Il se confie à COMPÉTITION: Alain Perrin : «Je suis dans l’attente»

L’ancien sélectionneur de Chine, Alain Perrin, que nous avons joint hier par téléphone nous a confirmé sa rencontre avec le président de la Fédération algérienne de football vendredi dernier, Mohamed Roauraoua. Dans cette interview, Alain Perrin nous a fait savoir que lors de l’entrevue qu’il a eue avec le bosse de la FAF, il lui a exposé sa façon de travailler et sa philosophie de jeu. Ce dernier affirme qu’il connaît les joueurs et qu’il souhaiterait travailler dans la continuité avec le staff actuel, si jamais il venait à être choisi. Il souhaiterait toutefois ramener deux personnes avec qui il a l’habitude de bosser. L’ancien coach de l’OM parle aussi de beaucoup d’autres choses, notamment sa priorité s’il venait à être nommé sélectionneur des Verts. Entretien

On croit savoir que vous avez rencontré le président de la Fédération algérienne, Mohamed Raouraoua, le confirmez-vous ?

Tout à fait, j’ai vu M. Raouraoua vendredi dernier, nous avons discuté et là je suis dans l’attente. Je pense que le président de la Fédération algérienne de football voit d’autres candidats, il discute avec les coachs susceptibles de l’intéresser, il réfléchit car il veut prendre son temps pour prendre une bonne décision. Mais c’est vrai que j’étais content qu’il me reçoive, car il faut savoir j’étais déjà candidat au mois de mars dernier après le départ de Christian Gourcuff…

Et vous l’aviez rencontré à ce moment-là ?

Non, non, je ne l’avais pas rencontré. J’avais juste envoyé une lettre de motivation et un CV, mais je n’avais pas été retenu. Après je sais bien qu’il y a beaucoup de candidats, il faut faire un tri et des choix. Mais pour cette fois-ci, le président et moi-même avons bien discuté. J’avoue que tout cela tombe un peu mal, car il y a le tirage au sort de la CAN au Gabon suivi de beaucoup de travail derrière. Donc une période un peu difficile pour bosser sur le dossier du sélectionneur.

Et comment s’est passé votre rencontre avec le président de la FAF ?

Une rencontre cordiale lors de laquelle nous avons bien évidemment évoqué la situation de l’équipe nationale. Moi j’ai exposé ma philosophie de jeu et ma façon de travailler. J’ai dit aussi que je souhaiterais faire venir des gens avec qui j’ai l’habitude de bosser, mais je ne veux pas non plus ramener trop de monde car je veux aussi travailler avec les gens qui sont actuellement dans la sélection…

Vous souhaiteriez ramener combien de personnes ?

Pas plus de deux personnes, car on a besoin d’avoir des appuis et des relais, mais comme je viens de vous le préciser il ne faut pas non plus tout bousculer. Il y a eu déjà le départ de l’entraîneur, il y a un match et il faut travailler dans la continuité, donc pas la peine de faire des bouleversements. C’est pour vous dire que dans un premier temps, je souhaiterais travailler avec les gens qui sont en place. En Chine, nous étions trois Français et trois Chinois plus un interprète et ça fonctionnait plutôt bien.  

Justement en quoi consiste votre philosophie de jeu ?

Ce qu’il faut savoir c’est que la philosophie de jeu dépend beaucoup de la qualité de l’équipe et du potentiel qu’on a. L’Algérie, c’est une équipe à grand potentiel technique, donc elle doit avoir la maîtrise du jeu et la maîtrise du ballon pour se créer des occasions. Après il faut trouver le juste équilibre entre l’attaque et la défense, car pour pouvoir attaquer il est impératif de récupérer le ballon. Mais c’est vrai qu’avec l’équipe algérienne actuelle, on ne peut pas lui demander d’opter pour un système défensif et contre-attaquer. La technique à elle seule ne suffit pas, car il faut aussi des valeurs morales pour pouvoir gagner des matchs. C’est un mélange de plusieurs choses, d’où la complexité de notre travail. Il est donc important de bosser tous les paramètres et non pas se focaliser sur une chose seulement.

