Le Baresi du Mouloudia, en cette période de confinement lié au coronavirus, plonge dans ses souvenirs pour évoquer la Coupe d’Afrique qu’il a gagnée avec l’Algérie en 1990, son parcours avec le Mouloudia d’Alger. Il tient rancune aux politiciens qui ont, à ses yeux, saboté le MCA. Après les souvenirs, Tarek Lazizi revient sur le présent. En sa qualité de coordinateur, il revient sur l’effectif du MCA de cette saison. Il rassure les Chnaoua que s’il est dans la commission de recrutement, il fera tout pour que le Doyen n’accuse pas de flops. Lazizi, en confinement comme tous les Algériens, espère que le fléau sera endigué le plus tôt possible pour retrouver sa passion, le football.
Comment passez-vous vos journées suite à l’épidémie que frappe le pays ?
Sincèrement, je sors très rarement de chez moi sauf en cas de besoin. On n’a plus le choix, car cette maladie, ce n’est pas de la rigolade, c’est du sérieux. Je profite de cette occasion pour lancer un appel à tous les Algériens de rester chez eux pour protéger leur famille, car ce virus est contagieux et a touché tout le monde, pas seulement les personnes âgées.
Et sur le plan sportif ; que faites-vous pour entretenir la forme ?
J’ai 30 minutes de marche rapide chaque jour avec mon fils, qui est un joueur au Mouloudia. Pour ce qui est de la musculation, c’est mon fils qui le fait, alors que moi je me contente de la marche.
Que retenez-vous de votre longue carrière avec le Mouloudia ?
Le Mouloudia, c’est ma deuxième famille. J’ai connu tout dans ce club, les bons et les mauvais moments. Les bons moments, ce sont les titres que j’ai gagnés en tant que jeune et aussi le titre de champion de 1999, sans oublier la saison 1989 où nous avons failli gagner le titre avec une très jeune équipe.
En parlant de la saison 89, que s’est-il passé la dernière journée jusqu’à accuser la JSK d’avoir acheté le match d’Annaba ?
Avant de répondre à votre question, en 1989, le défunt Kermali avait décidé d’un changement radical dans l’équipe en montant des jeunes, beaucoup plus ceux des divisions inférieures. Personne ne croyait que nous allons rivaliser avec la JSK pour le titre. Mais, on avait une très bonne équipe qui méritait le titre.
Cependant, la dernière journée, Kermali avait déclaré que c’était le MCA le champion…
Après cette journée, beaucoup de choses ont été dites sur le match JSK-USMAn. J’ai entendu, comme tout le monde, cette rumeur que la JSK a acheté le match d’Annaba, surtout lorsque le joueur d’Annaba Chenini a jeté son maillot ; mais il y a aucune preuve. Il faut dire qu’au vu de la saison qu’on a réalisée, on méritait le titre.
C’était aussi un mauvais souvenir pour vous puisque vous avez contracté une grave blessure…
Effectivement, j’avais contacté une fracture qui m’a éloigné des terrains pendant plusieurs semaines, mais par la suite j’ai repris.
Même si vous n’avez pas gagné beaucoup de titres avec le Mouloudia, vous avez eu la chance d’être champion d’Afrique avec l’EN…
Pour moi, c’est le plus beau souvenir. J’avais que 18 ans quand j’ai brandi le trophée africain et j’ai eu la chance de jouer deux matchs contre l’Egypte et la Côte d’Ivoire. Franchement, jouer devant 100 000 supporters, ce n’est pas donné à tout le monde. Je l’ai connu seulement avec l’EN et le MCA. Le titre africain restera gravé à vie dans ma mémoire, car c’est le plus beau souvenir en EN.
Et vos buts avec l’EN ?
Pour moi, les plus beaux buts que j’ai marqués avec les Verts, c’était contre l’Iran chez eux ; ce qui nous a permis de gagner la coupe afro-asiatique. Le deuxième, c’était contre l’Afrique du Sud en quart de finale de la Coupe d’Afrique. Malheureusement, on a été éliminés.
Quel est le meilleur match de Lazzizi avec le Mouloudia ?
Au Mouloudia, j’ai réussi de bons matchs, que ce soit dans les derbies ou les Clasicos. Mais mon meilleur match, c’était celui de 1999 contre la JSK pour la finale du championnat, après 120 minutes de jeu. Ce qui nous a permis de gagner le titre que le MCA na pas gagné depuis 20 ans.
Et les derbies contre l’USMA ?
Je vais vous faire une confidence et vous pouvez même la vérifier. L’USMA ne m’a jamais battu durant toute ma carrière, sauf lors du match des demi-finales de la Coupe d’Algérie en 1999 ; et c’était aux tirs au but.
Lorsqu’on parle de l’USMA, le mauvais souvenir reste la blessure de Rahim quand tout le monde vous a accusé…
Je le répète encore une fois, ce n’est pas moi qui ai cassé Azzedine (Rahim). Je préfère ne pas parler de cette histoire, car je l’ai assez évoquée. Dieu merci, ce n’est pas moi qui ai arrêté la carrière d’Azzedine puisque après cette blessure, il a repris le foot.
Votre plus beau but avec le MCA ?
J’ai marqué beaucoup de buts avec le MCA, mais le plus beau reste contre Bordj Menaiel lors de la saison 1991. Ce n’est pas sur un geste technique, mais c’était le 1000e but du Mouloudia ; et nous avons gagné par 1 but à 0.
