Maintenant que vous êtes proche de signer à l’Arba, peut-on revenir sur vos déboires au MCA ?
Oui, pourtant tout avait bien commencé au stage du Maroc. Geiger, alors entraîneur du MCA, et Kaci Saïd me disaient que j’avais tout pour réussir au Mouloudia. Preuve en est, Kaci Saïd me surnommait même le bison. Le championnat débute, je joue le troisième match à Oran, contre le MCO, puis je disparais de la liste, je ne figurais même plus dans les 18. J’ai demandé des explications à Geiger, il m’a répondu : «Ça me dépasse !»
Que s’est-il passé ensuite ?
Un jour, Mihoubi, l’adjoint de Geiger, est venu m’expliquer que mon problème était d’ordre personnel lié à Kaci Saïd. Je suis allé voir ce dernier. Curieusement, il me fuyait, il y a eu alors une dispute entre nous. Après, Geiger et Mihoubi ont été limogés, remplacés par Bouali. Mais peu avant, Kaci Saïd est revenu brusquement à de meilleurs sentiments. Il me parlait comme si de rien n’était. C’était la semaine où il avait l’équipe en charge. Après, vint le stage de l’Espagne. Là, Kaci Saïd m’a renvoyé prétextant le fait que j’allais me marier ! Il m’a même menacé de baisser mon salaire et de m’évincer de l’appartement si je n’acceptais pas un transfert sous forme de prêt.
Qu’avez-vous alors fait ?
Je lui ai dit que je me contenterai de m’entraîner jusqu’à ce qu’on trouve une solution. Il m’a dit de rester à la maison et qu’il me fera signe dès qu’une issue sera trouvée. Le lendemain, il m’a envoyé un huissier de justice me signifiant que j’étais en situation d’abandon de poste. Là, j’ai réalisé une fois pour toutes que Kaci Saïd avait un seul objectif : briser ma carrière ! Je suis allé voir Bouali, je me disais qu’en tant que coach instruit, de niveau, il me comprendrait.
Ce n’était pas le cas…
Il m’a laissé entendre que même s’il voulait de moi, il ne pourrait pas me garder. «Ils ne veulent pas de toi !», m’a dit Bouali. On m’a relégué ensuite chez les espoirs, j’ai accepté mon sort, je n’ai rien dit uniquement pour ne pas perturber le groupe. Malgré ça, on m’a bloqué le salaire. Quand j’ai réclamé la chose à Boumella, il m’a dit que c’était juste une erreur, mais le comptable du club l’a contredit en me disant devant lui : «Ce n’est pas une erreur, c’est Kaci Saïd qui vous a demandé de le faire !» J’en ai conclu que le MCA a des dirigeants khobzistes, comme on dit, venus uniquement pour se remplir les poches. Boumella ne sait rien du football ni de la gestion. J’ai compris aussi que Bouali est khodra foq taâm, comme on dit chez nous (ndlr, des légumes sur un couscous). Certains joueurs étaient de mèche.
De qui parlez-vous ?
Je ne citerai pas de nom, mais je peux dire qu’ils étaient quatre. Oui, quatre joueurs, dont un évolue au même poste que moi, étaient derrière tout ça. Ils formaient un clan avec Kaci Saïd. D’ailleurs, même Bouali m’en a fait l’aveu un jour en me disant : «Quatre joueurs ne veulent pas de toi».
Comment expliquez-vous votre conflit avec Kaci Saïd ?
Il faut savoir que Kamel Kaci Saïd a deux complexes. Le premier c’est bel et bien Omar Ghrib. Et moi, j’en fais les frais parce que Kaci Saïd m’accuse de collaborer avec Ghrib qui l’a renvoyé du MCA en 2012. Depuis, c’est devenu une affaire personnelle. Alors, tous ceux qui approchent Omar Ghrib depuis cette date sont automatiquement les ennemis de Kaci Saïd. Ce dernier a un autre complexe : les enfants du club.
Comment ça ?
Kaci Saïd a pour habitude de berner les joueurs qui n’ont pas grandi au Mouloudia en leur disant qu’il était un enfant du club. Il peut le dire à ceux qui issus du MCA ne connaissent pas toute l’histoire du club, pas aux vrais enfants du Doyen, comme moi. Il ne peut pas me la faire, je me souviens que lorsqu’il a porté le maillot du Mouloudia, le club a failli descendre en deuxième division. Il a joué six minutes, puis il a été chassé du MCA. Maintenant, si tous ceux qui ont joué six minutes au Mouloudia se considèrent comme ses enfants, on n’est pas sortis de l’auberge.
