Beaucoup réclament aujourd’hui la démission du président de la FAF, Mohamed Raouraoua. Mais est-ce vraiment ça qui va régler les problèmes du football en Algérie ?
C’est indéniable, Raouraoua a récemment pris beaucoup de mauvaises décisions. Provoquer le départ de Vahid, le choix de Gourcuff, son remplacement par Rajevac qui, à son tour, a laissé sa place à Leekens… sont tous des mauvais choix de casting qui ont précipité la chute de la sélection algérienne. Des erreurs, il en a commis d’autres, comme la mise à l’écart de Feghouli et Medjani, ou encore son obsession à vouloir tout contrôler dans les moindres détails. Cependant, on remarquera que toutes les mauvaises décisions de Mohamed Raouraoua sont d’ordre technique, un domaine qu’il ne maîtrise pas assez et dans lequel il devra consulter les gens du métier.
Déléguer et consulter les gens du métier
En dépit de tout ça, il faut reconnaître que Raouraoua a aussi fait beaucoup de bonnes choses et a pris beaucoup de bonnes décisions. Ouvrir la porte de la sélection aux binationaux en est sans doute le parfait exemple. Personne ne peut nier que depuis qu’il est à la tête de la FAF, beaucoup de choses ont évolué, à commencer par la situation financière, la gestion administrative, la logistique, l’organisation et le professionnalisme. La seule chose qu’on pourrait lui
reprocher vraiment est son exclusion quasi totale des techniciens et des gens qui peuvent réellement lui être de bon conseil. Raouraoua ne peut pas travailler seul, il doit déléguer certains pouvoirs, surtout techniques. Cela nous mène à parler de la DTN.
Ailleurs, c’est la DTN qui choisit les sélectionneurs
La définition du métier de directeur technique national démontre à quel point c’est important de ne pas se tromper dans son choix. Sur le site officiel de la Fédération française de football, on peut lire en détail le profil, les prérogatives et la tâche de leur DTN. Ceci est bien évidemment valable pour toutes les grandes fédérations à travers le monde. «Il doit être un technicien de très haut niveau dans sa spécialité sportive. Le DTN est au centre d’un système complexe où il doit composer avec des enjeux sportifs, juridiques, médiatiques, sociaux, économiques, humains, politiques et professionnels. En conséquence, il doit être à la fois entraîneur, négociateur, visionnaire, gagneur et communicant... C’est à la fois un manager, un gestionnaire et un leader… Il contribue à la définition de la politique fédérale, en assure l’application et évalue sa portée», peut-on lire noir sur blanc sur le site de la FFF. Parmi la diverse responsabilité du DTN en France, on y trouve : «Il est responsable de l’ensemble des équipes nationales et de la politique sportive de haut niveau, de la formation et du perfectionnement des cadres» et surtout «de la nomination des entraîneurs nationaux, des cadres techniques nationaux et régionaux».
La FAF, quel que soit son président, doit suivre cet exemple. Les décisions unilatérales n’ayant rien apporté, il est temps d’avancer et de penser à mettre en place une direction technique forte capable de tracer une feuille de route et de proposer des solutions durables et solides qi pourrait sortir le football algérien de sa crise. On ne peut parler de DTN sans évoquer Christian Gourcuff. Ce dernier n’était sans doute pas le meilleur choix pour la barre technique des Verts. Néanmoins, il pouvait l’être pour la DTN. Son profil colle parfaitement. Il a commencé à travailler avant qu’on commence à lui mettre des bâtons dans les roues. Ainsi et pour répondre à la question posée dans le titre, on dira que non, son départ peut peut-être calmer les ardeurs ou faire plaisir à certains, mais ses répercussions peuvent être néfastes et irréparables à moyen et à long termes, d’autant plus que les candidats, les vrais, ne se bousculent pas devant le portail de l’immeuble de Dély Ibrahim.
R. K.
Baghdadi : «Raouraoua doit absolument rester»
L’ancien vice-président est sorti de son mutisme pour parler de ce qui se passe actuellement au niveau de la sélection nationale. Pour lui, il est impératif de voir le président Mohamed Raouraoua rester dans ses fonctions afin de redémarrer la machine. Selon Baghdadi, Raouraoua est l’homme qu’il faut pour gérer au mieux cette période.
