération Boudebouz-Belkalem
C’est en essayant de souder et de créer l’esprit de groupe que Vahid Halilhodzic a réussi, involontairement, a créer l’union sacrée pros-locaux. Ou peut être est-ce seulement un problème de génération. Car, cette nouvelle équipe nationale, celle des Slimani, Soudani, Feghouli, Lacen, etc. a des problèmes, certes, mais elle est débarrassé de cette division pros-locaux. Qu’il s’agisse de l’entraînement, de l’hébergement ou des affinités, les joueurs sont tous ensemble. Tout le monde fait front ou plaisante ensemble. La division stricte entre footballeurs algériens appartient au passé et nombre d’observateurs en ont fait le constat. 50 ans après l’indépendance, la nouvelle génération semble avoir naturellement éliminé ce problème et l’histoire retiendra que c’est sous Vahid Halilhodzic que ce miracle a eu lieu.
Mohamed Bouguerra