La CAN 2017 a été une véritable faillite pour l’équipe nationale. Sur le plan sportif, l’une des meilleures équipes africaines a terminé à la 10e place sur 16 participants.
Les camarades du capitaine conjoncturel, Aïssa Mandi, n’ont gagné aucun match, encaissant des buts à la pelle et la force offensive de l’EN a été anéantie par l’individualisme de ses attaquants. Certes, l’Algérie a inscrit 5 buts, mais c’était peu au vu du gros potentiel technique dont elle dispose. Sur le plan relationnel, les joueurs étaient très distants avec tout ce qui a un lien avec l’EN. Il y a eu même des frictions avec certains supporters qui se sont déplacés au Gabon pour soutenir les camarades de Ghoulam. Les fans estiment que les joueurs n’ont eu aucune considération envers eux. Sur le plan émotionnel, on sentait des joueurs soumis à une corvée en venant au Gabon pour disputer la CAN. Contrairement aux autres nations, l’équipe nationale dégageait une froideur et les joueurs n’avaient pas cette «grinta» et cette envie de gagner qui faisaient l’une des forces de l’équipe. Enfin, en matière de gestion de la vie du groupe, l’atmosphère était morose et il y a eu même cet épisode entre Slimani et Cadamuro qui prouve que les joueurs avaient du mal à vivre ensemble.
Ce sont deux joueurs du vestiaire
Il faut dire que l’absence d’un leader était la plus grosse erreur de choix de la part de l’ancien sélectionneur national, Georges Leekens. C’est vrai que ce dernier a été nommé le 27 octobre, seulement, soit deux mois avant l’entame de la compétition et il était difficile pour lui de préparer une CAN dans ces conditions-là. Cependant, il est aussi responsable, notamment dans ses choix et sa liste des 23. Le technicien belge avait-il pris seul la décision de se passer d’éléments d’expérience, à l’image de Sofiane Feghouli et Carl Medjani ? Il s’agissait du capitane et du vice-capitaine et ces deux hommes sont très importants dans le vestiaire algérien. Ainsi, c’est comme aller en bataille sans ses meneurs d’hommes et les joueurs qui font office de patrons sur et en dehors du terrain. Au-delà des résultats techniques, cela explique parfaitement le rendement et l’échec des Fennecs lors de ce tournoi. Cette élimination prématurée n’est au final que le résultat d’une crise qui couve depuis des mois. Tout le monde s’accorde à dire que l’équipe a manqué d’un homme capable de remobiliser ses camarades et leur inculquer la rage de vaincre qui a énormément fait défaut au groupe. La faillite est collective et individuelle, mais c’est aussi une équipe qui manque de caractère.
Le potentiel existe, il faut chercher le meneur
Le capitaine Aïssa Mandi, malgré tout son bon vouloir, semble très limite dans tout ce qu’il fait. Il ne donne pas l’impression de dominer son sujet et que l’équipe possède un capitaine sur le terrain. De ce fait, les responsables du football algérien doivent chercher cet homme qui mènera le groupe, à l’image de ce que fait Hervé Renard avec la sélection marocaine ou encore Aliou Cissé, le sélectionneur du Sénégal. Ensuite, récupérer des joueurs comme Feghouli, dont l’apport sur le terrain est très important. A un certain moment nous l’avions en sélection. En plus d’un coach à poigne, il y avait des joueurs comme Antar Yahia ou Madjid Bougherra qui faisaient le relais sur le terrain. Actuellement, l’équipe est en pleine crise, mais elle va devoir vite se relever pour tenter de se qualifier pour la Coupe du Monde 2018 en Russie. Le potentiel existe, et ça c’est déjà un immense acquis.
K. F.
Brahim Thiam : «C’est dommage qu’on n’ait pas pris Medjani»
L’ancien défenseur de la sélection malienne, Brahim Thiam, a estimé que l’absence d’un leader au sein du groupe a fissuré la solidarité du groupe. «L’Algérie avait besoin d’un leader sur et en dehors du terrain. Moi j’ai trouvé dommage de ne pas avoir pris un joueur comme Medjani. Il aurait été plus utile pour l’équipe et pour le groupe. Madjani aurait pu jouer dans l’axe et permettre à Mandi d’occuper le flanc droit de la défense. Cela aurait été une solution pour la défense algérienne. C’est du gâchis parce qu’il s’agit probablement de la meilleure génération sur le plan technique depuis celle des Belloumi. Avoir des joueurs c’est bien, mais avoir une équipe c’est mieux», nous a-t-il fait savoir.
