MCA-Bencheikh : «Dans 5 ans, 95% de l’équipe sortira du club, comme au Barça»

Grace à sa technique, sa vision du jeu, «Alilou», comme aiment l\'appeler les supporters du doyen des clubs algériens, est devenu l’icône des jeunes. Excellent meneur de jeu, il a été élu 3e meilleur joueur africain de tous les temps. C’est le spécialiste du dribble et des petits ponts. Madjid Chettali, l’ancien sélectionneur de Tunisie, a dit de lui : «C’est un jongleur de cirque.» Cette icône s’est reconvertie en entraîneur et s’occupe maintenant de la formation au Mouloudia. Invité par Competition, ce grand homme s’est livré au jeu des questions-réponses sans détour. Entretien.

- Avant toute chose, on aimerait connaître le rôle de Bencheikh avec les jeunes catégories… 

- Cette année, il faut savoir que j’ai débuté ma mission en retard. Ce fut en août dernier. Je suis rentré en urgence, on m’avait appelé pour prendre les catégories jeunes. Mes conditions étaient simples : l’éducation et la formation. On a accepté ma requête, et donc j’ai dit oui pour relever le challenge.

- En cette période précise, au Mouloudia d’Alger, c’était la grosse turbulence, avec Eddir Loungar et l’ancien CA… 
- Moi, je ne me prends pas la tête par ce genre de situation. Si j’ai accepté la mission, ce n’était certainement pas pour X ou Y. Mais plutôt pour le MCA. D’ailleurs, quand l’association de Derriche s’est dissoute, j’ai fait savoir aux anciens que, moi, je marche seul, moi c’est le Mouloudia. Je ne marche pas dans les clans. Pour moi, seul l’Etat pouvait faire quelque chose et Hamdoulah, la décision a été prise pour que Sonatrach revienne dans les affaires du MCA.

- Et puis, Sonatrach est de retour. Ne croyez-vous pas que la réforme, à votre époque, avait cassé le club avec la fameuse loi de 28 ans ?

- C’est vrai, la réforme de Sonatrach a cassé  le Doyen, à cette époque-là, on nous a stoppés net dans notre élan, on était sur une belle lancée, on ne cessait de gagner des titres. Bachi, à 28 ans, on lui a dit stop, Betrouni, on lui a dit stop aussi, il est allé signer à l’USMA. Au MCA, il a arrêté, mais rien ne l’a empêché de jouer pour les Rouge et Noir. C’était voulu, ils ont voulu casser cette équipe qui écrasait tout sur son passage. Ils ont instauré une loi qui s’est appliquée seulement au Mouloudia.

- En revenant dans les affaires du MCA, la Sonatrach a visé la formation comme un grand projet, qu’en dites-vous ?

- Effectivement, les responsables de la Sonatrach veulent que l’équipe fanion joue les premiers rôles, c’est légitime, et en parallèle, créer un centre de formation qui est la priorité. Incha Allah, tout se fera dans les meilleurs délais.

- La Sonatrach attend d’avoir les papiers du lot de terrain de Zéralda pour entamer le travail…

- Personnellement, je n’y crois pas trop. Moi, je crois que Sonatrach a les moyens d’acheter un terrain. D’ailleurs, ce terrain de Zéralda est de 3 hectares, il ne suffira pas ; il faut acheter un terrain plus vaste.

- On imagine que vous avez parlé de cette requête au président Amrouche, non ? 
- Effectivement, on a discuté de ce point et, normalement, ils vont acheter un terrain. Mon souhait, c’est que Sonatrach achète un terrain de 5 hectares au moins. Il ne faut pas oublier qu’on a les cadets, les espoirs, et les minimes. Chaque catégorie devrait avoir deux terrains. Les espoirs s’entraînent à Draria, mais pour les autres on a souffert. Les minimes, cadets et juniors, le vendredi, trouvent du mal à travailler. Il faut diviser le terrain pour permettre à tout le monde de s’entraîner. Quand vous savez que les juniors et les cadets comptent 37 joueurs, plus les minimes, 30 joueurs, sur un seul terrain, ce n’est pas facile.

- En évoquant les jeunes, il se dit qu’au Mouloudia, le piston fait la loi, allez-vous combattre ce fléau ?

