C’est un homme perdu, complètement désemparé auquel nous avons eu droit. 2 mois après sa suspension, Kheiredine Merzougui ne s’en remet toujours pas. Plein de colère et de rancœur contre le médecin du club, le Dr Abdelwahab, qui est, selon lui, la cause de ses malheurs, le buteur mouloudéen garde espoir de voir sa peine annulée ou au moins réduite. Son dernier recours, le président de la FAF, Mohamled Raouraoua auquel il demande, par le biais de notre journal, une entrevue. Franc, direct, il a répondu à presque toutes nos questions sans détour. Entretien.

 

«Le D^r Abdelwahab m’a détruit»

«Arrêtez de comparer mon cas à celui de Belaïli !»

 

«C’est dangereux qu’il soit toujours médecin du MCA»

 

«Plus personne ne lui fera confiance »

 

«J’aurais dû tout déballer lors de ma première audition»

 

Entretien réalisé par Amirouche Boudjedou

 

Que devient Merzougui ?

Ouuuuf, (il se tait un bon moment, ND LR), rien. Je ne sais pas quoi vous répondre…

Que faites-vous de vos journées ?

Je n’ai pas de programme précis. Je me lève et je fais la première chose qui me vient à l’esprit. Souvent,  je ne fais rien.

Ce qui vous est arrivé a chamboulé votre vie…

Complètement. Avant, je planifiais tout. Je réglais mon réveil pour ne pas arriver en retard à l’entraînement, je savais ce que je devais faire dans l’après-midi, je savais même ce que j’allais manger à midi, j’avais une heure précise pour aller me coucher… J’avais une vie tout simplement, une vie de footballeur professionnel. Et je peux vous dire que je respectais les règles. Mon hygiène de vie était irréprochable, à la fin je me fais suspendre pour dopage, c’est incroyable !  

Et quand arrive le week-end…

Vendredi et samedi sont les journées les plus difficiles pour mo. J’essaie de ne pas lire les journaux, ne pas regarder la télé pour oublier que je pouvais être avec mon équipe en mise au vert, ou en train de m’échauffer pour jouer un match… Mais je finis toujours par céder à la tentation… Sans le vouloir, je me retrouve avec un journal entre les mains, en train de lire les pages du Mouloudia… Cela m’arrive souvent, surtout ces derniers temps, au bout de quelques minutes,  j’appelle mes amis au MCA pour confirmer telle ou telle information, ou tout simplement pour féliciter un joueur ou tenter de remonter le moral à un autre…

C’est une torture, vous n’avez pas des fourmis dans les jambes…  

Je ne vous le fais pas dire. Les fourmis dans les jambes, c’est  chaque jour. Déjà avant ma suspension, j’attendais l’heure de l’entraînement avec impatience pour pouvoir taper dans un ballon. J’aime jouer au foot, c’est toute ma vie. Si j’ai abandonné mes études, c’est pour justement pouvoir faire ce que j’aime, jouer au football. Cela dit, je m’entraîne de temps à autre. Je joue avec des copains, je prends part à des sixtes, je cours des fois, j’essaie de maintenir la forme… On ne sait jamais.

Vous le faites dans l’espoir de voir votre suspension annulée ou réduite, ou bien pour décompresser … 

(Il réfléchit un moment, NDLR), on va dire les deux.

Justement, où en est votre recours ?

J’attends le verdict du TAS algérien.

Et si c’est négatif, vous allez faire quoi ?

Je saisirai la FIFA. Je ne peux pas abandonner, je suis une victime,  4 ans, c’est trop.

Avez-vous essayé de contacter Raouraoua pour tenter de lui expliquer votre cas et défendre votre cause ?

Non, je ne l’ai pas fait. Mais j’y ai réfléchi…

Après tout, vous n’avez rien à perdre…    

Oui, mon agent m’a suggéré de faire ça, mais je ne sais pas pourquoi je ne l’ai pas fait. Je vais demander audience au président. Je lui demanderai d’écouter ce que j’ai à dire, écouter ma version des fais et si possible plaider ma cause… Je suis désespéré…

Ce ne sont pas ses déclarations concernant le cas Belaïli qui vous ont dissuadé de le faire…

Non ! Mon cas est différent de celui de Youcef. Il faut arrêter de comparer mon histoire à celle de Belaïli. J’ai lu ce que le président Raouraoua a dit concernant le cas Belaïli, il a clairement avancé qu’on ne devrait pas défendre un tricheur, et il a raison ! Mais moi, je ne me sens pas visé, alors pas du tout. Je ne suis pas un tricheur. Je n’ai pas consommé ce produit pour améliorer mes performances ou par dépendance, je me sentais faible, je voulais prendre des vitamines lorsqu’on était en pleine préparation, Ighil et Sayeh nous faisaient bosser comme des bêtes.  J’ai donc fait ce que tout joueur professionnel ferait dans ce cas : demander l’avis et l’autorisation du médecin du club et celui du soigneur pour commencer à prendre ce produit. J’ai eu leur accord… Je me souviens, il m’a avait dit : c’est made in USA, pas de soucis, si c’était made in China, je te dirais de ne pas la prendre… La suite vous la connaissez. On m’a trompé, on m’a trahi, je n’ai rien fait de mal, si ce n’est d’avoir fait confiance à des gens qui ne le méritaient pas.   