Et qu’avez-vous à répondre à l’accusation qui vous désigne comme la taupe d’Omar Ghrib ?
Pour moi, Omar Ghrib n’est ni plus ni moins que mon ancien président au MCA. J’ai travaillé avec lui pendant quatre ans et je ne peux renier quelqu’un qui est resté à mes côtés le jour où j’étais au plus mal, lors de ma blessure. Je lui en suis reconnaissant, mais de là à en déduire que je suis sa taupe, il y a un pas à ne pas faire que Kaci Saïd a allégrement franchi, aveuglé par la haine. Cependant, il y a une justice divine, regardez maintenant quel a été son sort au MCA : il y a été chassé encore une fois… Pareil pour Boumella, c’est vraiment grave qu’un aussi grand club que le MCA ait été confié à lui qui n’a absolument rien à voir avec le foot. Il est impossible de communiquer avec lui, c’est d’ailleurs ce qui a facilité la tâche à Kaci Saïd.
C’est-à-dire…
Kaci Saïd a apprécié la nomination de Boumella car il connaissait son ignorance du football. Il savait qu’il allait en bénéficier, du reste Boumella lui a confié toutes les responsabilités, des fois même des choses qui n’ont rien à voir avec le poste de manager général. Et Kaci a su manœuvrer, il s’est entouré de quelques supporters, deux ou trois, à qui il a octroyé un salaire et qui se sont chargés de le défendre ensuite. Ce n’est pas tout, après la finale de la coupe d’Algérie, ils ont même eu droit à la prime du wali.
Comment ça ?
Oui, Kaci Saïd a éliminé de la liste des hommes qui ont travaillé pour le MCA et a mis deux supporters à leur place et leur a permis de bénéficier des cinquante millions de centimes offerts par le wali d’Alger. Que pouvez-vous attendre après d’un président qui se laisse faire de la sorte et qui ne dit rien quand son manager général entrant dans son bureau en poussant la porte de ses pieds et qu’il tabasse même ? Rien.
Maintenant que vous allez quitter le Mouloudia, quel est votre sentiment ?
Vous savez, on était deux seuls enfants du MCA à porter son maillot, il y a encore peu de temps. Bensalem et moi étions au club depuis l’année 2004. Bensalem est parti avant moi, il en était très déçu et cela m’a beaucoup affecté. Je vais devoir le suivre et quitter à mon tour le Doyen, cela me fait très mal car je n’ai connu qu’un seul club jusque-là : le Mouloudia. Aujourd’hui, il n’y a plus d’enfants du MCA, malheureusement, qui y jouent encore. J’espère que la nouvelle génération sera mieux traitée et qu’elle connaîtra un meilleur sort. J’aurais aimé grandir davantage au sein des Vert et Rouge mais, dans la vie, il faut savoir faire avec les impondérables qui surviennent en cours de route. Quand le mektoub t’ordonne de changer de trajectoire, il faut s’y plier. Peut-être que mon bonheur se fera ailleurs qu’au MCA, mais ce ne sera pas la même chose que lorsqu’on y est. C’est un enfant du Mouloudia qui le dit.
H. D.
«Bouali : des légumes sur un couscous
«Boumella ne sait rien du foot ni de la gestion
«Il y a 4 joueurs derrière mes malheurs au MCA
«2 supporters ont eu droit aux 50 millions du wali
Bio express
Né le 16 février 1990 à Guelma, Bilel Moumen a connu un seul club dans sa vie : le MC Alger. Il a intégré le grand club de la capitale en 2004, depuis la catégorie des minimes. Sous la coupe de Mekhazni, il a remporté trois titres avec les jeunes du Mouloudia : deux coupes d’Algérie et un championnat d’Algérie. Une fois promu chez les seniors, il a fait partie du groupe qui a gagné le championnat d’Algérie en 2010.
Le dernier des Mohicans
On reconnaît les grands clubs à leurs aptitudes à compter sur ses enfants. Le grand modèle de la dernière décennie vient du Barça et de ce qu’il a accompli avec La Masia, l’école de formation du FC Barcelone. Le club catalan peut aujourd’hui aligner une équipe cent pour cent composée de joueurs issus du club et qui ont été sacrés en Ligue des champions d’Europe. Le MC Alger de 1976 en a fait autant ou presque en se hissant sur le toit de l’Afrique en comptant essentiellement sur les enfants du club. Aujourd’hui, après le départ de Bensalem et celui, maintenant consommé, de Moumen, on assiste comme au départ des derniers des Mohicans. Triste sort pour les Mouloudéens…