Biskri : «Voilà qu’on limoge aussi les entraîneurs étrangers !»

Mustapha Biskri, entraîneur émérite, s’il est aujourd’hui un peu en retrait des terrains, il reste tout de même très attentif aux péripéties du football national. Il fait un état des lieux avec une remarquable lucidité.

Vous avez été, en tout début de saison, entraîneur de l’O Médéa. Nous vous savons observateur attentif, quel regard portez-vous sur le championnat de L2 ?

Moi j’ai fait les six premiers matches avec l’O Médéa. J’ai eu quand même à rencontrer des équipes que l’on présentait comme étant des grosses cylindrées, celles qui partaient avec les faveurs des pronostics. Maintenant, sur le niveau, je peux vous dire qu’il est aujourd’hui en dessous de la moyenne. On ne voit pas du beau football, et c’est bien dommage. A l’heure actuelle, et après quatorze journées, je peux vous dire que celui qui est à la onzième place aujourd’hui a encore de grandes chances d’accéder. C’est dire combien le niveau est le même de haut en bas. Il y a actuellement un nivellement par le bas, malheureusement. La preuve, ce qu’on appelle la moyenne anglaise qui est de 30 points en 15 matches, n’est acquise par aucune équipe. L’USM Blida, qui est leader, comptabilise 26 points, en cas de victoire la semaine prochaine lors de la dernière journée de l’aller, il comptabilisera 29 points, soit 1 de moins que la norme. Voyez-vous un peu, le topo ?

Et pour ce qui est de la Ligue 1 ?

C’est pratiquement la même chose qui arrive en L2. On attendait les grosses écuries de faire la course devant, voilà qu’on nous sert des équipes… à budget réduit on va dire. L’USM El Harrach est devant, elle fait la course en tête au nez et à la barbe des ténors qui trébuchent dans leur antre. Là aussi, il y a un nivellement par le bas.

Les gros budgets éprouvent de la peine à suivre le train, certaines font même du surplace. 

Cela est dû à quoi, selon vous ?

C’est l’instabilité au niveau de la barre technique qui conduit inévitablement à de telles situations. Nous sommes à peine à la quatorzième journée et dites-moi combien d’entraîneurs ont été limogés ou démissionnés, entre la L1 et la L2 ? Il y en a combien, une quinzaine ? Je pense oui, c’est ça. Vous ne trouvez pas que c’est beaucoup ? Y a-t-il quelqu’un d’assez lucide pour dire que c’est trop et qu’il faut mettre le holà ? Non mais franchement, vous ne trouvez pas que c’est beaucoup ? Il n’y a pas si longtemps on nous sortait ces histoires de l’entraîneur local qui n’est pas un bon entraîneur ; là maintenant ce n’est pas seulement le local qui est touché, même les entraîneurs étrangers sont  atteints par ce fléau. Mais là, oh ! Eux aussi (les entraîneurs étrangers, ndlr) ne sont pas de bons entraîneurs, ils ne le sont plus ? Messieurs les présidents, soyez sérieux, ouvrez les yeux, un peu de bon sens, c’est du n’importe quoi ça.

On vous sent très offensif là…

Non, j’essaye un tant soit peu réveiller les consciences, d’attirer l’attention sur ce fléau parce que c’en est vraiment un. Et là, ce n’est pas à la FAF ou la LFP d’organiser les clubs. Ceux-ci devront s’organiser d’eux-mêmes. Je défie ces présidents de me dire s’il y a un entre eux qui a un budget spécial pour les jeunes catégories. Ils ne forment pas, ils ne font rien allant dans ce sens, leur credo c’est de tirer sur les entraîneurs sur les arbitres, etc.

En parlant d’instabilité, vous avez été très instable, vous aussi, vous ne résistez plus…

Non, pas du tout… L’an dernier j’ai pris un club, et cette saison je n’en ai pris qu’un seul aussi. Non, on ne me l’a fait plus. Je suis quelqu’un de très résistant dans mon métier bien au contraire, mais là, on ne me l’a fait plus. J’ai appris la leçon. J’ai été trahi par deux fois, à Batna et à Annaba, par deux fois je voulais allez jusqu’au bout ensuite, parce que je suis ce commandant qui n’abandonne pas le navire, mais malheureusement, je me suis rendu compte que j’ai été trahi et là j’ai retenu la leçon. L’an dernier à Bordj Bou Arréridj, quand j’ai vu que les choses allaient mal se passer, je suis parti, point barre. Moi quand je commence avec une équipe et que je fais la préparation, je vais jusqu’au bout, je n’invente rien, mon parcours parle pour moi. Au RC Kouba, j’ai fait 5e et on nous avait défalqué 3 points, sinon, on aurait terminé un peu plus haut. Au NAHD, je fais 2e et 3e, mais là j’avais entamé mon travail depuis la préparation, et je n’ai pas été trahi.

M. O. 

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