L’ancien international, qui fait fonction d’entraîneur au MCO cette saison, est d’accord avec le sélectionneur national quant à sa décision de changer quantitativement et qualitativement l’effectif de l’EN. Il explique pourquoi.
Quand vous étiez joueur international, vous étiez témoin de l’arrivée de plusieurs binationaux au début des années 2000, comment la transition s’est-elle faite ?
Elle s’est faite le plus normalement du monde, on était même content de leur apport malgré que, à cette époque dans le championnat national, il y avait des joueurs de qualité. Mais quand Benarbia, Belmadi, Mansouri ou Antar Yahia ont rejoint les rangs de la sélection, on était conscient qu’avec de tels joueurs de qualité, l’EN progresserait. Certes, il a fallu du temps pour récolter le fruit de cette politique qui consistait à monter une ossature avec de nombreux binationaux.
Contrairement à aujourd’hui, pendant cette période, le championnat national produisait des talents…
En effet, Dziri ou Achiou et tant d’autres ont marqué leur passage en sélection nationale, ça personne ne peut le nier quand même. Tout récemment, des joueurs tels que Belaili, Benayada ou Amoura sont parvenus à faire leur trou dans une sélection nationale composée majoritairement de joueurs évoluant dans de grands clubs européens.
Mais c’est peu pour un pays comme l’Algérie qui peut produire avec une bonne gestion des talents à la pelle…
Le problème de la génération de joueurs qui évoluent actuellement dans notre championnat, ils ne songent qu’à leurs intérêts financiers. Certes, cela est légitime car tout travail mérite salaire, néanmoins un joueur doit être aussi ambitieux en se fixant l’objectif de jouer en équipe nationale dès qu’il est lancé dans le bain en senior. Moi, quand j’ai commencé ma carrière, j’étais obsédé par l’ambition de porter le maillot national. J’ai réalisé ce rêve en participant à des rendez-vous importants avec l’EN. Cela marque la carrière d’un joueur (il a joué 3 CAN 2000, 2002 et 2004, ndlr). Il ne faut jamais dire que l’EN est un rêve inaccessible, il faut bosser durement et être sérieux hors du terrain. Aujourd’hui, si nous souffrons d’un déficit au niveau local, c’est parce que les joueurs actuels négligent la récupération et beaucoup d’autres facteurs comme la nutrition… On ne devient pas un grand joueur comme ça facilement, à part si on est doué dès la naissance.
Pendant votre carrière de joueur, vous avez joué en sélection comme arrière gauche, mais aussi du temps de Nasser Sandjak comme milieu récupérateur gauche, soit le rôle qu’assure Rayan Ait Nouri avec son club Wolverhampton. Un élément qui va renforcer les rangs de l’EN prochainement…
Effectivement, à la CAN 2000, Nasser Sandjak m’a aligné comme milieu gauche. J’estime avoir fait de mon mieux pour assumer cette tâche. Avoir des éléments polyvalents permet au coach national d’élaborer plusieurs schémas tactiques. Pour Ait Nouri, j’ai vu qu’il a des qualités en plus de son jeune âge (21 ans) ; il peut constituer un bon renfort pour l’EN. Je veux ajouter autre chose.
Allez-y…
Après la suspension de Ramy Bensebaini pour le match des barrages contre le Cameroun, on s’est retrouvé sans un véritable arrière gauche. Mais avec la venue d’Ait Nouri, le coach national peut l’utiliser dans ce poste d’arrière gauche. Même quand Bensebaini est présent, ce dernier peut évoluer dans l’axe comme stoppeur gauche, voire un cran au-dessus en sentinelle. Ce qui permet à Djamel Belmadi d’avoir plus de solutions de rechange.
Dans cette perspective, Belmadi entend battre le rappel des binationaux dès le printemps prochain, serez-vous d’accord avec lui ?
Il suffit de voir les noms des binationaux qui sont annoncés comme renforts, on a plus d’optimisme. Cela va créer en outre une rude concurrence. Franchement, j’approuve à fond cette nouvelle politique de rajeunissement prônée par Djamel Belmadi. Il y a des joueurs qui sont en fin de cycle, on leur sera toujours reconnaissant d’avoir donné de la joie au peuple algérien en 2019, mais le temps est venu pour eux de passer le témoin à d’autres qui sont plus jeunes. Belmadi n’a pas décidé sur un coup de tête de songer à changer l’effectif. Afin de bien représenter l’Algérie à la CAN 2024 et la Coupe du monde 2026, il est obligé d’insuffler un sang neuf à cette sélection. Je pense qu’il l’a bien compris. Je précise que ce n'est pas une forme d’ingratitude envers des joueurs qui ont rendu à l’Algérie sa fierté, mais quand on est sélectionneur national, on ne peut pas faire des choix complaisants. On sait que vu les liens qui unissent Belmadi à ses joueurs, se passer d’eux sera une décision douloureuse. Toutefois, il ne peut servir de bouclier aussi, surtout après les récentes contre-performances de l’EN dont des joueurs sont responsables car tout simplement ils n’arrivent pas à fournir le même rendement qu’auparavant.
Des voix se sont élevées pour réclamer le départ de Belmadi, pour vous, ont-elles raison ?
On n’est pas dupes, ces personnes qui réclament sa tête ont des comptes personnels à régler avec Belmadi. Pour l’avoir côtoyé (ils ont joué ensemble en EN), Djamel est quelqu’un de franc qui dit les choses en face. Chez nous, on n’aime pas les gens sincères, on préfère les hypocrites, voilà ! Arrêtons avec les critiques destructives ! Belmadi s’est fixé des objectifs, laissez-le travailler dans la sérénité afin de les atteindre ! Après, on fera les bilans.
- S.