Bracci : «Ramadhan, le matin, je peux tuer pour un café !»

François Bracci, l’entraîneur français du CS Constantine, a dirigé plusieurs clubs au Maghreb durant le Ramadhan. Il observe le jeûne dans tous les clubs qui font appel à ses services. Il a bien étudié la question, il en parle en expert.

Ramadhan et foot en plein été, qu'en dites-vous ?

La première fois que j'ai eu en charge le CS Constantine, c'était déjà tombé à cette période. Pour bien cerner le sujet, je me suis renseigné auprès de joueurs musulmans en France, à l'image d'Aït Athmane qui jouait à Martigues, en Ligue 2. Ensuite, j'ai consulté des diététiciens pour savoir comment l'organisme répondait dans ces conditions. Après, j'ai assisté à un grand colloque, à Marseille, qui parlait justement du sujet mais concernant l'athlétisme. Même si ce n’était pas le football, c'était vraiment adéquat pour se renseigner. Je suis arrivé à tirer pas mal d’enseignements.

Comme quoi, par exemple ?

Il s'est avéré que, même si l'organisme se fatigue plus vite, il peut résister à la charge de travail. Cela a été vérifié en athlétisme où c'est la vitesse pure, qui demande énormément de force et d'énergie, qui est tout le temps sollicitée. C’est encore plus astreignant que le jeu à onze.

Comment faisiez-vous pour préparer votre équipe à Constantine ?

A l'époque, la rupture du jeûne était aux envions de 17h. Alors, je faisais venir les garçons à midi, à l'heure où ils pouvaient se réveiller, et on faisait pendant une heure un travail qui n'exigeait pas trop d'efforts : des courses légères autour du stade, et un jeu avec ballon à l'intérieur d'un carré de 10 mètres carrés. Cela me permettait d'ouvrir le canal énergétique. On se retrouvait ensuite en salle, après la rupture du jeûne. Là, on poussait peu à peu.

Et comment ça se passait au MCA ?

Je faisais même de la musculation à 10h ou 11h du matin. Il ne faut pas croire que c'est énorme, c’est parce que c'est de l'exercice statique où ce sont les membres supérieurs et inférieurs qui travaillent, ce n'est pas comme les courses. Puis, deux heures après la rupture du jeûne, c'était un entraînement formidable : les joueurs étaient comme des guêpes.

Cette saison, ce sera un peu plus difficile, puisque la rupture du jeûne est plus tardive...

Non, puisque j'ai déjà préparé tout le programme de travail. De plus, on reprend le 30 juin, la chose sera donc facilitée parce qu'on aura consommé la moitié du Ramadhan avant d'entamer la préparation. On commencera par un entraînement à 17h, en forêt, puis on poussera un peu plus vers 23h.

Et pour vous, est-ce que le Ramadhan pose problème ?

Non, pas du tout, je le fais depuis plusieurs années déjà. Je l'ai fait quand j'ai entraîné au Maroc, en Algérie aussi. Mais il y a quelque chose qui me gêne quand même : je peux tuer pour un café le matin ! C'est ce qui me manque le plus. Mais bon, Ramadhan est une très bonne chose pour toutes les valeurs morales qu'il véhicule, pour la santé aussi, c'est la discipline du corps et de l'esprit.

H. D.

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