Biskri : «Gourcuff navigue à vue, comme Christophe Colomb»

Mustapha Biskri ne comprend pas le fonctionnement de la sélection nationale sous le règne de Christian Gourcuff. Il assène ses vérités.

Lorsque Gourcuff, le sélectionneur national, affirme qu'il était convaincu qu'on ne pouvait pas aligner Slimane et Soudani ensemble sur la même ligne, ne peut-on pas en déduire que ce choix lui a été imposé ?

Effectivement, la première hypothèse qu'on peut émettre, c'est qu'on lui a dicté cela, qu'on lui a suggéré de le faire. Et que lui, pour des raisons qu'on ignore, a fait ce qu'il ne fallait pas faire. Cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas écouter les suggestions. Simplement, le dernier mot doit revenir au technicien. Aussi, si on est convaincu que telle option ne marche pas, il faut opter pour celle qui fonctionne. De la sorte, on montrera à celui qui fait des suggestions qu'il se trompe. Après, les gens se taisent. Mais en faisant cette déclaration, Gourcuff laisse croire qu'il a appliqué une chose dont il n'était pas du tout convaincu, c'est finalement plus grave.

Qui lui fait de telles suggestions, Raouraoua, le président de la FAF ?

Cela m'importe peu, tout le monde peut donner un avis mais, moi, en tant que technicien, j'ai mes compétences et mes convictions. J'applique mes choix. Il est juste question de prendre ses responsabilités. On ne peut pas s'empêcher de croire que la déclaration de Gourcuff sous-entend qu'on lui a imposé certains choix.

Le dernier match amical contre la Guinée a été une catastrophe…

Indépendamment du résultat, c'est l’état d’esprit qui m'inquiète. On a l'impression que l'équipe n'a plus envie de mordre. Un compétiteur ne calcule pas, il se donne de la même manière en match amical ou officiel. Regardez comment les joueurs de l'équipe de France se donnent en match amical pour préparer le prochain Euro que leur pays va abriter en 2016. On a l'impression qu'ils jouent un match officiel.

Gourcuff a pourtant eu le temps pour mettre en place sa stratégie…

Au jour d'aujourd'hui, il totalise une vingtaine de matches avec la sélection algérienne, mais on ne voit toujours pas l'ossature de l'équipe et les joueurs remplaçants. Ça devient très inquiétant. Brahimi ne devait pas jouer contre la Guinée, nous avait-on dit, on aurait dû s’en tenir même si l'EN était menée 6-0. On ne le fait pas rentrer pour sauver les meubles. Là, ça devient encore plus inquiétant. Il ne faut pas naviguer à vue comme le faisait Christophe Colomb. On a dit qu'il avait découvert l'Amérique, alors que c'était l'Amérique qui l'avait découvert. Quand celui-ci a quitté le Portugal, il n'avait pas de carte géographique ni de boussole, il naviguait à vue. Il a atterri en Amérique par hasard. Alors, nous ne voulons pas atteindre un objectif par hasard.

Vous voulez dire que Gourcuff navigue à vue comme Christophe Colomb ?

À en juger par ce que je vois, bien sûr que oui. On entend un certain langage mais on voit autre chose sur le terrain. Et il se plaît d'insister sur certaines choses. On ne peut pas imposer à contre nature un système de jeu à ses joueurs. On a trois attaquants vifs, on ne doit pas aligner deux attaquants devant, je m'excuse. On a des attaquants capables de faire la différence, il faut leur faire confiance et placer les deux milieux de terrain derrière, à vocation offensive. Et bien sûr, il faut régler le problème numéro 1 depuis la venue de Gourcuff.

Lequel ?

Le système défensif défaillant. A la perte du ballon, on ne voit pas clairement cette agressivité au niveau de la défense et du milieu de terrain. Pire, on défend maintenant comme des débutants. Le deuxième but encaissé contre la Guinée en témoigne. Il faut revoir les choses à la base. Et comme par hasard, on a affaire à des joueurs formés dans des écoles françaises. Alors, qu'on ne vienne pas dénigrer les joueurs locaux à qui on ne donne même pas la chance. C'est clair, net et précis : on ne fait pas confiance au foot local. Et comme par hasard encore, ceux qui marquent en sélection des ex-joueurs locaux partis à l'étranger.

Oui, Slimani et Soudani...

Des joueurs sortis de Chéraga et de Chlef, pas de Nantes ou une autre ville française. Que je sache aussi, Chéraga est toujours en Algérie, pas en France. Ce n'est pas Chéraga de Toulouse ! Je crois qu'on a peur de mettre d'autres joueurs locaux de peur de voir, demain, la sélection nationale majoritairement composée d'éléments issus du pays et ayant brillé ensuite en Europe. Et je ne parle pas de Djabou qu'on a cassé. Pendant ce temps, on fait appel à des joueurs de seconde division française pour chauffer le banc.

H. D.

 

Classement