En tant que l’un des meilleurs défenseurs du pays, ne pensez-vous pas que vous auriez pu faire une meilleure carrière que de jouer dans un petit club en Tunisie et un autre en Turquie ?
En Tunisie, j’étais élu meilleur joueur étranger, mais je ne voulais pas rester. Après une saison, je suis rentré au pays. Je suis aussi parti tenter une expérience en Turquie ; après une bonne saison, j’ai décidé de revenir. Je ne vous cache pas que si je n’avais pas le problème de service militaire, j’aurais joué dans un grand club européen.
Lequel ?
Après la Coupe d’Afrique de 1990, j’ai été contacté par le FC Colonnes et l’Olympique de Marseille. Mais à cause du problème de service militaire, je ne pouvais pas quitter le pays. Pendant cinq ans, j’étais interdit de quitter le territoire.
Quel est l’attaquant qui vous a fait peur ?
Personne, aucun attaquant ne m’a fait peur, et pourtant il y en avait de grands comme Hadj Adlene, Mesabih, Rahim et Merakchi. Mais à chaque fois, je sortais de grands matchs contre les meilleurs attaquants du championnat.
Ça vous fait quoi d’avoir été urnommé Baresi ?
C’était un plaisir d’être comparé à ce grand joueur. Pour moi, Baresi et Maldini sont les meilleurs défenseurs que j’ai vus dans le football.
Et en Algérie ?
Sans hésiter, il y avait Adghigh et mon coéquipier Youcef Meziane. C’était les grands défenseurs de notre époque.
Pourquoi le Mouloudia n’a-t-il pas gagné beaucoup de titres surtout en championnat ?
Lorsque je suis monté en sénior, je n’avais que 17 ans. Le Mouloudia de la décennie noire a été saboté par les politiciens. A l’époque, on nous a dit que le Mouloudia ne gagnera aucun titre, et cela s’est confirmé sur les terrains où l’arbitrage nous a cassés. C’était une période très difficile qu’a vécue le pays et aussi le MCA.
Pour vous, quel est le meilleur défenseur axial passé par le MCA après vous ?
Il y n’y avait pas beaucoup, mais je dirai Bouacida Coulibaly et le meilleur de ces deux, c’était Ayoub Azzi. La bêtise des anciens dirigeants, c’est d’avoir libéré Azzi ; nous avons payé cash son départ puisque l’équipe a encaissé beaucoup de buts à travers l’axe.
Mais il y avait de bons joueurs comme Mebarakou, Merouani, Saila…
Azzi avait de l’expérience, c’était un vrai gagneur. Mebarakou a connu des moments très difficiles avec les supporters, ce qui a influé négativement son rendement. Avec Merouani, c’étaient de bons joueurs, mais ils manquaient d’expérience.
Comment expliquez-vous que des joueurs qui brillent meilleurs dans leurs clubs, une fois arrivés au Mouloudia, on a l’impression que ce ne sont plus les mêmes ?
Je vais vous dire une chose, au Mouloudia, il y a trop de pression, les supporters sont très exigeants. Ce n’est pas facile pour un joueur, qui n’est pas fort de caractère, de s’adapter à cet environnement. Pour jouer au Mouloudia, il faut être fort mentalement.
Sur papier, le MCA a le meilleur effectif, mais sur le terrain les supporters sont très déçus de la prestation de l’équipe…
En Algérie, toutes les équipes se valent. C’est le même niveau et aucune équipe n’est régulière dans ses résultats. Comme je vous ai déjà dit, il y a le Mouloudia et il y a les autres. Ce club a une forte pression, et je sais ce que je dis, sans oublier que ce club est saboté par les politiciens.
Pensez-vous que cette saison, le MCA gagnera le titre ?
Je ne peux prévoir l’avenir, mais je pense qu’on peut terminer sur le podium. Il nous reste 8 matchs à jouer dont un match retard. C’est un calendrier favorable par rapport à d’autres équipes. Donc, si l’on se donne à fond dans cette dernière ligne droite, on peut atteindre cet objectif.
Votre point de vue sur l’apport des joueurs étrangers ?
Dans tous les grands clubs, les étrangers font souvent la différence, mais en Algérie, on recrute n’importe quoi. Si je suis dans la commission de recrutement, on va recruter les meilleurs joueurs du championnat et les meilleurs étrangers.
Les techniciens sont unanimes à dire que les Maliens réussissent au Mouloudia…
C’est vrai que les Maliens ont réussi au MCA comme récemment Dieng, mais un bon joueur, quel que soit sa nationalité ou sa religion, peut réussir de grands matchs. On doit prendre l’exemple de nos voisins qui savent recruter les bons joueurs. Le meilleur exemple, c’est Eneramo qui parlait anglais, qui est chrétien, mais qui a réussi son passage à l’USMA.
Ne pensez-vous pas que pour gagner le CRB, il faut un renfort de qualité par des joueurs étrangers ?
Comme j’ai déjà dit, dans les grandes compétitions, c’est toujours les étrangers qui font la différence. Donc, si l’on jouera la C1, il faut des étrangers de qualité pour aller le plus loin possible dans cette compétition.
Avant de conclure, que voulez-vous ajouter ?
Je lance un appel aux Chnaoua de rester chez eux, car on a besoin d’eux. C’est le même message pour tous les Algériens.
- Z.