K. F.
Xavier Domergue : «L’Algérie est allée à la CAN sans ses deux capitaines»
L’un des journalistes de beIN Sports France, présent à la CAN 2017, a affirmé que l’Algérie avait manqué d’un leader. «Je pense que la sélection algérienne avait besoin de joueurs du genre de Feghouli et Medjani. C’est un groupe très jeune, qui manque de cadres et d’un leader. Il n’y a pas de leader dans cette équipe. On a voulu confier les rênes à Guedioura, qui est respecté de tout le groupe, mais sur la pelouse il n’y avait pas de meneur d’hommes. Carl Medjani est un véritable leader, Sofiane Feghouli jouait moins en club, mais il a toujours affiché son amour pour le maillot de la sélection. L’Algérie avait perdu ses deux capitaines et perdre deux capitaines dans une compétition comme la CAN, c’est très dur», a-t-il indiqué à ce sujet. A propos de la prestation des Verts à la CAN, Domergue a indiqué qu’il y a un grand manque de stabilité au sein de cette équipe algérienne. C’est très difficile de travailler dans ces conditions. Pour lui, c’est du bricolage. «Il y a eu une grande déception surtout lorsqu’on regarde la qualité qui existe dans ce groupe d’Algérie. Individuellement, ces joueurs sont très forts, mais collectivement, cette équipe n’a pas l’homme qui leur permet de jouer ensemble. Ce que fait le Burkina-Faso devrait être un exemple. Le Maroc le fait avec Hervé Renard», a-t-il souligné. Concernant le rendement de Riyad Mahrez lors de cette CAN, le journaliste de beIN Sports a affirmé que le joueur n’a pas été à la hauteur. «Le premier match a fait beaucoup de mal à l’Algérie et ce qui me choque le plus c’est ce manque d’investissement de la part des joueurs. En abordant une compétition comme la CAN, il faudrait avoir une grande motivation, une grande part d’envie et c’est 80% du travail qui se réalise déjà. Mahrez a du talent, tout le monde le sait, mais on le voit travailler différemment à Leicester City. Défensivement, il n’a pas fait les efforts nécessaires», nous a-t-il déclaré.
K. F.
Charles Kaboré : «Feghouli aurait été d’un grand apport pour l’équipe algérienne»
Il est le patron de la sélection burkinabè. Il est le capitaine des Etalons et il participe à sa cinquième CAN malgré le fait qu’il n’a toujours pas bouclé ses 30 ans (il n’a que 28). Nous lui avons posé la question concernant les absences de Feghouli et Medjani, l’ancien Marseillais a affirmé que «Feghouli est un très bon joueur. Il a un temps assez moyen à Westham à un certain moment. C’est un joueur important pour l’équipe d’Algérie, mais le dernier mot est revenu au coach, qui a décidé de ne pas le prendre. Une chose est sûre, Feghouli aurait été d’un grand apport pour l’équipe algérienne», a-t-il souligné. Pour Kaboré, «l’Algérie est une très grande équipe et possède de très grands joueurs. Elle est éliminée dès le premier tour pour certains c’est une surprise, mais la Coupe d’Afrique est une autre compétition. Le mot favori peut se dire sur papier, mais la réalité du terrain est toute autre. Cette dernière va rebondir, j’en suis sûr. Dans deux ans vous allez voir un autre visage de l’équipe algérienne», a-t-il fait savoir.
K. F.
Paulo Duarte : «L’Algérie a besoin d’un leader»
Le sélectionneur du Burkina-Faso, demi-finaliste de la CAN 2017, a parlé du rôle important que représente un leader dans une équipe de football. «L’Algérie possède de grands joueurs, qui sont ensemble depuis trois ans, mais ils doivent comprendre qu’il doivent se fondre dans le groupe et travailler pour le bien de l’équipe. Cette équipe doit avoir un leader sur le terrain et les joueurs qui doivent respecter les décisions du coach. Dans le cas contraire, il ne devrait pas avoir sa place dans ce groupe. Je pense que nous avons remarqué que certains joueurs n’ont pas apprécié leur statut et c’est l’un des raisons du faible rendement de l’équipe algérienne dans cette CAN», nous a-t-il fait savoir.
K. F.
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Brahim Thiam : «L’Algérie CAN 2017, c’est du gâchis»
- «L’Algérie n’a montré pas que c’est une équipe qui voulait se qualifier»
- «Medjani aurait été plus utile pour l’équipe et pour le groupe»
- «Ce n’est pas le Mahrez que nous voyons chaque semaine avec Leicester. Ce n’est pas de ce Mahrez qu’a besoin l’Algérie»
Il avait participé à la CAN 2004 où il avait terminé 4e avec le Mali. L’ancien défenseur des Aigles a accepté de nous répondre sur cette CNA 2017, mais aussi sur le rendement de la sélection nationale. Il a estimé qu’au vu de son potentiel, c’était un véritable gâchis.
