Cest le lendemain de la rencontre face à la Real Sociedad que Sofiane Feghouli nous a accordé cet entretien à Valence. Malgré le climat très hostile suite au limogeage de Pelligrino, le milieu de terrain des Verts a bien voulu répondre à nos questions. Sofiane Feghouli devenu une pièce maîtresse incontournable au FC Valence nous parle de son nouveau statut de star. Il évoque bien évidemment léquipe nationale et la Coupe dAfrique des nations.
- Avant tout, merci d’avoir accepté de nous accorder cette interview. Quand on fait la une de plusieurs journaux As, Marca, Super Deportes en Espagne, un grand pays de football durant plusieurs semaines, comment on vit cela à votre âge (23 ans) ?
- Il est évident que ça fait toujours plaisir d’être cité dans les journaux, c’est que quelque part je fais bien mon travail. C’est quelque chose que je vis très bien, et grâce à ma maman qui m’a donné une très bonne éducation, ça ne me pose aucun problème.
- En fait, vous êtes devenu une star à Valence ?
- La notoriété fait partie du football. C’est le sport le plus connu mondialement, et il faut faire avec. Si tu veux grandir et devenir un grand joueur, tu dois faire avec la pression des médias, des supporters et des résultats surtout.
- En fait, ces derniers mois, cela est allé très vite pour vous. Vous êtes passé du statut d’un joueur inconnu vers un élément devenu indispensable dans l’échiquier de Valence ?
- Je suis arrivé de Grenoble, un petit club de première division française. La première année pour moi, c’était surtout une année d’adaptation et je ne voulais pas enchaîner une seconde année sans jouer, car avant d’arriver à Valence, j’étais pratiquement blessé pendant un an (une double opération du ménisque), et donc je suis parti en prêt à Almeria et je suis revenu de nouveau à Valence. Petit à petit, j’ai gagné ma place. Avec le travail et le sérieux, tout se passe bien pour moi…
- Emerey a joué quand même un grand rôle, puisque c’est lui qui vous a fait confiance ?
- Je dirai qu’il m’a donné l’opportunité de jouer comme il a donné la chance à d’autres éléments aussi. Je me suis dis qu’il fallait que je saisisse ma chance, et depuis le premier match, je n’ai pas quitté l’équipe jusqu’à aujourd’hui. Le plus dur, c’est de confirmer. Je savais pertinemment que j’étais attendu au tournant cette saison, à savoir si j’allais confirmer ou non. Pour le moment, je suis satisfait de mon rendement. J’ai beaucoup d’ambitions et d’objectifs personnels et je souhaite réaliser de grandes choses cette année.
- Même avec le départ d’Emerey et l’arrivé de Pelligrino l’été dernier, vous n’avez pas perdu votre place de titulaire ?
- Quand le club a décidé de donner la chance à un nouvel entraîneur, j’ai tout simplement continué sur la même lancée avec le travail et le sérieux et enchaîner les performances en donnant le maximum comme d’habitude. Donc, ce changement, ce n’est pas du tout quelque chose qui m’a dérangé, car en tant que joueur, je dois faire avec les aléas.
- Revenons juste sur votre dernière année à Grenoble. Une blessure assez grave, un incident avec un supporter et surtout une presse française qui ne vous avez pas épargné à ce moment-là. Comment avez-vous vécu tout cela ?
- Je dirai qu’une carrière ne se construit pas sur du coton comme on dit, il faut passer par des épreuves. Moi, j’ai eu des blessures à répétition, certains ont eu des impayés, d’autres se sont retrouvés dans des clubs de bas niveau. Moi, mon parcours a été celui-ci et j’ai toujours cru en moi et en mon travail. Je savais que tôt ou tard avec de la patience, ça allait tourner en ma faveur. Mais je dois dire que j’ai beaucoup appris de mon expérience à Grenoble et j’en garde le positif de ces années-là et je m’appuis là dessus pour être le meilleur possible.
- Mais les médias français n’ont pas été très tendres avec vous à l’époque ?
- Il y a beaucoup de choses qui ont été dites, mais je ne vais pas rentrer dans les détails. Comme je vous l’ai dit, j’en garde quand même de bons souvenirs, c’était mon club formateur à qui je souhaite un retour en première division.
- Le fait que les dirigeants de Grenoble n’aient pas voulu prolonger votre contrat constituait pour vous un défi supplémentaire ?
- Personnellement, j’étais content de mes deux premières saisons à Grenoble où j’avais joué beaucoup de matchs en donnant le maximum sur le terrain. J’avais une situation contractuelle qui posait problème, car j’avais souhaité une prolongation de mon contrat, mais le club avait refusé. Après, j’étais dans une situation favorable (fin de contrat) en ayant beaucoup d’opportunités. Parmi elles, Valence qui me suivait depuis longtemps…
- Comment s’est justement fait votre choix sur Valence ?