- La meilleure réponse que je puisse donner, c’est à vous d’aller enquêter, je ne peux pas parler des années passées. J’ai fait le nettoyage et je continue de le faire. Doucement, on finira le ménage. Il restera 21 joueurs, pas plus, si je reste bien sûr le DTS. Et ils signeront des licences.

- Vous voulez faire comme l’académie du Paradou ?

- Zetchi est un ami, il mérite d’être le président de la FAF. Il a acheté avec son propre argent un terrain de 3 hectares. On est prêts à collaborer avec eux. Leurs joueurs et les nôtres sont bons. J’espère qu’il y aura cette collaboration pour qu’ils viennent chez nous. Cela dit, je pense que le MCA mérite avec Sonatrach deux fois plus. 

- Comment jugez-vous le niveau de jeu de vos jeunes joueurs ?

- Nos joueurs ont tendance à se compliquer la vie sur un terrain. Ils manquent d’intelligence. Etre un grand joueur, c’est un don avant tout, mais il faut une école pour le développer. Malheureusement, il n’y a plus de grands entraîneurs dans les catégories jeunes. Il faut faire appel aux anciens grands joueurs et quelques-uns sortis de l’ISTS. Le jeune joueur a besoin qu’on lui montre sur le terrain pas sur le papier.

- En quelque sorte, ils n’ont pas l’œil comme vous, qui étiez derrière la venue de Saïfi au MCA… 
- Moi, quand je vois un jeune, je sais très vite si c’est un grand ou pas. Je le vois dans ses contrôles du ballon, son toucher de ballon et comment il se comporte sur le terrain. On a des joueurs cadets, je dirais une douzaine, qui sont bons. Si 7 d’entre eux deviennent de grands joueurs, on aura réussi notre mission. Une fois, j’ai vu un junior entrer en cours de jeu, j’ai vite détecté qu’il était très bon et depuis, il est avec les espoirs.

- Peut-on avoir le nombre et les noms de ces graines de stars ?

- Je ne donnerai pas de nom, mais ce que je peux dire, c’est qu’il y a plus de 13 joueurs. Il y en a 14 parmi les cadets. Ils signeront des contrats de 4 ans.

- Pourquoi 4 ans seulement ?

- C’est simple, un cadet de 17 ans, arrivé à 19 ans, il devra jouer avec les seniors. Malheureusement, chez nous, on ne donne pas leur chance aux jeunes. En Europe, par contre, un bon joueur qui peut assurer en senior et qui est jeune, joue avec l’équipe fanion. Un jeune coach qui correspond peu importe ce qu’il a comme bagage, on lui confie la mission.

- Est-ce qu’on verra dans les cadets du MCA des Becheikh, des Betrouni et autres grands joueurs dans les prochaines années?

- Dans les prochaines années, vous ne verrez pas des Bencheikh, des 
Betrouni, des Bachi ou Bousri ou encore Draoui, que Dieu ait son âme. Ce n’est pas parce qu’on est uniques, mais on a grandi avec nos qualités de joueurs sous l’œil bienveillant d’entraîneurs de qualité et de dirigeants qui sont des pères de famille, des éducateurs pour préciser. Et c’est ce qui nous a permis d’avancer dans le bon sens. Et si ça continue comme ça dans le jeu algérien, vous ne verrez pas ces hommes que vous avez cités. En même temps, la pâte, on l’a, les enfants que je compte monter en juniors et en juniors A, sans oublier quelques joueurs cadets qui joueront en espoirs. Alors que le reste jouera en juniors B. Ça permet à ceux qui ne sont pas convoqués de jouer.
- Quels sont vos objectifs après avoir pris les jeunes sous votre aile ? 
- Mes objectifs sont simples, Sonatrach opte pour un centre de formation, si je reste, je ferai de mon mieux pour faire une vraie formation et, dans 5 ans, l’équipe fanion sera formée à 95% d’enfants de ce club, comme on le voit au Barca. Nous, on ramène des joueurs de partout avec des sommes colossales et dans le onze rentrant il n’y a aucun enfant du club.  J’ambitionne de rompre avec ça. 

A. Z./M. Z./I. Z.

 

- «Au MCA, il y a une douzaine de cadets qui sont bons»

- «Le jeune joueur a besoin qu’on lui montre sur le terrain, pas sur le papier»

- «Il n’y aura plus de Betrouni, Bachi, Draoui parce qu’il n’y a plus les entraîneurs qui les ont formés»

La suite de l’entretien dans notre prochaine édition

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