Avez-vous suivi cette équipe algérienne ?

J’avoue que je n’ai pas vu ses derniers matchs. Mais bon du fait que j’ai quelques touches aussi avec d’autres sélections africaines, j’ai suivi un peu les résultats dans ce continent. Par contre les joueurs je connais bien, car beaucoup d’entre eux ont évolué en France, même si actuellement la majorité jouent en Espagne et en Angleterre. En plus et comme au mois de mars dernier j’étais candidat, je m’étais un penché sur la liste, les joueurs convoqués et j’avais un peu travaillé là-dessus...

Donc vous avez une idée sur les joueurs ?

Oui, tout à fait. Pa exemple l’année dernière j’avais suivi l’ascension d’un garçon comme Mahrez, une vraie découverte. Mais après c’est différent entre avoir juste des échos sur les joueurs, les avoir de temps en temps et faire une sélection. Après comme je vous l’ai déjà précisé il faut travailler dans la continuité…

Vous voulez parler de la composante du groupe ?

Tout à fait. Il y a un groupe en place et qui a fait des résultats et il faut continuer avec ces joueurs, mais travailler l’état d’esprit et l’ambition de cette équipe. Tout simplement créer une dynamique de groupe positive.

Le président de la FAF a confirmé à plusieurs reprises ces derniers jours qu’en raison de la langue, il y avait un problème de communication entre les joueurs et l’ancien coach ?

Oui, j’ai vu ça car je vous avoue que j’ai beaucoup lu Compétition au cours de ces derniers jours. C’est vrai que lorsqu’il y a la barrière de la langue, faire passer le message, cela prend beaucoup plus de temps. J’ai eu à vivre cette expérience en Chine, car à chaque fois qu’on veut parler aux joueurs, le temps de parole est multiplié par deux, sans qu’on soit certains que c’est traduit exactement comme on le souhaite, en plus le vocabulaire chinois est encore plus compliqué. Quand on passe par un interprète ce n’est pas une communication directe, et du coup on perd en efficacité dans la communication.

M. Raouraoua a fait savoir aussi que le volet de la communication demeure important, surtout lorsque vous avez beaucoup de joueurs de qualités, et donc pas évident pour certains d’entre eux de se retrouver sur le banc ?

Oui, bien sûr, que c’est important de communiquer, expliquer les choses, les rôles de chacun. Le fait qu’on ait besoin de tout le monde, mais après le sélectionneur, il cherche à créer la meilleure équipe du jour. Cela ne veut pas dire que les joueurs qui ne jouent pas ne sont pas bons. Il y a beaucoup de paramètres qui entrent en jeu : l’état de forme, les blessures, le temps de jeu dans les clubs, et donc beaucoup de choses qui entrent en ligne de compte. Justement avec le président on a évoqué un volet…

Lequel ?

Le problème d’accumulation des matchs entre les rencontres de championnat, de coupe, de Ligue de champions ou d’Europa League, ça fait beaucoup de matchs, et les joueurs doivent être fatigués. C’est pour vous dire qu’il y a une gestion de l’état de forme et de l’état de physique des joueurs. Une gestion qui fait qu’on peut faire des choix sur un match. D’ailleurs quand j’étais en Chine, souvent j’avais en tête un onze parce qu’on connaît la valeur des joueurs, mais dès qu’on travaille avec eux durant trois ou quatre jours, et bien on se rend compte que nos choix initiaux vont changer.

Vous voulez dire qu’un 11 prévu au départ peut changer lors d’un stage ?

Tout à fait. Il m’est arrivé avec du recul de constater que l’équipe que j’ai alignée lors du match n’était pas celle forcément que j’avais composée dans ma tête lorsque j’ai fait ma liste des 23. Certes, quand on prend 23 joueurs, c’est qu’on a confiance en eux et que tous ils peuvent jouer, mais après il y a toujours un noyau dur, les leaders, les cadres et l’ossature de l’équipe, mais il faut quand même tenir compte de l’état de forme de chacun.