- En fait, Valence m’avait invité à assister au match qui les avait mis aux prises avec le Real de Madrid à Mestalla. Ce soir-là, Valence avait gagné sur le score de 3 à 0 et c’est là que j’avais décidé de jouer à Valence.
- Votre grande force cette saison, c’est votre condition physique, comment faites-vous pour enchaîner les matchs tous les 3 jours avec le même rythme ?
- Comme vous venez de le dire, à Valence, nous avons des matchs tous les 3 jours et on se doit d’être performants lors de chaque match. Et pour cela, on se doit d’avoir une hygiène de vie exemplaire et irréprochable au niveau de l’état d’esprit. Personnellement, je fais très attention à tout ça, car je sais que c’est primordial pour éviter les pépins musculaires et les ennuis. En fait, c’est ça la clé pour être au top physiquement.
- Et par rapport à votre positionnement dans le jeu, vous jouez à droite, ce qui n’était pas vraiment le cas à Grenoble ?
- Il est vrai qu’à Grenoble, j’avais un rôle différent, à savoir de plus rentrer dans l’axe et moins jouer en profondeur, alors qu’à Valence, je suis plus ailier.
- Avec surtout une mission défensive très importante. Ne pensez-vous pas que si vous ne défendiez pas autant, vous pourriez faire des merveilles devant ?
- Dans le haut niveau, il faut être complet, car il faut aussi bien défendre qu’attaquer et au même rythme. Moi, je suis quelqu’un qui est généreux dans les efforts. En fait, c’est un peu spécial de répondre à cette question, à savoir si je gardais mes forces pour attaquer.
- La question ne concerne pas particulièrement le FC Valence, mais d’une façon générale…
- Moi, je joue où on me demande de le faire. Peut-être que dans une autre position, je pourrais donner davantage de passes à mes coéquipiers ou même marquer plus de buts si j’étais derrière l’attaquant, c’est possible, car c’est un poste que je connais très bien et pour lequel j’ai été formé. Mais bon, aujourd’hui, je joue sur le côté et j’essaye de donner le meilleur de moi-même.
- Comment expliquez-vous qu’on ne retrouve pas le Feghouli étincelant de Valence en équipe nationale ?
- D’abord, en sélection, nous n’avons pas beaucoup de temps pour travailler ensemble et, de ce fait, on ne se connaît pas vraiment, même si on essaye de faire de notre mieux pour trouver les automatismes en se parlant beaucoup durant la semaine. Il est vrai que j’ai plus d’automatismes avec un Soldado qu’avec mes coéquipiers de l’EN, car je sais la course qu’il va faire et ça m’avantage, tandis qu’en sélection, il me faut une demie seconde de plus pour réfléchir, et c’est ce qui fait la différence. Mais je crois que dans un futur proche, on ne se retrouvera pas les yeux fermés, mais presque, à force de jouer ensemble.
- Le fait de faire 3 semaines de préparation avant la CAN vous servira-t-il beaucoup ?
- Déjà le mois que nous avions passé cet été en Algérie, ça nous avait aidés. Il est clair que rester ensemble pendant une longue période nous servira énormément quant à trouver une cohésion et nos automatismes dans le jeu. Maintenant, le plus important, c’est que l’Algérie gagne. Il est clair que je ne jouerais jamais en équipe nationale comme je joue à Valence et vice-versa. Pour moi, le principal, c’est que l’équipe confirme et atteigne ses objectifs.
- On croit savoir que les dirigeants de Valence feront une demande afin d’obtenir une autorisation pour vous garder jusqu’au 10 janvier ?
- Vous me l’apprenez, car je ne suis pas au courant. Mais comme je l’ai dit ici, tous les matchs sont importants. Maintenant, je ne sais pas ce qu’il en est par rapport à ça. Mais je pense que Valence a un groupe homogène avec de la qualité et qu’on pourra me remplacer. Maintenant, la CAN pose problème pour beaucoup de clubs le fait qu’elle se déroule au mois de janvier, mais bon.
- Deux matchs de préparation avant la CAN, d’après-vous, sont-ils suffisants ?
- Je pense faire une bonne coupe d’Afrique passe forcément par une bonne préparation, car il ne faudra rien laisser au hasard. Donc, si le coach a décidé de jouer deux matchs amicaux, c’est qu’il a bien réfléchi en prenant en compte plusieurs choses. En tout cas, on va se préparer avec le même état d’esprit qui nous a animés lors de nos derniers matchs et je suis sûr qu’on répondra présent le jour J.
