C’est un Sabri Lamouchi, professionnel et courtois, qui a accepté de répondre à nos questions, hier matin, aux alentours de midi. Un Sabri Lamouchi, sélectionneur de la Côte d’Ivoire, qui était déjà dans la CAN 2013 et déjà dans ses trois matches de poule face au Togo, à la Tunisie, puis à l’Algérie, et qui n’a pas voulu trop se livrer, malgré tous nos efforts. Nous vous proposons, chers lecteurs, de connaître l’opinion du sélectionneur national des Eléphants de la Côte d’Ivoire, trois jours seulement après le tirage au sort de Durban, celui qui a placé la Côte d’Ivoire et l’Algérie dans le groupe de la mort.
- En devenant sélectionneur des Eléphants de la Côte d’Ivoire, vous n’avez pas eu de période d’adaptation en entrant directement dans le vif du sujet avec cette double confrontation face au Sénégal. Peut-on revenir sur ces deux matchs difficiles ? Comment les avez-vous vécus ?
- Ces deux matchs face à l’équipe du Sénégal ont été certes très difficiles, mais l’avantage, c’est que nous nous y attendions, connaissant la valeur des joueurs qui composaient l’équipe adverse. Dès que nous avons pris connaissance de notre adversaire pour ce troisième et dernier tour des éliminatoires de la CAN 2013, c\'est-à-dire au lendemain du tirage au sort, nous nous sommes mis, avec mon staff, à préparer ce match avec minutie et professionnalisme pour être sûrs de ne rien laisser au hasard. Nous avons établi une tactique et nous avons réussi à passer grâce notamment au match aller où nous avions fait ce qu’il fallait. Il ne restait plus qu’à continuer sur notre lancée lors du match retour, ce que nous avons d’ailleurs fait en dominant ce match, même s’il n’a pu aller à son terme.
- Justement, aviez-vous prévu les évènements qui allaient se passer au stade de Dakar ? Si oui, aviez-vous pris le soin de briefer vos joueurs avant la rencontre ?
- Honnêtement, il aurait fallu être médium ou bien marabout pour prévoir ce qui allait se passer, tant c’était incroyable. Encore plus incroyable que cela se passe au Sénégal, un pays qui n’est pas connu pour ce genre de comportement. Je m’attendais, certes, à des évènements ou des échauffourées comme il s’en produit souvent dans les stades, surtout quand le match est à enjeu et que l’équipe qui reçoit est éliminée, mais personne n’avait prévu cela. Pour qu’un match international soit interrompu, c’est que ce qu’il y a eu ce soir là était d’une gravité extrême. Non, je n’avais pas prévu ça.
- Comment se sent Sabri Lamouchi à la tête de la sélection des Eléphants de la Côte d’Ivoire et plus généralement dans ce pays ?
- Cela n’a pas d’importance comment se sent Sabri Lamouchi, l’important est de rendre par mon travail la confiance que m’a accordé M. Diallo, président de la Fédération ivoirienne de football, en me faisant l’honneur de me confier cette valeureuse équipe nationale. Cette équipe qui est la première équipe du continent et qui court après un sacre africain depuis vingt ans maintenant. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour réussir avec cette équipe.
- Justement, cette équipe composée de très grands joueurs semble maudite, puisqu’elle court pratiquement depuis six ans après le titre de champion d’Afrique qui semble la fuir. Sabri Lamouchi va-t-il réussir à ramener la CAN-2013 à Abidjan ?
- Je ne sais quoi répondre à cette question. Si je réponds oui, nous venons gagner la CAN, vous allez ensuite écrire que je suis fou, vu le groupe de la mort dans lequel nous sommes tombés. Si je vous dis que nous ne venons pas pour gagner la CAN, mais faire une participation honnête, vous allez écrire que je suis fou de ne pas essayer de la gagner avec l’effectif dont je dispose. Moi, j’ai prévenu dès mon arrivée en Côte d’Ivoire que je n’étais pas l’homme providentiel qui allait ramener la CAN in the pocket. Je dispose d’un groupe de joueurs de qualité et de joueurs expérimentés.
