Dans le but de mettre un peu de lumière sur la question, nous avons joint le directeur général de l’ENTV, M. Toufik Khelladi, qui, dans un entretien téléphonique, nous a permis de mieux comprendre les dessous de cette affaire, mais surtout regarder les choses d’un angle complètement différent de celui que les responsables d’Al-Jazeera nous ont proposé.
Toufik Khelladi a commencé par nous exposer le problème à ses racines, c'est-à-dire lorsque Sport Five l’agence qui détient les droits de retransmission à l’origine a décidé de vendre les droits au bouquet qatari. «Il faut savoir que Sport Five qui détient depuis quelques année les droits des phases finales des compétitions de la CAF a cédé l’ensemble des droits à cette chaîne cryptée, sans pour autant prendre le soin de protéger le sacro-saint droit de la territorialité, c'est-à-dire le droit du public de voir en clair le spectacle de son équipe nationale, dans les limites de son territoire, et que seule une chaîne terrestre peut garantir, nous avons écrit une série de messages au nouveau détenteur, en guise de propositions commerciales justes, en proposant le juste prix, pour cette compétition et pour les droits terrestres, nous nous sommes pas attaqués aux droits satellitaires car on savait qu’elles étaient soumises à des règles de plus en plus compliquées.»
«Cette chaîne a lié la vente des droits terrestres, et à un prix exagéré, à l’ouverture de leur bureau à Alger»
Après avoir raconté le début de l’affaire, le DG de la télévision nationale enchaîne avec la réaction des Qataris, surtout lorsqu’ils ont réclamé l’ouverture d’un bureau pour leur chaîne en contrepartie des droits de retransmission du signal, non sans oublier d’exiger une somme conséquente. «A notre grand étonnement, cette chaîne a linké la vente des droits terrestres de surcroît à un prix prohibitif, avec l’ouverture de son bureau à Alger, nous avons répondu que cela n’était pas de nos prérogatives, et que note seul souci était la retransmission du match, les Qataris ont alors insisté et réitéré leur intention de ne rien céder si on ne leur accorde pas ce qu’ils cherchent.»
«Le prix réclamé était 3 fois supérieur à notre proposition»
M. Toufik Khelladi continue de nous raconter les péripéties vécues avant le jour J et sur les détails des négociations. «Les responsables de la chaîne qatarie nous ont réclamé aussi un prix exagéré, il était 3 fois supérieur au prix que nous leur avons proposé, qui est la vraie valeur de ce match, c’était la première fois que cette chaîne s’implique dans des matche concernant l’Algérie, l’Egypte et la Tunisie, je me pose d’ailleurs la question s’il n y a pas d’autres objectifs que les objectifs sportifs derrière cette démarche.»
«Nous voulions simplement rappeler qu’il y avait certaines règles morales, sportives et éthiques à respecter»
Soucieux d’expliquer à l’opinion publique nationale et surtout internationale les dessous de cette affaire, M. Toufik Khelladi a tenu à rappeler les lois sur lesquelles l’ENTV s’est appuyée pour prendre la fameuse décision. «par notre geste, nous voulions simplement rappeler qu’il y avait certaines règles morales, sportives et éthiques à respecter, même si nous savons qu’on doit payer le prix, mais seulement le juste prix.»
«Voila pourquoi nous avons raison»
Fondamentalement, le détenteur des droits TV vend au bouquet le plus offrant, mais le détenteur doit habituellement obliger le bouquet à vendre à son tour les droits de retransmission terrestre aux pays concernés, or, dans ce cas, il y a eu avec ça du chantage, la télé algérienne n’a pas voulu suivre la démarche, elle a donc préféré diffuser les images de la télé burkinabè mais pas avant de fouiller dans les archives, car il y a eu bel et bien un antécédent entre Belges et Anglais, d’un côté et l’UEFA et la FIFA de l’autre, ces deux fédérations estimaient non fondée une décision prise par Londres et Bruxelles de réserver la diffusion de matchs de la Coupe du monde et de l'Euro à des chaînes de télévision gratuites. Les deux instances avaient contesté cette décision devant le Tribunal de l'Union européenne, mais avaient été déboutées, aujourd’hui la même chose s’est répétée chez nous, c’est pourquoi le DG de la télé étatique y croit, il explique. «Quand deux des quatre critères que je vais vous citer sont réunis, le détenteur des droits exclusifs, Al-Jazzera dans notre cas, doit impérativement dans des délais proposer de céder les droits permettant de diffuser le match en question sur la chaîne terrestre :
- Lorsqu’un événement fédère un public plus que celui traditionnellement concerné
- Lorsqu’un événement implique l’identité culturelle nationale d’un pays
- Lorsque l’équipe nationale de l’équipe concernée est impliquée dans le cadre d’une manifestation d’envergure
- Lorsque l’événement est traditionnellement d’une large diffusion télévisée, c’est pour dire que nous n’avons en aucun cas violé les lois, bien au contraire», dira-t-il.
Quand tous les matchs de la phase finale des deux tournois FIFA et UEFA (CAF dans notre cas) suscitent effectivement, auprès d’un public, un intérêt suffisant pour pouvoir faire partie d'un événement d'une importance majeure, l’opération devient à ce moment-là légitime, semble vouloir dire le DG de l’ENTV qui se dit prêt à affronter Al-Jazeera.
S. M. A.
Va-t-on vivre le même scénario en Egypte ?
La retransmission de la rencontre de l’EN via un signal de la RT Burkinabè devrait donner des idées à nos amis égyptiens.
En effet, n’ayant pas trouvé de terrain d’entente avec Al-Jazeera Sport, contrairement à nos voisins tunisiens, les Egyptiens pourraient avoir recours à la méthode suivie par la télévision algérienne.
Ayant été jusqu’ici un vrai tabou, la démarche de l’ENTV pourrait pousser la télévision étatique égyptienne à diffuser le match s ur la chaîne terrestre, à moins que les Qataris ne décident de baisser les prix, là on pourra enfin dire que l’ENTV a rendu un énorme service à toute la région.