Une semaine après le match devant l’Iran, Saphir Taïder qui n’avait pas joué la moindre minute et qui a quitté le banc de touche cinq minutes avant la fin de la rencontre rompt le silence dans un entretien qu’il nous a accordé. Il apporte sa version des faits et se défend quant aux propos de l’entraîneur national qui a affirmé qu’il est en méforme physiquement, la raison qu’il l’avait poussé à ne pas le faire jouer. L’ancien joueur de Bologne explique aussi qu’aucun test physique n’a été effectué lors du stage et de ce fait, impossible de porter un jugement quant à son état physique. Saphir Taïder précise enfin que jamais il n’a demandé de ne plus être rappelé, mais qu’il aurait néanmoins souhaité avoir un minimum de considération de la part de Rabah Madjer. Entretien.
Sur les ondes de la Radio nationale, Rabah Madjer a affirmé que vous étiez en méforme et c’est ce qui l’a poussé à ne pas vous faire jouer, affirmant même que le GPS ne pouvait pas se tromper, un commentaire…
Je ne sais pas si les gens ont pu remarquer, mais habituellement, que ce soit en club ou en équipe nationale, je ne suis pas du genre à parler beaucoup. Mes différentes expériences à travers les différents médias m’ont appris que souvent il valait mieux rester discret. Mais là, je suis bien obligé d’expliquer certaines choses d’autant plus que ça me concerne directement…
Oui, allez y…
Pour ce qui est de ma forme physique, je me sens bien hamdoulah. Je tiens à vous préciser que je sors de six semaines de stage de préparation avec mon nouveau club l’Impact de Montréal. Et avant cela, j’étais en pleine saison avec Bologne. J’ai joué cinq matchs amicaux et trois matchs officiels en MLS (3X90’), et Dieu merci, jusque-là, je n’ai eu aucun pépin physique. Maintenant pour revenir au GPS, je dis que nous l’avons utilisé durant le stage en équipe nationale une seule et unique fois durant une séance légère (NDLR : taureau et un jeu réduit sur 1/4 de terrain, un 11 contre 11) qui a duré 15 à 20 minutes maximum.
Vous voulez dire que c’est trop court pour en tirer des conclusions…
En toute sincérité, je n arrives pas trop à comprendre comment on peut en déduire que ma forme physique n’était pas bonne…
Pourriez-vous être plus explicite ?
Dans ce genre de jeu, les courses sont réduites et limitées par la distance du terrain, il est donc impossible de juger une forme physique de cette manière. Le GPS n’est pas une science exacte, et puis c’est du football, et non un sport comme l’athlétisme. Alors, oui, bien sûr, il faut avoir une base physique pour jouer au foot surtout dans le haut niveau, mais on peut détecter et connaître la forme physique d’un joueur en effectuant différents tests…
Par exemple ?
Il y a le test Vameval, le test de Brue, le test demi-Cooper et le test navette par exemple, ça permet de calculer la vitesse maximale aérobic de l’athlète. Pour que les gens comprennent, le test de Brue peut-être effectué derrière un vélo. Le test Navette est intéressant car il y a beaucoup de changements directionnels. Le Vameval, c’est à l’aide d’un CD et le demi-Cooper autour d’une piste pour vous permettre d’être plus précis. On peut aussi prélever un peu de sang au niveau de l’oreille pour Contrôler le lactate. Tous ces tests se font sous forme de courses sur tapis ou sur piste navette sur terrain, ou une course derrière un vélo. J’ai joué en Italie pendant sept ans, et croyez-moi les tests je connais ça. En plus, avec le GPS, vous ne pouvez pas savoir où en est l’athlète physiquement, sa marge de progression ou et comment il doit travailler, etc. Donc, faux nous n’avons pas fait de tests à Sidi Moussa, mais seulement mis un GPS lors de quelques minutes lors d’une séance d’entraînement…
Vous dites donc un GPS lors d’une séance pendant quelques minutes c’est insuffisant pour vous juger physiquement…
Parlons de GPS, celui-ci je l’ai tous les jours de l’année et là c’est intéressant d’avoir certaines données hebdomadaires ou mensuelles pour justement savoir vers quel travail doit-on se diriger. Donc, je le répète encore une fois, mettre un GPS pendant 20 minutes, il est impossible scientifiquement de connaître l’état physique du joueur. Le GPS sert à calculer la distance en mètre à l’entraînement ainsi que les courses et la vitesse, mais rien de plus. Je précise aussi qu’on n’avait pas de cardio mais juste un GPS, donc impossible de calculer la forme physique car le pouls n’était pas calculé, et donc on ne peut pas connaître le temps de récupération de l’athlète. En plus, je venais d’enchaîner des matchs comme déjà précisé…
Donc, vous insistez pour dire que vous étiez en forme…
Tout à fait, et cela pour la simple raison que je suis compétitif. Juste avant d’arriver en sélection le 18 mars dernier, j’ai été élu dans l’équipe type du MLS. Voilà pourquoi je ne comprends pas les propos du coach concernant mon état physique. Franchement, j’aurais préféré entendre autre chose, mais bon...