- Mais il est clair que votre objectif sera la remporter cette coupe d’Afrique ?
- Joueurs et staff, nous avons le même objectif, monter haut le drapeau et le football ivoirien en gagnant des titres. Nous sommes conscients de la tâche qui nous incombe et nous nous sommes déjà mis au travail. Nous ferons tout pour gagner cette CAN, comme les 15 autres équipes qui y participeront, mais vu la poule D dans laquelle nous sommes tombés, la poule de la mort comme disent certains de vos confrères, nous avons comme premier objectif de sortir de cette poule, passer au second tour et ensuite tout deviendra possible.
- Puisque nous parlons de ce groupe composé de la Côte d’Ivoire, de la Tunisie, de l’Algérie puis du Togo, le tirage étant passé depuis trois jours maintenant, quelles analyses à froid en faite-vous ?
- Comme je vous l’ai dit dans la question précédente, c’est une poule très difficile et il va falloir batailler pour passer au second tour. La Tunisie est une équipe bien en place et talentueuse, elle l’a prouvé depuis la dernière CAN. L’Algérie est une équipe de haut niveau et le Togo était il y a peu mondialiste et renferme de bonnes individualités. Mais comme je vous l’ai dit, même si pour nous, ce seront des matchs difficiles à gérer, pour eux aussi ça sera difficile d’affronter la Côte d’Ivoire.
- Il ne vous a pas échappé que dans ce groupe se trouve la Tunisie, votre pays d’origine. Ce match Côte d’Ivoire-Tunisie aura une saveur particulière, j’imagine ?
- Oui, une saveur très particulière, car c’est mon pays d’origine. Mais il s’agira de faire abstraction de tout cela et de préparer ce match le mieux possible pour permettre à l’équipe que j’entraîne, à savoir la Côte d’Ivoire, de l’emporter dans le fair-play.
- Compétition étant un quotidien sportif algérien, le match Algérie- Côte d’Ivoire nous intéresse particulièrement et au plus haut point. Connaissez-vous cette équipe d’Algérie ? L’avez-vous vu jouer ?
- Je connais l’équipe d’Algérie. Je l’ai vu jouer notamment contre la Libye, c’est une équipe bien en place qui sait jouer au football. En plus, je connais très bien son entraîneur qui, même s’il ne cesse de répéter à qui veut l’entendre qu’il laisse la première place de la poule à la Côte d’Ivoire et qu’il disputera la seconde place qualificative avec la Tunisie, ne vise en fait que la première place de ce groupe. Nous le savons et nous nous préparerons en conséquence.
- Depuis la CAN-2010 et ce fameux quart de finale qui avait été élu «match de l’année» par la FIFA, et surtout depuis que Vahid Halilhodzic qui entraînait les Eléphants soit devenu le coach des Fennecs, y aura-t-il une saveur particulière lors de ce match ?
- Honnêtement, c’est le travail des historiens du football de dire si un match restera dans les annales ou sera historique ou pas. Pour ma part, il s’agira d’un match comme les autres face à une valeureuse équipe d’Algérie, entraînée par un bon entraîneur, Vahid Halilhodzic. Un match que je préparerai pour essayer de le gagner. Rien de plus.
- Un dernier mot. Après le tirage, avez-vous reçu un message de votre ancien coéquipier de l’AJ Auxerre, Moussa Saïb ?
- Et bien, je vous répondrais qu’au cours de ma longue carrière, j’ai joué avec beaucoup de joueurs algériens, dont le plus prestigieux et le plus talentueux fut Moussa Saïb. Manque de chance pour vous, après le tirage, j’ai reçu énormément de SMS d’amis algériens, joueurs ou non d’ailleurs, mais pas de Moussa Saïb. S’il m’envoie un message, vous serez le premier que je mettrai au courant (rire).
M. B.