Un local ou un étranger, le débat est lancé
L’élimination de l’EN du premier tour de la CAN du Gabon a précipité le départ du sélectionneur Georges Leekens. Le technicien belge est resté 88 jours avant de rendre le tablier.
La pression de la rue a été terrible et le Belge a été contraint de quitter la barre technique. L’instabilité qui ronge l’EN depuis le Mondial 2014 a influé directement sur le niveau général des Verts et le rendement de la plupart des joueurs considérés comme de cadres de l’équipe. La page du Gabon est maintenant tournée mais le plus important c’est le futur. Les Verts devront replonger dans la compétition continentale à partir du mois de juin pour le compte des éliminatoires de la CAN 201. La FAF devra choisir un sélectionneur pour diriger les Fennecs capable de redresser la barre et faire rebondir l’équipe de nouveau à l’échelle internationale. Est-ce qu’il faudrait opter pour un étranger ou bien privilégier la piste locale. Le débat est lancé.
K. H.
Belkheira : «L’instabilité dans le staff est condamnable»
Pour Mohamed Belkheira la raison de cette élimination précoce des Verts est due à la mauvaise préparation et à l’instabilité dans l’encadrement technique. «Moi, je pense que cette équipe est à encourager, ce sont de jeunes joueurs qui ont manqué de confiance. Pour l’échec, la faute incombe à la préparation puisque l’équipe n’a pas fait suffisamment de matches amicaux. A mon avis il fallait au moins trois matches de préparation. Comme ça les joueurs auront acquis cette cohésion qui manquait tant. En fait, les joueurs ont donné l’impression d’avoir manqué de confiance en leurs possibilités. Donc avec quelques matches amicaux dans les jambes je peux dire que l’équipe aurait peu atteindre le deuxième tour, c'est-à-dire les quarts de finale mais pas en finale je le précise», a indiqué l’ancien capé des Verts des années 80 hier soir. Interrogé pour donner son avis sur la raison de l’échec, prévisible faut-il le souligner, l’ancien libéro de l’EN a répondu : «C’est l’instabilité dans le staff technique qui est derrière cet échec. Une instabilité condamnable je dirais. Parce que ce n’est pas évident de faire trois changements dans un intervalle très court pour une sélection ou pour une équipe tout simplement. Donc c’est une des raisons de cette élimination précoce dans cette coupe d’Afrique. En clair, il fallait éviter tous ces changements alors que cette compétition frappait aux portes.»
«Les dirigeants de clubs sont à blâmer aussi»
Prié de dire quelle structure faudra-t-il blâmer, le dénommé Nigrou a jeté la balle dans le camp des dirigeants de clubs de l’élite. «Je pense qu’il ne faut pas critiquer X ou Y si notre football est malade. Il ne faut pas incriminer la FAF. C’est plutôt les dirigeants de clubs qu’il faut blâmer parce qu’ils n’ont rien apporté au football. Seules les subventions les intéressent. Ont-ils formé des joueurs ? Ont-ils fait quelque chose de bon pour le football ? Ont-ils pensé à construire un centre de formation avec l’argent qu’ils ont pris de l’Etat ? C’est quoi leur politique si ce n’est de réclamer l’argent des subventions. Si au moins ils arrivent à donner onze joueurs valables pour la sélection nationale mais là ce n’est pas le cas. Leur souci ce sont les résultats et rien de plus, le tout pour avoir un bon pactole financier. Donc il faut demander des comptes à ces dirigeants dont la plupart ne pensent qu’à l’argent
Enfin, je crois que pour avoir une bonne sélection il faut l’avoir à partir des petites catégories, des cadets, des juniors et espoirs. Ce qui n’est pas le cas chez nous. Voilà mon raisonnement.»
L. M. A.
Benchadli : «Le coach doit avoir l’autorité sur le groupe»
Pour Djamel Benchadli, la sélection nationale a besoin d’un coach qui maîtrise le groupe mis à sa disposition
L’élimination de la sélection nationale était-elle attendue pour vous ?
Franchement je ne m’attendais pas à cette élimination. Je ne m’attendais surtout pas à cette défaite face à la Tunisie. Dans le deuxième match il faut toujours assurer un bon résultat. Déjà contre le Zimbabwe nous sommes passés à côté. Donc, il fallait réagir par la suite. Or ce n’était malheureusement pas le cas. Ce match on l’a perdu bêtement je dirais alors qu’on devait se ressaisir. Il fallait un sang neuf hélas !