Vous en voulez toujours à Abdelwahab, le médecin du club à ce qu’il paraît…

Je ne lui pardonnerai jamais. Il m’a détruit, il a ruiné ma vie…D’habitude, je pardonne facilement, mais là, je ne peux pas, le mal qu’il m’a fait, qu’il a fait à ma famille… Mais bon… Je suis croyant, je le laisse à sa conscience, Le bon Dieu saura le punir pour ce qu’il a fait.

Vous êtes plein de rancœur…

Ce n’est pas de la rancœur, c’est de la colère. On parle d’un médecin, qui a fait le serrement d’Hippocrate. Je lui ai fait confiance et il m’a trahi. Il a trahi sa noble profession, il a trahi le Mouloudia… Comment il fait pour dormir, pour se regarder dans une glace…Je ne veux pas parler de cet individu… Est-il conscient du mal qu’il m’a causé ? J’avais des rêves, des projets, des ambitions, il a tout effacé, d’un revers de main.

On est obligés d’en parler, c’est le cœur même du problème…

Que voulez-vous que je lui fasse ou que je dise de plus sur lui ? La justice de Dieu existe, il finira mal, le Bon dieu le punira.  

Le fait que le Mouloudia le maintienne en poste ne vous dérange pas…

Ça me tue, ça me rend fou ! Mais que voulez-vous que je vous dise, je ne suis pas président du MCA, mais si vous voulez mon avis, je crois que c’est une très mauvaise idée que de le laisser travailler au Mouloudia. Il a déjà privé le club de son meilleur buteur, moi, aujourd’hui, j’apprends que Chita est gravement blessé… Sans parler des nombreuses blessures au sein de l’équipe, il n’est pas digne de cette responsabilité.

Suivant votre logique, on dira qu’Abdelwahab est soit incompétent, soit alors malhonnête…

Dans les deux cas, il ne mérite pas de bosser au MCA, ni nulle part ailleurs je crois.

Est-ce une trahison de la part du MCA que de le laisser en poste après ce qu’il vous a fait?

Je ne saurais répondre à cette question, demandez à Betrouni… Tout ce que je peux vous dire, c’est que ce médecin pourrait faire d’autres victimes que moi… Mais bon… Je crois que les joueurs ne lui font plus confiance, personne ne mettra sa vie ou son avenir entre les mains de ce type.

Ne regrettez-vous pas d’avoir menti lors de votre première déposition ? 

Je le regrette et je continuerai à le regretter chaque jour, chaque heure et chaque instant qui me restent à passer dans cette vie. J’ai commis deux erreurs dans ma vie. J’ai fait confiance deux fois à la même personne. Le D^r  Abdelwahab m’a trahi en me donnant son accord pour consommer ces vitamines et m’a enfoncé, enterré, détruit… Lorsqu’il m’a convaincu de mentir à la commission de discipline. Quand je pense à ça, je me dis que c’est peut-être de ma faute, que j’ai été naïf, trop même. Beaucoup de gens me l’ont reproché, certains m’ont presque convaincu que c’est le cas…mais je suis comme je suis…peut-être que la prochaine fois je réfléchirai mille fois avant d’accorder ma confiance à quelqu’un.

Restons sur la position du club et des supporters, pensez-vous que Betrouni aurait dû et pu faire plus, croyez-vous que les Chnaoua auraient pu changer la donne s’ils avaient manifesté leur mécontentement comme l’ont fait les Kabyles la saison passée après la suspension de la JSK ?  

Je me pose les mêmes questions. Je ne sais pas ce que le club et le président pouvaient faire pour moi, je ne sais pas non plus s’ils pouvaient faire plus, mais ce que je sais c’est que les supporters me soutiennent. Je les croise dans la rue et tous me témoignent leur solidarité. Pour ce qui est du Mouloudia en tant que structure, je dirais qu’humainement, ils ont été là à mes cotés, ils m’ont soutenu psychologiquement, sinon, ils n’ont rien fait pour moi.

Certains expliquent cette passivité de la direction par leur peur de voir d’autres joueurs du MCA suspendus pour dopage, on parle de 8 éléments qui consommeraient le même produit que vous, est-ce le cas ?

Je n’ai rien à dire à ce sujet, je me contente de parler de mon problème, ce que font les autres ne m’intéressent pas.

On va essayer de clore cet entretien sur une bonne note. Plus de deux mois que vous êtes suspendu et vous restez le buteur du MCA…

Oui, j’étais sur la bonne voie. Je pouvais terminer buteur, être sélectionné avec les locaux, ou jouer les JO, j’avais de grandes ambitions. Quand je suis venu au MCA, personne ne m’attendait, on attendait plus Abid et Derrardja… (il a les larmes aux yeux)… Vous vouliez terminer sur une bonne note, et bien ce n’est pas réussi…

Allez-y, dites ce que vous voulez alors…

Ok. Je dirais que Merzougui n’a jamais fumé une cigarette, jamais consommé de la chique, jamais bu d’alcool, Merzougui n’a jamais raté une séance d’entraînement, Merzougui est un bosseur qui a toujours travaillé dur pour arriver à des résultats. J’ajouterais que je n’ai jamais eu l’intention de tricher. Je faisais très attention, surtout après ce qui est arrivé à Belaïli. Je suis une victime dans cette histoire, le vrai coupable n’a pas été inquiété, il a gardé son poste comme médecin du MCA. Je finirais par remercier ma famille pour son soutien, mon agent Hamid Latrèche et surtout Demou qui a été un vrai homme dans cette affaire.