Et certains joueurs en équipe nationale ne jouent pas beaucoup en ce moment…

C’est le problème aussi quand on joue dans des grands clubs. Certes les joueurs sont toujours dans le rythme parce qu’ils entraînent et qui jouent 20’ par match. Mais après quand les joueurs n’ont plus l’habitude de jouer 90’, c’est difficile de commencer avec trois ou quatre éléments qui n’ont pas 90’ dans les jambes. Car après il faudra penser à les remplacer, mais il faut aussi penser aux blessures. Donc c’est tout ça qui entre dans la réflexion du coach pour faire une équipe. C’est la gestion humaine de l’effectif par rapport aux objectifs et à l’état de forme. D’où la complexité de notre travail.

Vous n’avez jamais travaillé en Afrique, n’appréhendez-vous pas cela au vu des conditions difficiles de ce continent ?

Non pas du tout. En Chine pour jouer un match, on faisait des milliers de kilomètres. On allait jouer en Australie, en Thaïlande avec des conditions climatiques et de jeu complètement différentes. J’ai aussi travaillé pendant quatre ans au Qatar, et la chaleur, je connais aussi. Tout cela ce sont des facteurs qu’on l’on intègre. Maintenant si j’ai l’occasion de travailler en Algérie, j’aurai surtout le plaisir de retravailler dans ma langue, parce que cela fait six ans maintenant que je bosse avec des interprètes. Mais ça ne pose aucun problème d’être dans le continent africain, d’autant plus que j’ai eu à disputer plusieurs matchs amicaux face à des équipes africaines. Mais le plus important c’est de bien connaître et maîtriser la composante qu’on a.  

Pensez-vous réellement que l’Algérie a encore toutes ses chances lors de ces éliminatoires après le match nul face au Cameroun ?

Dans ce genre de mini-championnats, c’est toujours bon de commencer avec une victoire. Mais après les quatre équipes de ce groupe sont très proches les unes des autres en terme de valeur, même si je pense que le Nigeria, le Cameroun et l’Algérie sont un peu au-dessus et donc sur un match tout peut se passer. A mon avis beaucoup d’équipes peuvent perdre des points à domicile. Pour l’instant rien n’est encore fait et l’Algérie n’est pas dans une situation critique. Certes dans ce genre de compétitions, on ne peut pas se permettre plusieurs faux pas, mais il suffirait d’enregistrer un bon résultat lors du prochain match pour que tout soit relancé.

Est-ce un avantage le fait que vous soyez déjà venu en Algérie ?

Oh, c’est plutôt anecdotique ! C’est sûr que je connais l’Algérie. J’ai beaucoup d’amis algériens, j’ai eu des joueurs algériens. Mais le plus important c’est que beaucoup de joueur ont été formés en France et donc on a un peu le même langage de football car ils sont passés par les centres de formation français. Car être formé en Espagne, en Italie ou en Allemagne ce n’est pas pareil. On a la même culture, le même langage et c’est plutôt favorable.

Dans le cas où votre candidature serait retenue, que pensez-vous pouvoir apporter en peu de temps dans une rencontre d’une telle importance ?

Et bien si jamais je venais à être choisi, je prévois de voir et de contacter les joueurs avant le stage. J’appellerai certains d’entre eux, j’irai voir d’autres dans leurs clubs pour commencer déjà à expliquer un certain nombre de choses. 50% de notre travail c’est la communication, la discussion avec les joueurs. Donner à la fois sur le plan du jeu et de l’état d’esprit une dynamique positive. Créer cette dynamique. En gros, mettre les joueurs dans de bonnes conditions, car au final c’est quand même eux qui font la performance.

Vous suivrez certainement avec intérêt le tirage au sort de la prochaine CAN cette semaine ?

Oui, bien sûr, car la CAN est une compétition très difficile et la composante des groupes sera importante. De toutes les façons, moi je suis certain qu’il y aura un bon sélectionneur pour l’Algérie.

Dernière question, votre nom a été citer pour prendre la barre de l’USMA, avez-vous été approché ?

Non pas du tout. Personne de la direction de ce club n’a pris attache avec moi.

Asma H. A.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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