On vous a vu justement demander des explications au coach par rapport à votre non titularisation face à l’Iran la veille du match, vous a-t-il convaincu ?
Nous avons eu une discussion, ce qui est normal, avec beaucoup de respect mutuel. Je lui ai dit que je respectais ses choix, et que par rapport à cela je n’avais aucun problème, car il avait raison d’essayer de nouveaux joueurs, du fait que les matchs amicaux sont faits pour ça. Par contre, je lui ai dit aussi que je ne comprenais pas son choix de me faire venir de très loin pour que je reste sur le banc. J’aurais aimé avoir un minimum de considération. Cela fait plus de 5 ans que je suis en équipe nationale et j’en suis à ma 50e sélection. Il m’a répondu que je n’étais pas au top de ma forme. J’ai précisé que je me sentais bien. D’ailleurs, je lui ai même demandé s’il regardait mes matchs en MLS, parce que généralement quand on convoque un joueur c’est qu’on le connaît. Mais bon, il n’a pas voulu m’en dire plus. J’étais triste forcement et déçu, une boule au ventre, je ne comprenais pas, et notre discussion s’est terminée là-dessus.
Est-il vrai que le coach vous a signifié qu'il allait vous faire jouer contre l’Iran?
Apres le match contre la Tanzanie, le coach est venu me voir durant le repas du soir et m’a dit : Saphir prépare-toi bien pour le match contre l’Iran. Comme tout le monde le sait il n’y avait plus aucun milieu de terrain à l’exception de Boukhanchouche que je félicite d’ailleurs pour ses premières sélections. Donc voilà, pour moi j’allais forcément jouer, sinon pourquoi me tenir un tel discours ?
Vous avez décidé de quitter le banc de touche cinq minutes avant la fin du match, le coach a caractérisé votre comportement d’inadmissible ?
Je respecte sa façon de voir les choses, mais permettez-moi de vous demander de vous mettre à ma place à ce moment bien précis ne serait-ce qu’une minute. J’ai près de 50 sélections et cela fait plus de 5 ans que je suis en EN. J’ai loupé un rassemblement pour cause de blessure, mais j’ai surtout vécu des moments inoubliables avec cette sélection, certainement les meilleurs moments de ma carrière. Ma mère a eu les larmes aux yeux en me voyant porter le maillot de l’Algérie. C’est toujours une fierté, un honneur et un plaisir pour moi de venir en équipe nationale défendre les couleurs de mon pays. Je me rappelle du stade Mustapha Tchaker de Blida plein à craquer 10 h avant le match!! Et boom du jour au lendemain, tu arrives en sélection et tu ne te sens pas considéré…
On vous a senti à la fois déçu mais aussi frustré…
Oui, parce que tu penses que tu vas jouer, et au final tu ne joues pas la moindre minute. Tu fais 22h de voyage pour 0 minute de jeu. Du banc tu vois ton équipe face à l’Iran que tu penses pouvoir aider, parce que tu sais pertinemment que tu peux l’aider sur le terrain mais tu ne peux malheureusement rien faire. T’as presque envie de rentrer de force sur le terrain mais tu restes impuissant. Tu t’échauffes pendant 40 minutes à Graz après s’être échauffé pendant 45 minutes contre la Tanzanie, et au final tu comprends que tu ne vas pas rentrer surtout que ton équipe perd. La frustration monte forcément. Je suis parti m’assoir sur le banc 2 minutes, et à ce moment-là, croyez-moi, je ne pouvais pas contenir ma frustration, alors par respect à mes coéquipiers, au coach et au staff, j’ai préféré rentrer aux vestiaires, lâcher cette frustration à l’écart de tout le monde afin de ne pas perturber l’équipe. J’ai voulu ne pas manquer de respect à personne. D’ailleurs, je m’excuse si j’ai enfoncé qui que ce soit mais j’ai fait ça pour ne pas perturber l’équipe. Croyez-moi, je préfère être sur le banc et gagner 4 à 0 qu’être titulaire et gagner 1 à 0. L’Algérie n’appartient à personne mais à 40 millions d’Algériens. On est tous petits face au drapeau. J’aime mon pays et jouer avec ce maillot est la plus belle chose qui me soit arrivée.