Après le fiasco de la CAN, c’est l’heure de rendre des comptes. Tout le monde est furieux car il a le sentiment d’être trahi par une équipe qui était favorite sur le papier mais qui a finalement quitté la compétition au premier tour. Si Leekens prend cher en matière de critiques, le président de la FAF, Mohamed Raouraoua, n’y échappe pas lui aussi du moment que beaucoup demandent son départ de la FAF car estimant qu’il a échoué. Ce n’est en tout cas pas l’avis de Nasreddine Baghdadi. L’ancien président du RCA reconnaît certes que la situation est difficile mais ne veut pas entendre parler du départ du boss de la FAF. «Pour moi, les choses sont claires. Mohamed Raouraoua doit absolument rester en tant que président de la FAF. Actuellement, il est l’homme qu’il faut pour gérer cette situation et aller de l’avant. Son départ serait une véritable catastrophe pour l’équipe nationale. Il a fait beaucoup de sacrifices pour apporter le plus à l’équipe. Il est capable de faire face aux difficultés et de relancer la machine. Je ne dis pas ça pour jeter des fleurs à celui que je considère comme un ami, mais c’est la réalité. Il ne doit pas partir, il doit au contraire rester et continuer à travailler comme il le fait depuis toujours.»
«Il devrait déléguer un peu de ses pouvoirs»
Poursuivant son intervention, celui qui a occupé la fonction de vice-président de la FAF pense que le boss actuel devrait déléguer un peu de ses pouvoirs car seul, il ne peut pas tout faire. Toutefois, il l’invite à le faire avec des gens propres et dignes de confiance. «Je pense que le président de la FAF devrait déléguer un peu de ses pouvoir. Seul comme il l’est, il ne peut pas tout gérer. C’est pour ça qu’il doit laisser un peu de ses pouvoirs à des gens qui vont l’aider. Néanmoins, pour que ça marche, il faut que ce soit des gens compétents et propres. Ils doivent être dignes de confiance pour l’aider dans sa tâche.» Le principal concerné devrait apprécier ce soutien de la part de l’actuel commissaire au match de la Ligue 1 Mobilis.
I. Z.
Dissocier Raouraoua du choix des techniciens est nécessaire
De juillet 2014 à Janvier 2017, la sélection nationale de football a enregistré quatre changements au niveau de son encadrement technique. Après l’exploit des Verts en Coupe du monde au Brésil sanctionné par une historique qualification au deuxième tour, l’entraîneur Vahid Halilhodzic a décidé de s’en aller. Dégoûté du traitement que lui avait réservé la FAF, il a emprunté le chemin du «fric» optant pour Trabzonspor, club turc de stature moyenne, qui lui a offert un meilleur salaire. Depuis, le président de la FAF, Mohamed Raouraoua, ne sait plus se fixer sur un entraîneur en mesure d’assurer la pérennité des Verts. Il jette son dévolu sur le Français Christian Gourcuff qui s’en va au terme d’une année et demie de collaboration. Il sera remplacé par le Serbe Milovan Rajevac. Celui-ci effectuera un passage éclair avant la résiliation « à l’amiable » de son contrat au lendemain du match nul concédé à domicile contre le Cameroun en éliminatoires de la Coupe du monde 2018. Le patron de la FAF, peu soucieux des vrais critères de sélection d’un entraîneur national, lui qui croit qu’avoir de grands joueurs suffit pour monter une équipe conquérante, réactive la piste belge pourtant peu conforme avec le football algérien. Il refait appel à Goerges Leekens pour driver les Slimani et consorts. Celui-ci n’arrive pas à stopper la chute libre des Verts qui auront grandement compromis leurs chances de qualification pour la Coupe du monde 2018 en Russie et provoqué une élimination peu glorieuse lors de la CAN 2017. Lui aussi a démissionné hier. Des choix qui ont montré leur inadaptation ni avec les exigences techniques d’une équipe algérienne constellée de joueurs de talent ni avec les spécificités du football africain. L’EN botte en touche, victime décidément de choix peu réfléchis du président de la FAF. Ce dernier, sans être un ancien joueur ou un technicien de renom, préfère évoluer en solo quand il s’agit de la désignation d’un sélectionneur national faisant fi (involontairement ou pas) des appels incessants des quelques techniciens sages, des médias et différents observateurs à la mise en place d’une structure habilitée à choisir ou au moins à proposer un technicien en mesure de tirer vers le haut les Verts. La Direction technique nationale (DTN), réduite à la formation des entraîneurs, est le grand absent dans le projet de la sélection des entraîneurs nationaux. Pas la peine de parler du Bureau Fédéral qui, malgré ses larges prérogatives (sur le papier), adopte toutes les décisions du président. Ne fallait-il pas dissocier Mohamed Raouraoua de cette tâche purement technique qui doit s’échoir aux compétences spécialisées ? La réponse est, du moins théoriquement, tout indiquée. Vu les exigences de l’heure, Raouraoua se doit, pour le bien de l’EN, de se décharger de quelques prérogatives techniques se consacrant aux aspects administratifs et managériaux où il développe des compétences indubitables.