- Le grand avantage de cette CAN, c’est que le climat est assez doux, même si ça sera l’été en Afrique du Sud…
- Le problème en Afrique, c’est de jouer en plein après-midi sous la canicule et ce n’est pas évident. Donc, si on bénéficie de meilleures conditions, ça avantagera tout le monde et pas seulement l’Algérie. Ça sera certainement une meilleure compétition. Il est clair que je préfère jouer à 20° plutôt qu’à 35°.
- Avec vos belles performances actuellement, vous auriez certainement été sélectionnable en équipe de France, ça vous a déjà traversé l’esprit ?
- Personnellement, ça ne m’a jamais traversé l’esprit et je n’y ai jamais pensé, même si on m’a posé la question plusieurs fois. Ce n’est pas une chose que je me suis imaginée. Moi, à partir du moment où je suis sur le terrain et que l’hymne national retentisse, je vois tout le pays et tout le stade qui chante, j’ai des frissons. En fait, je payerai de ma poche pour venir jouer en sélection, car c’est avec un grand plaisir que je viens jouer en sélection. Ajouter à cela que nous pouvons nous vanter que nous sommes l’un des rares pays au monde où il y a un tel engouement. Pour nous, c’est fantastique, car ça nous donne une force incroyable sur le terrain et je les remercie pour tout ce qu’ils font pour nous et on fait de notre mieux pour mouiller le maillot du mieux qu’on peut. D’ailleurs, nous sommes ambitieux et nous voulons absolument faire quelque chose en Coupe d’Afrique pour les rendre heureux.
- Vous pensez vous rendre en Algérie en dehors des matches de l’EN ?
- Tout à fait. J’ai plein de projets personnels en Algérie avec ma famille. Ça m’arrive de vouloir y retourner, mais avec mon emploi du temps, c’est très difficile. Mais cet été, j’aurais plus de vacances et je compte y aller pour changer d’air et pour récupérer.
- Vous avez évoqué que vous avez plein d’ambitions et beaucoup d’objectifs personnels, pouvons-nous les connaître ?
- D’abord, pour moi, la CAN, si je la joue, c’est pour aller en finale. J’ai confiance en mes partenaires, même si notre groupe me paraît relevé, je suis persuadé qu’on répondra présent.
- Concrètement, quelles sont les chances des Verts lors de cette CAN ?
- A l’heure d’aujourd’hui, c’est difficile de dire qu’on fera telle ou telle chose. Ça sera certainement un groupe très serré. La Côte d’Ivoire est composée de joueurs qui jouent ensemble depuis pas mal d’années, pareil pour la Tunisie qui s’appuie sur beaucoup de locaux et les Togolais qui auront à cœur de prendre leur revanche après ce qui leur est arrivé à Cabinda.
- La tâche des Verts s’annonce un peu compliquée avec les nombreuses blessures ?
- C’est sûr que les blessures de beaucoup de nos joueurs nous handicapent pour préparer cette Coupe d’Afrique. Maintenant, je pense que tous ceux qui ont joué lors de ces derniers mois ont prouvé qu’ils avaient leurs places en sélection. Le coach leur a donné leurs chances et ils ont su répondre présent. Donc, je suis certain que ceux qui composeront la liste des 23 donneront le meilleur d’eux-mêmes, tout en espérant qu’on récupérera tous nos blessés.
- Il y a quand même de bonnes nouvelles avec Halliche et Mesbah qui ont rejoué ?
- Nous avons besoin de Djamel, Rafik et Madjid qui ont de d’expérience. Moi, je ne suis pas inquiet plus que ça, car malgré les absents, nous avons toujours répondu présent avec Essaïd (Belkalem) qui a été extraordinaire. On le connaissait en Algérie, mais pas plus que ça. Belkalem a tout d’un grand joueur.
- On vous a vu jouer arrière droit à deux reprises avec le FC Valence, êtes-vous prêt à le faire avec l’EN ?
- (Il sourit). En fait, j’ai joué comme arrière droit une fois face au Bayern, et j’ai terminé dans le même poste face à la Real. C’était les 2 premières fois de ma carrière. Maintenant, pour le bien de l’équipe nationale, si Vahid me demande de jouer à ce poste en cas de pépins, je le ferai sans me poser la moindre question.
- Beaucoup de joueurs d’origine algérienne réfléchissent encore quant à opter pour l’Algérie. A votre avis, quelles en sont les raisons ?
- Il faut d’abord savoir que quand on commence une carrière, il faut gagner sa place en club. Le choix de la sélection est important, car tu ne peux pas revenir là dessus. Maintenant, il y a des joueurs qui prennent plus de temps que d’autres et il faut les respecter. Récemment, il y a un petit jeune, Ghoulam, qui a choisi l’Algérie, je lui ai dit qu’il a fait un très bon choix et qu’il sera reçu comme un frère. Il faut aussi préciser qu’on a un complexe sportif de qualité et on ne manque de rien. Il y a plein d’avantages. En Afrique, il n’y a pas beaucoup de fédérations qui mettent tous ces moyens. Ceux qui réfléchissent encore, je leur dit que tout est professionnalisé, pour les binationaux qui réfléchissent encore, à ce niveau là, tout est parfait.