Par exemple…
Je ne vois pas pourquoi on n’a pas donné assez de temps de jeu à Hanni. En peu de temps, il a prouvé. Dans ce match contre la Tunisie il a marqué un but d’une manière extraordinaire puisqu’il a ajusté une reprise sans contrôle. On l’a aligné trop tard et c’est dommage pour notre équipe. Pour rappel, Halilhodzic l’avait fait, il a fait des changements qui ont porté leurs fruits dans le dernier Mondial.
Faut-il pour autant confier l’équipe à un entraîneur local ?
C’est un détail simple à régler. Car la sélection a besoin d’un entraîneur compétent qu’il soit algérien ou étranger. Il faut d’abord qu’il soit un coach d’actualité, c’est-à-dire qu’il soit dans le temps. Qu’il soit du pays ou de l’étranger, l’essentiel est qu’il soit compétent. Qu’il arrive à maîtriser le groupe de joueurs mis à sa disposition. Il faut qu’il soit habile dans la communication. C’est important pour pouvoir monter une équipe forte et homogène. En clair, il faut qu’il arrive à faire le rassembleur. C’est lui l’autorité dans n’importe quel domaine. En réalité, l’équipe a besoin de quelqu’un qui arrive à avoir tous ces aspects. Ces aspects ont manqué à notre équipe. Sinon sur le plan individuel, on avait la meilleure équipe qui figure en Afrique. Je dois ajouter que le coach doit savoir résoudre les problèmes conflictuels dans le groupe.
Si dans le pays on a un coach qui remplit les conditions, il faut faire appel à ses services sinon il faut engager un étranger capable de le faire.
L. M. A.
Bouakez : «Calderon répond au profil l’EN»
L’entraîneur tunisien du Rapid Club Relizane, Moez Bouakez, nous a affirmé que la nationalité du prochain sélectionneur de l’équipe nationale n’est pas du tout importante, l’essentiel est qu’il soit un bon entraîneur porteur d’un projet à long terme.
«Pour moi l’identité ou la nationalité du prochain entraîneur de l’équipe algérienne n’est pas si importante, un étranger ou un Algérien, l’essentiel qu’il y ait une feuille de route entre les responsables et le futur entraîneur, cela dépendra aussi de l’objectif tracé, ramener un pompier pour quelques mois ou alors avoir un projet à long terme. Il faut avoir un profil qui corresponde à cette équipe d’Algérie qui, il faut le reconnaître, possède un ou deux joueurs excellents, tandis que les autres sont de bons joueurs, et surtout qu’il soit connaisseur de l’atmosphère régnante en Afrique et avoir un vécu en tant que joueur ou entraîneur dans le haut niveau, ne négligeant pas aussi son attitude et son comportement avec le groupe en sachant passer le message à ses joueurs et les pousser à se donner le maximum.» Et d’ajouter : «Si j’ai à choisir pour l’identité du prochain sélectionneur de l’Algérie, j’opterai pour Gabriel Calderon : et cela je l’ai dit après le départ de l’ancien sélectionneur, à savoir Christian Gourcuff. Calderon qui a été un grand joueur national et international en jouant en Espagne, en France, en Suisse sans oublier l’équipe nationale argentine, et aussi l’entraîneur qui a gagné la Coupe du monde en 1986 avec Maradona et maintenant il est en train de faire un très bon travail avec les équipes nationaux au Golfe. Pour moi c’est le profil adéquat pour l’équipe national car il connaît la mentalité arabe et africaine, un bon communicant et très sérieux dans son travail. Maintenant à savoir si les responsables de la Fédération Algérienne de Football ont les moyens financiers de le recruter.»
B. B.
Henkouche : «Un coach local ? Une excellente idée»
PAR BADIS BESSAÏ
Le coach du MO Béjaïa s’est exprimé hier sur la situation actuelle de l’équipe nationale algérienne en disant : «L’équipe nationale algérienne est passée totalement à côté de sa coupe d’Afrique des nations, avec un manque d’organisation flagrant sur le terrain et en dehors du rectangle vert. La situation chez les Verts est alarmante, on n’a pas reconnu notre sélection lors de cette CAN, et ce, malgré les moyens gigantesques qui ont été mis à la disposition de la fédération, du coach et des joueurs. Lorsqu’on échoue dans sa politique il faut l’avouer, un changement s’impose au sein de l’EN d’autant plus que la stratégie adoptée par les responsables du football en Algérie a démontré ses limites. Les résultats sont là, ne pas pouvoir passer la phase des poules devant des adversaires pas trop puissants est un signe qui ne ment pas. La méthode utilisée dernièrement est défaillante, les changements opérés dans la barre technique nous ont menés à cette catastrophe.»