R. K.
Le projet devient un mirage
A-t-on vraiment les moyens de s’offrir un grand entraîneur ?
La problématique de l’entraîneur de l’équipe nationale risque de s’inscrire dans la durée. D’autant plus que l’engagement d’un grand technicien est synonyme d’importants efforts financiers. Le projet n’est pas visiblement concrétisable. Le discours du président Raouraoua sur ce volet a enregistré, faut-il le rappeler, un grand revirement depuis l’éclatement de la crise financière en 2014 née de la chute libre des prix de l’or noir. D’un président de fédération déclarant que les plus grands entraîneurs souhaiteraient prendre en main l’EN, Mohamed Raouraoua a complètement changé son discours soulignant, au terme du départ de Rajevac, que celui qui veut un entraîneur de grande stature n’a qu’à le payer. Certains pensent que Raouraoua devrait se rabattre sur la solution locale, bannie de sa philosophie depuis l’ère Benchikha, d’autres pensent plutôt qu’il faut un étranger pour nos stars, mais quel étranger ?
Renard, Courbis, Perrin et les autres
Pour répondre à cette question, on devrait savoir combien la FAF a-t-elle vraiment dans les caisses. Hafid Derradji, ancien membre fédéral et porte-parole de la FAF et ami de longue date de son président, a parlé, il y a quelques mois, d’un chiffre avoisinant les 100 millions $. On ne peut malheureusement pas vérifier ou confirmer cette information pour des raisons évidentes, néanmoins, on a entendu de la bouche même de Mohamed Raouraoua que la FAF était la deuxième fédération la plus riche du continent. Le président de la FAF a aussi déclaré dans un passé récent que l’instance qu’il dirige est autonome financièrement et que grâce à ses partenaires et sponsors, il a décidé de se passer des subventions de l’Etat. Si on est comme le prétend Raouraoua la deuxième fédération la plus riche en Afrique, pourquoi on ne peut pas s’offrir un coach comme Renard, Perrin, Hector Cuper, Courbis, Wilmots ou au moins Susic ? Pourquoi rencontrer Wilmots, Maccini et Prandelli si on n’a pas les moyens de les recruter ?
Rafik Khaled
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Ali Fergani, ancien sélectionneur national
«Le recrutement d’un sélectionneur est le travail des spécialistes»
L’ancien capitaine et ex-sélectionneur des Verts, Ali Fergani, affirme qu’il est temps désormais de consacrer le choix des entraîneurs de l’EN à une structure constituée de compétences spécialisées. Il a fait une proposition dans ce sens au Bureau Fédéral, sans suite.
La question de l’encadrement technique de l’EN devient un véritable problème. Ne pensez-vous pas qu’il est temps de confier cette mission aux compétences en mesure de gérer ce dossier ?
Je crois m’être bien exprimé sur ce sujet et à plusieurs reprises, j’étais clair là-dessus, le recrutement d’un entraîneur national doit se faire dans le cadre d’une réflexion menée par des spécialistes en la matière. La Direction technique nationale (DTN) se doit nécessairement d’être impliquée dans cette tâche d’établissement des critères des potentiels entraîneurs nationaux. Pour votre information, j’ai fait une proposition lors de mes débuts au Bureau Fédéral de création d’un organisme, comprenant des compétences pour la gestion des questions techniques de l’EN. Le projet n’a pas connu de suite.
Que doit-elle faire désormais la FAF ?
Elle est tenue à engager une réflexion pour relancer la formation localement. Il est temps qu’elle mette en place des mécanismes à même de contraindre les clubs à prendre au sérieux le volet de la formation.
Parlons de Leekens…
Il ne faut pas trop incriminer Georges Leekens qui a commencé depuis peu. Ce sont plutôt les conséquences des changements fréquents opérés au niveau du staff technique national en un laps de temps assez court. La non-convocation de Medjani et Feghouli aura été également fatal pour notre sélection.
L’on reproche justement au Belge d’avoir éventuellement pris des décisions qui ne sont les siennes. N’est-ce pas ?
Je ne peux pas vous réponde dans la mesure où nous ignorons ce qui se passe au sein de cette équipe. Mais si c’est le cas, l’entraîneur se doit de dénoncer.
Le geste de Brahimi qui manifeste sa colère après son changement n’est-il pas synonyme d’un malaise ?
C’est juste un pressentiment, j’ai l’impression que des choses se passent au sein de cette équipe. Ce n’est pas normal que Brahimi réagisse de la sorte. Aurait-il réagi de la sorte à Porto ? Certainement non.
Rafik Khaled