Burkina Faso en demi-finale, c’est l’image que reflète cette CAN 2017 ?
J’ai vu presque tous les matches, je peux dire qu’il y a des confirmations et des déceptions. Maintenant, nous sommes arrivés aux matches à enjeux. Aujourd’hui, j’ai pensé que cela allait être plus équilibré, mais les Tunisiens ont tout simplement été out en deuxième mi-temps. Ce n’était pas suffisant pour espérer se qualifier. Pour le Burkina Faso c’est une bonne chose. C’est un pays limitrophe du Mali et en tant que Malien, je ne devais qu’être content pour eux. C’est un sentiment de fierté pour l’Afrique de l’Ouest parce qu’à la base ce ne sont pas les nations favorites. Les Burkinabè ont bien travaillé, les joueurs sont solidaires et ils ont récolté le fruit de leur travail. C’est bien pour le peuple qui vit une joie immense en ce moment, j’en suis sûr.
Comment évaluez-vous le niveau de la compétition jusqu’à maintenant ?
Il est très intéressant. Nous avons vu des équipes comme l’Ouganda et le Zimbabwe réussir de belles choses. Regardez ce soir Burkina Tunisie, qui aurait dit que la Tunisie allait être éliminée. Toutes les équipes progressent et postulent pour être dans le dernier carré.
Et qu’on est-il de l’équipe d’Algérie. Comment l’avez-vous trouvée ?
Sur le potentiel, il y a tout ce qu’il faut pour l’équipe d’Algérie. Dans le football, avant de se vanter de ses qualités, il va falloir faire valoir son cœur et sa tête. Aujourd’hui nous avons l’exemple, le Burkina Faso qui est moins talentueux, mais qui a montré qu’il faudra d’abord se battre et penser ensuite faire la différence. L’Algérie c’est du gâchis dans cette CAN parce que chaque joueur tirait de son côté. Il n’y avait pas de collectif ni d’union. C’était à l’image de ce qui s’était passé lors des deux derniers mois avec les changements d’entraîneurs. On ne prépare pas une compétition comme la CAN trois semaines.
Etes-vous surpris par son élimination dès le premier tour ?
Pas du tout. A aucun moment l’Algérie n’a montré que c’est une équipe qui voulait se qualifier. Même contre le Zimbabwe, son retour était presque miraculeux et personne n’aurait crié au scandale si elle avait perdu.
L’absence d’un leader au sein du groupe, à l’image d’un Feghouli, a probablement fissuré la solidarité du groupe, n’est-ce pas ?
Oui probablement. L’Algérie avait besoin d’un leader sur et en dehors du terrain. Moi j’ai trouvé dommage de ne pas avoir pris un joueur comme Medjani. Il aurait été plus utile pour l’équipe et pour le groupe. Madjani aurait pu jouer dans l’axe et permettre à Mandi d’occuper le flanc droit de la défense. Cela aurait été une solution pour la défense algérienne. C’est du gâchis parce qu’il s’agit probablement de la meilleure génération sur le plan technique depuis celle des Belloumi. Avoir des joueurs c’est bien, mais avoir une équipe c’est mieux.
Mahrez est arrivé au Gabon avec le titre de meilleur footballeur africain, comment avez-vous trouvé son rendement ?
Ce n’est pas le Mahrez que nous voyons chaque semaine en Premier League avec Leicester City. Ce n’est pas de ce Mahrez qu’a besoin l’Algérie. Il doit travailler pour l’équipe nationale comme il le fait en club. Je me rappelle lors du premier match face au Zimbabwe, l’arrière droit (Belkhiter) a été grillé parce que Mahrez n’a pas fait son travail défensif. Il ne faut pas seulement attaquer sans revenir donner main-forte à son arrière-garde, ce n’est pas possible.
Quel est le favori, selon vous, pour le sacre final ?
Le Burkina a montré aujourd’hui de très belles choses. Elle peut aller en finale. Le Sénégal est une valeur sûre (interview réalisée avant l’élimination des Lions de la Téranga face au Cameroun) et le Maroc, ce sont de potentiels vainqueurs.
D’autres nations ont également raté leur CAN…
La Côte d’Ivoire n’avait pas le droit de se rater car elle possède le potentiel qui lui permet d’aller en finale. Elle a joué en marchant. Le Mali c’est différent puisqu’il y a moins de qualité dans l’effectif. Je pense qu’on n’a pas mis les bons hommes au bon moment et au bon endroit. Le Mali a une équipe moins talentueuse, il faut savoir l’optimiser par les qualités des uns et la complémentarité des autres. Maintenant, il faut analyser ce qui n’a pas marché, tirer les conséquences, faire le vrai bilan, et à partir de là, trouver les bons pansements pour soigner les blessures.
K. F.