«Leekens est trop petit pour driver l’EN»
Le driver des Crabes a à l’occasion parlé de l’ex-sélectionneur de l’équipe nationale en déclarant : «L’entraîneur de l’équipe nationale algérienne a montré ses limites durant cette CAN avec de nombreuse erreurs enregistrées lors de cette compétition continentale et je pense que son limogeage est la meilleure chose qui puisse arriver à la sélection algérienne. »
Mohamed Henkouche positif à l’idée de voir un entraîneur local à la tête des Fennecs : «L’Algérie a fait un énorme bond en matière de football par rapport aux années précédentes, avec un championnat plein de talents que ce soit du côté des joueurs ou des coachs, je pense donc que cette idée de voir un entraîneur local au poste de responsable de la barre technique de l’équipe nationale n’est pas une si mauvaise idée, c’en est même une excellente.»
Ighil : «Etranger ou local, il faut un sélectionneur avec plusieurs casquettes»
Meziane Ighil, l’ancien international algérien qui a entrainé par la suite plusieurs équipes que se soit en Algérie ou ailleurs, a toujours répondu sans détour aux questions. Avec son franc-parler, Ighil pense que le plus important, ce n’est pas la nationalité du sélectionneur, mais par contre avoir un staff local serait nécessaire.
Contacté par nos soins dans la journée d’hier, l’ex-entraîneur en chef du Mouloudia d’Alger et l’ancien international algérien des années 1973-1982, Meziane Ighil a répondu à notre question : est que l’Algérie doit recruter un sélectionneur local ou étranger ? Le concerné dira ceci : «Un sélectionneur étranger ou local n’est pas important. Il faut avoir un sélectionneur avec plusieurs casquettes. Il doit être un frère, un père, un psychologue et un gendarme quand il faut.» En clair, un sélectionneur qui peut gérer un groupe. Quand il faut être sévère et quand il faut laisser passer les choses. Un sélectionneur qui a plusieurs tours dans son sac afin de diriger l’EN sur la bonne voie.
«On a une équipe avec ses particularités et il faut qu’un sélectionneur adhère à ses particularités»
Et donc, si le local et l’étranger, ce n’est pas cela le plus important, alors qu’est-ce qui est essentiel pour l’Algérie de prendre en considération avant de choisir son nouveau sélectionneur ? Une question posée à Meziane Ighil qui dira : «On a une équipe avec ses particularités. Quand on choisi un sélectionneur, il faudra prendre considération de cela. Il faut voir la carte de visite du sélectionneur. Il faudra qu’il ait une bonne approche. En bref, plusieurs paramètres entrent dans le choix d’un sélectionneur national. Après qu’il soit local ou étranger ce n’est pas ça le plus important. Un sélectionneur doit avoir une personnalité.» Une façon d’inviter tout le monde à voir les raisons qui ont poussé l’Algérie à rater sa CAN et apprendre de ses erreurs pour bien avancer. Car on a une équipe nationale. Il faudra juste redémarrer sur de bonnes bases.
«L’un des rôles d’une DTN est de proposer un sélectionneur tout en présentant les critères»
Pour Meziane Ighil, il faudra que chaque partie fasse son travail. Il ne faut surtout pas faire dans le bricolage. Pour faire le choix, il faut prendre l’avis des experts. Mais comme dira Ighil : «Si on avait une DTN, c’est elle qui aurait proposé un sélectionneur en donnant les critères de son choix. Je ne parle pas d’une DTN déplumée. Mais d’une DTN qui a toutes ses prérogatives.» Une façon de dire que la direction technique nationale doit jouer un grand rôle dans le choix du sélectionneur. Il ne faut pas se fier aux managers, mais plutôt faire un choix réfléchi et bien étudié.
«Je suis pour un staff local»
Si la nationalité du sélectionneur n’est pas vraiment importante aux yeux de Meziane Ighil, ce n’est pas le cas pour les membres qui constituent le staff technique de l’EN. Ighil explique : «Si la nationalité du sélectionneur n’est pas importante à mes yeux, je pense que le staff technique par contre doit être un staff local. Ceci dit, il ne faut pas faire des cadeaux, mais plutôt chercher dans les compétences.» En clair, un sélectionneur de grande qualité, qui peut gérer notre équipe nationale, avec toutes ses particularités et un staff technique local qui compte des Algériens, mais qui sont de grande qualité. Et surtout, faire les choix après les avoir étudiés sur tous les plans.