-Vous avez inscrit votre plus beau but face au Bayern Munich, pouvez-vous nous raconter ce but justement ?
-Lors de cette rencontre, notre défenseur s’était fait expulser très tôt dans le match et le coach m’a demandé de jouer à ce poste là et j’ai livré l’un de mes plus beaux matchs. A la clé, un très beau but qui est certainement le plus beau de ma carrière. J’ai intercepté le ballon, je ne me suis pas posé de question, j’ai percuté, j’ai tiré et j’ai marqué.
-Depuis Rabah Madjer, plus aucun joueur n’a gagné la Ligue des champions…
-Je suis jeune, je n’ai que 22 ans et j’ai envie de croquer le monde. Donc, je voudrais gagner la Ligue des champions, des championnats et des titres, car c’est sur ça qu’on juge les joueurs à la fin de leur carrière. Le palmarès, c’est ça ce qu’on retient. Donc, j’ai à cœur de faire de grandes choses.
-Depuis votre venue en sélection, il y a eu une seule défaite, et ce, face au Mali…
-Au vu de la physionomie du match, c’était une défaite difficile. Nous avons encaissé sur deux coups de pied arrêtés. Mais bon, cette défaite va beaucoup nous servir en Coupe d’Afrique. Il y a beaucoup d’équipes en Afrique qui ont de grands gabarits, et en Afrique du Sud, on tâchera de ne pas commettre les mêmes erreurs.
-Un de vos coéquipiers blessés depuis 8 mois n’a pas encore repris, en l’occurrence Yebda, vous devez certainement ressentir ce qu’il vit ?
-C’est très difficile de vivre une blessure. Hassan en a connu d’autres, et malheureusement, beaucoup dans sa carrière. Là, il revient, il faut qu’il revienne doucement, c’est un grand professionnel, et incha Allah, il reviendra plus fort qu’avant.
-Vous êtes plutôt Barça ou Real ?
-(Il sourit de nouveau). Ni Real ni Barça, je suis Valencien à 100…
-Vous avez quand même une préférence ?
-Non, non, je suis Valencien.
-Et quel serait le club de vos rêves ?
-Personnellement, je ne rêve pas particulièrement d’un club. Le FC Valence, c’est quand même un grand club et un club historique. Sincèrement, je suis très heureux à Valence. Quand j’étais petit, le Valence de Mendieta, Canizares, Baraka, c’était grandiose pour moi.
-Un dernier mot pour les supporters algériens ?
-Merci pour leur soutien, merci de nous encourager et de nous pousser à faire de belles choses. C’est le 12e homme à domicile et on se sent invincibles chez nous. J’espère qu’ils viendront nombreux nous soutenir en Afrique du Sud.
A. H. A.
N. B. : vous retrouverez une grande partie de l’interview que nous a accordé Sofiane Feghouli à Valence ce soir sur Nessma TV à partir de 21h lors de l’émission Troisième mi-temps.
Il se demande comment la France l’a-t-elle laissé filer
Wenger parle de Feghouli
Arsène Wenger, sur ses chroniques sur le site d’Eurosport, a longuement parlé de ce qu’est en train de faire actuellement Soso Feghouli.
L’entraîneur d’Arsenal semblait étonné et s’est demandé comment un tel bijou a-t-il pu fuir les prospecteurs de la FFF. «Cette saison, je suis vraiment surpris par Sofiane Feghouli et ce qu\'il fait à Valence. Mais il y a des joueurs qui échappent encore aujourd’hui à la détection. Cela veut dire que quelque part, nous devons nous remettre en question… Peut-être que Feghouli est en train de prouver cela.»
«Ce qu’il fait sur les terrains est exceptionnel»
«Feghouli a un physique d’enfer, une volonté, et bien sûr des qualités techniques. Quand on voit ce qu’il fait sur un terrain, c’est exceptionnel», a-t-il laissé entendre, avant de souhaiter avoir un recruteur capable de repérer de tels joueurs. «C’est là qu’intervient le crédit de certains clubs. Leurs recruteurs n’ont pas peur de dire : ça c’est un bon joueur, peu importe que les autres ne l’aient pas vu, moi je crois qu’il est bon, il faut le prendre. On se met tous à genoux, nous les entraîneurs, pour avoir des recruteurs de cette qualité», a-t-il conclu sa chronique.
S. M. A.