Raoul Savoy : « Le Maroc est en train de récolter le fruit de sa politique de formation »

Raoul Savoy, l’ancien coach du MCO et du MC Eulma, et actuel sélectionneur national de la République centrafricaine qu’on a joint au téléphone quelques instants avant son intervention sur le plateau d’une télévision suisse pour commenter le Mondial, connaît le football marocain pour avoir entraîné le MC Oujda il y a quelques années. Il estime que le Maroc récolte le fruit des réformes mises en place il y a quelques années par les responsables du football dans le royaume chérifien.

 

Etes-vous surpris de voir le Maroc se qualifier en demi-finale de la Coupe du monde ?

J’ai déclaré, dès les matchs du 1er tour, que parmi les sélections africaines, le Maroc a plus de chance d’aller loin dans cette compétition. Finalement, mes prévisions sont justes. Si le Maroc est arrivé à ce stade de la compétition, ce n’est pas dû au hasard. En effet, dans ce pays, on a mis en place des structures et créé notamment des académies. Rapidement, on a vu les résultats avec l’émergence des sélections de jeunes et les performances de clubs qui dominent le continent africain avec leurs homologues égyptiens. Par ailleurs, on a créé un contexte qui a permis aux binationaux hésitant entre jouer pour la sélection marocaine ou celles de Hollande, voire la Belgique (pays où de nombreux footballeurs d’origine marocaine sont formés, ndlr).

 

Et puis, quoi d’autres ?

La nomination de Walid Regragui a permis de récupérer les bannis. Il a aussi œuvré pour créer un bel état d’esprit dans son groupe. Dans cette Coupe du monde, on a remarqué que tous les joueurs tirent sur la même corde, c’est l’autre victoire de Regragui.

 

Mais faire partie du dernier carré, c’est fou comme exploit !

le Maroc a été, il ne faut pas le cacher, chanceux dans certains matchs. En outre, on a remarqué que les Belges, les Espagnols puis les Portugais les ont quelque peu sous-estimés. A la fin, ils l’ont appris à leurs dépens. Néanmoins, je ne pense pas que les Français, qui sont des compétiteurs, feront la même erreur.

 

Quelles sont les appréhensions alors ?

Il y a d’abord la fatigue émotionnelle, on craint aussi que des joueurs importants soient blessés. Déjà, il y a un joueur suspendu (Walid Cheddira). Franchement pour moi, le parcours du Maroc me rappelle celui de la Grèce à l’Euro 2004. Alors que personne ne misait sur cette dernière, elle a fini par remporter le trophée.

 

C’est le football maghrébin et africain qui est valorisé par ce parcours mirifique des Lions de l’Atlas…

Absolument, c’est quelque chose de magnifique ! En Afrique, on doit s’inspirer du modèle marocain en matière de formation. Par ailleurs, le parcours qu’ils sont en train de réaliser dans cette Coupe du monde aura des répercussions positives pour le football du continent.

 

C'est-à-dire…

Maintenant, les joueurs binationaux ne vont pas hésiter à venir jouer pour leurs pays d’origine. En tant que sélectionneur de la Centrafrique, je suis confronté à ce problème. On a des éléments binationaux qui évoluent en Europe, mais ils hésitent à venir défendre les couleurs de notre sélection.

 

Et pour l’Algérie, qu’est-ce que cela représente ?

En 2014 (Mondial du Brésil) et en 2019 avec le sacre à la CAN, l’Algérie était en avance. Toutefois, sans l’ombre d’un doute, l’Algérie, qui organise ces derniers temps de nombreuses compétitions, ne devrait pas tarder à rebondir. Sincèrement, la défaite contre le Cameroun ne va pas remettre tout en cause. D’ailleurs, ce n’était qu’un accident de parcours qui peut arriver à toutes les équipes. L’Algérie aurait mieux représenté l’Afrique que le Cameroun dans ce Mondial, c’est mon avis.

 

Ça risque de déplaire à votre fidèle adjoint Hans Agbo (ancien mondialiste avec le Cameroun en 1994)…

Non, lui aussi est de cet avis, l’Algérie a autant de talents. J’ai lu dans la presse que des binationaux viendront prochainement renforcer l’effectif des Fennecs. Evidemment, cela aidera l’équipe à retrouver son niveau.

  1. S.

 

Classement