A. Z.
Medjahed : «Belmadi a le profil pour driver les Verts»
L’ancien entraîneur du RCK, du NAHD et de l’ASMO Nabil Medjahed, est partisan à l’idée de désigner un entraîneur local à la tête de la barre technique de l’équipe nationale pour succéder au Belge George Leekens. Selon lui, il y a des techniciens algériens très compétents qui sont capables de driver les Verts et remettre ainsi la sélection sur les bons rails, à l’image de Belmadi. «Il y a de la compétence locale. Djamel Belmadi, pour ne citer que celui-là, semble avoir le profil pour driver notre sélection nationale. Il est diplômé, compétent et sérieux et je crois qu’il pourrait être l’homme de la situation, d’autant plus qu’il connaît très bien la mentalité des joueurs franco-algériens. Ça reste juste mon avis et le dernier mot revient au président de la Fédération algérienne de football Mohamed Raouraoua», dira-t-il.
«La stabilité est très importante»
Poursuivant sa déclaration, Nabil Medjahed ajoute que la stabilité est très importante au sein du staff technique de l’équipe nationale. «J’aimerais bien voir le nouveau sélectionneur national rester à la tête de la barre technique des Verts pour plus de trois ans, comme c’est le cas dans plusieurs sélections européennes. La stabilité est un facteur très important pour que notre équipe nationale réalise de bons résultats à l’avenir», a-t-il indiqué.
A. S.
Zeghdoud : «L’EN a besoin d’un coach compétent»
«Personnellement, comme tous les Algériens, j’ai été très déçu que notre EN ait été éliminée au premier tour de la CAN. Je pense que cette sortie prématurée de la phase finale de coupe d’Afrique va permettre aux responsables du football algérien à bien analyser les causes de cette débâcle et à prendre les décisions qui s’imposent. Cela dit, après que notre team national a mal négocié les deux premières rencontres qualificatives au Mondial de Russie qu’elle a disputées le mois passé contre le Cameroun et le Nigeria, son élimination précoce de la phase finale de la CAN 2017 était un peu attendue», nous a déclaré le coach de l’USB, Mounir Zeghdoud, avant de nous dire : «Cela dit, je pense pour que les actuels joueurs qui font partie de l’EN sont tous de qualité mais ils ont besoin d’un coach compétent, et ce, qu’il soit Algérien ou étranger sauf qu’il faut qu’il ait fait ses preuves.»
R. G.
Merzekane : «Le mal est bien plus profond»
Pour l’ex-entraîneur du NAHD et du CB Mila, le problème de l’équipe nationale n’est pas une question de l’identité de l’entraîneur, mais bien plus profond. Pour Chaâbane Merzekane, les clubs doivent se projeter sur la formation qui demeure la seule et unique sortie de secours pour le football national : «Ecoutez, lorsque vous me demandez si je préconise un entraîneur local, ou bien un coach étranger, comme si le problème de l’EN réside dans ce registre. Or, le mal est bien plus profond. Pour moi, il n’est pas nécessaire, ni obligatoire à jouer les premiers rôles, et chercher à se qualifier systématiquement à la Coupe du monde, alors que les bases ne sont pas solides. Depuis une quinzaine d’années, on est en train de se contenter de ramener des joueurs formés en France, les intégrer à l’équipe nationale, et attendre qu’on ait des résultats. Cette politique est révolue, elle a échoué, il faut passer à autre chose. Je pense que notre salut viendra uniquement de la formation, il est inconcevable de parler de championnat professionnel sans centres de formation. Chez nos voisins tunisiens par exemple, aucun club n’est autorisé à jouer en Ligue 1, sans qu’il ait un centre de formation. Chez nous, c’est la débandade totale, aucun club ne forme, et on veut avoir une équipe nationale à la hauteur. Il faudrait peut-être faire l’impasse durant cinq à six ans, ne pas se donner des objectifs pour l’EN, tout en se concentrant en parallèle sur la formation au niveau des clubs, à partir de là, on pourra récolter les fruits au niveau des équipes nationales. Peu importe donc qui sera nommé à la place de Leekens, le plus urgent est de revoir les fondations du football national.»
M. A.