Est-il vrai que vous avez demandé à ne plus être rappelé en équipe nationale ?
Lors de ma discussion avec le coach, je lui ai dit que je ne comprenais pas pourquoi il m’avait fait venir de si loin pour ne pas me considérer surtout que c’était des matchs amicaux. Je lui ai demandé où était l’intérêt ? Mais jamais et à aucun moment je lui ai dit que je ne reviendrai plus en équipe nationale. Jamais je ne me permettrai ça. C’est tellement un honneur et une fierté pour moi de défendre les couleurs de mon pays que j’ai envie d’en profiter le plus longtemps possible, c’est un pur plaisir.
Revenons un peu à votre choix de carrière. Pourquoi avoir choisi le MLS alors que vous n’avez que 26 ans ?
La MLS est un championnat qui ne cesse de grandir. Ce dernier est très structuré et sérieux. Les stades sont pleins, les pelouses de qualité, la ligue est très solide, les infrastructures sont dignes des grands clubs et surtout il y a de très bons joueurs ici. Les Etats- Unis sont en avance sur tout, et quand ils décident quelque chose, ils le font en grand. Le coach, le staff et le président me voulaient absolument. C’est un staff de qualité et reconnu en Europe. Désormais, le football n’a plus de frontières. J’avais vraiment envie de voir autre chose après sept saisons en Serie A, et je suis vraiment content d’avoir fait ce choix. Beaucoup de joueur aimeraient jouer en MLS.
A Montréal vous ne devez certainement pas être dépaysé avec la grande communauté algérienne qui se trouve sur place…
Franchement, c’est une fierté pour moi de représenter mon pays à Montréal. J’ai pu constater en effet que la communauté algérienne à Montréal est énorme, d’ailleurs à chaque fois qu’on joue il y a beaucoup de drapeaux algériens dans le stade. Ici, mes compatriotes m’arrêtent tous les jours dans la rue, ils sont vraiment contents de me voir, et mon club est ravi qu’il y a autant de supporters algériens qui nous suivent désormais.
- H. A.
Qui a lu ses résultats GPS ?
Suite et pas fin de ce qu’on peut appeler l’affaire Taïder. Madjer a donné des réponses en faisant savoir que le joueur n’était pas en forme et il s’est fié aux résultats du GPS. Cependant, on se demande bien qui a pu lire les résultats.
Saphir Taïder a fait parler de lui au cours des derniers jours en raison du fait qu’il ait quitté le banc de touche avant la fin de la rencontre face à la formation iranienne. Quelques jours plus tard, c’était au tour de Rabah Madjer d’aborder le sujet et de dire que le joueur n’était pas en forme et que les résultats des tests physiques n’avaient pas été concluants. Cependant, c’est là qu’on se pose des questions par rapport à cette histoire. En effet, on se demande bien qui a pu lire les résultats de Taïder. Au cours du dernier stage, le sélectionneur national avait fait appel au préparateur physique de la DTN dont on ne connaît pas vraiment le parcours et qui a assuré la préparation avec les joueurs. Ce dernier a-t-il lu les résultats de Taïder pour ensuite les communiquer au coach national ? Est-ce un membre du staff de Madjer qui l’a lu ou bien est-ce le coach en personne qui l’a fait ? Si tel est le cas, ses calculs sont faux car l’entraîneur des Verts n’a pas de diplôme de préparateur physique, mais ce n’est seulement cette histoire qui intrigue.
15 minutes sont-elles suffisantes pour juger le joueur ?
Autre paramètre intéressant, c’est le fait que le joueur ait été déclaré en méforme après 15 minutes seulement. Ce laps de temps très court peut-il être suffisant pour tester le joueur et avoir une idée de sa forme physique ? D’après certains joueurs qui ont joué au haut niveau, il faut plus d’une semaine pour avoir des résultats. De plus, Taïder n’a pas chômé au cours des dernières semaines puisqu’il a fait toute une préparation avec son équipe, L’impact Montréal à Miami. En attendant peut-être une réponse, le joueur et dans l’entretien ci-dessous donne des éléments de réponse.
- Z.