Bencheïkh : «Comment j’ai raté le grand FC Nantes»

- «J’avais tout conclu, je suis rentré à Alger sur ordre de Boumediene !» - «Le président a usé de tout son poids pour que je joue la finale retour contre Hafia Conakry» - «L’Atletico de Madrid me voulait, hélas, j’étais en service national» - «Certains disaient que je gardais trop le ballon, heureusement que Messi ne joue pas en Algérie…»

- En 2010, le Doyen des clubs algériens a été sacré champion et il y avait ses enfants en nombre impressionnant… 

- Effectivement, il y avait les Koudri, les Boudbouda et d’autres, mais qui sont partis, car on n’a pas opté pour la formation et donc, aujourd’hui, les enfants du MCA font les beaux jours d’autres clubs. Qu’on se fixe un objectif de 2013 à 2018 pour avoir 11 joueurs dans l’effectif. Même s’ils ne seront pas tous titulaires, ils seront au moins sur la même longueur que vous. Les enfants du club ont gagné le titre de champion et ils sont partis, c’est la gestion qui ne va pas.

- Mais, les joueurs optent pour le plus offrant et c’est ce qui fait que le foot a changé, non ?

- Le foot algérien a changé complètement. Pourquoi ? Il y a d’autres raisons et je ne veux pas entrer dans les détails, car c’est un autre débat.

- Que pensez-vous des seniors du MCA cette saison ? 
- J’ai suivi un match contre l’ASO et quand le penalty a été sifflé, je n’ai pas voulu continuer à voir le match. Ça ne m’intéresse pas, tant qu’il n’y a pas grand-chose à voir.

- Mais, en qualité de DTS, vous devriez les suivre, non ?

- Je suis DTS dans les catégories jeunes et je n’ai rien à avoir avec les seniors. Laissons les travailler en paix. On ne va pas chambouler l’équipe à quelques mois seulement de la fin de la saison. A partir de la saison prochaine on verra. Laissons-les faire ce qu’il faut, car ils peuvent réaliser quelque chose, alors laissons les à 
l’aise tout en leur souhaitant de faire un beau parcours et aller le plus loin possible en coupe d’Algérie.

- En parlant du foot algérien, plongeons dans vos souvenirs et parlons de votre premier match… 
- Je venais de jouer mon premier match avec les cadets quand on me demanda de jouer en seniors. Aujourd’hui, on ne peut pas demander à un cadet de jouer en seniors. Il faut qu’il travaille sans relâche et pour réussir à le faire, il faut un centre de formation. On a de bons cadets, qui je pense pourront jouer de temps en temps. Qu’ils jouent 25 minutes, mais pas avec cette mentalité qui sévit dans les clubs, qui est un peu spéciale dans tous les domaines.

- Lors de la finale de la Coupe d’Afrique, vous aviez reçu un carton rouge, mais vous aviez tout de même pris part au match retour. Lors de la dernière CAN, le joueur burkinabé, Pitroipa, a vécu la même chose que vous…

- Je ne crois pas que le joueur que vous venez de citer ait vécu le même contexte que moi. Pitroipa a été exclu à cause d’une erreur d’arbitrage, après quand ils ont vérifié, ils ont rectifié le tir. Par contre, en ce qui me concerne, c’était loin d’être une erreur, c’était prémédité. Ils m’ont mis dans la cible comme quoi ce joueur devait sortir, il ne fallait pas qu’il reste sur le terrain pour les raisons que tout le monde connaît, donc j’étais ciblé. Pendant ce temps-là, après ma sortie, il y avait l’autorité, il y avait Boumediène que Dieu ait son âme qui avait usé de tout son poids pour que je puisse jouer la manche retour, la suite tout le monde la connaît.

- Parlons maintenant, de votre transfert avorté au FC Nantes. Qu’en est-il vraiment de cette affaire ?

- Vous savez, je n’ai jamais cité les clubs qui m’avaient contacté à cette époque-là. J’aurais pu dire que le Real ou tel autre club me voulait alors qu’il n’y avait rien du tout. L’Atletico de Madrid était intéressé par mes services, hélas, j’étais en service national et je ne pouvais répondre par l’affirmative. Quand j’ai fini mon service militaire, deux autres équipes se sont présentées à moi. Le contact le plus sérieux émanait du FC Nantes, qui était la meilleure équipe de France. On a parlé, puis j’ai discuté avec Drif chez lui. J’ai pris ensuite l’avion pour Paris. J’ai joué avec eux deux matches, puis je suis parti à Paris pour deux jours de congé. Une voiture m’a arrêté, une R30, deux personnes sont descendues, m’ont dit de monter et de ne pas avoir peur. Sur le coup, j’ai compris, on m’a emmené au consulat, j’ai pris un café, ils sont allés chercher mes sacs à l’hôtel Normandie. On m’a dit que sur ordre du Président, je devais rentrer sur Alger en urgence. Je me suis exécuté, j’ai trouvé deux personnes à mon attente qui m’ont emmené et m’ont dit que le Président voulait que je choisisse un logement. J’ai choisi un appartement à Chéraga. Par la suite je suis rentré en stage avec l’EN. J’avais je crois El Hadi Khediri, que Dieu ait son âme, qui m’avait dit : «Ne cherches pas à sortir d’Algérie, tu es fiché aux frontières.»

- Vous êtes restés combien de temps interdit de sortie ?

- Si je me souviens bien quatre ans.

- Par la suite vous avez eu d’autres contacts ?

- J’avais beaucoup de contacts à l’étranger, mais je ne pouvais quitter le territoire. J’ai essayé de sortir mais sans succès. C’était un ordre du Président, j’avais une dette envers le pays.

- Vous étiez l’un des rares joueurs à ramener 50 000 supporters au stade, alors qu’aujourd’hui 25 ne ramènent pas 10 000. Comment expliquez-vous cela ?

- Le niveau du football à cette époque était très élevé, il y avait une pléthore de joueurs de qualité. Personnellement, c’est grâce à mes équipiers et les gens qui étaient autour de moi qui faisaient que je sortais un peu du lot. Il y avait du spectacle et du beau football. Certains que je qualifie de jaloux disaient que je gardais trop le ballon. Dernièrement, un ancien entraîneur m’a dit la même chose lors du match de l’Unesco organisé  par Madjer. Je lui ai rétorqué : «Heureuse- ment que Messi ne joue pas en Algérie, sinon vous lui auriez fait la même remarque.» Le plus important pour moi à présent, c’est quand je marche dans la rue, on m’accoste pour me dire merci beaucoup, vous nous avez offert du beau spectacle et ça me rend très fier.

- Avez-vous joué en minimes à l’USMA ?

- Effectivement, j’ai joué pendant six mois en minimes à l’USMA, après j’ai décidé d’arrêter.

- Pourquoi ?

- L’environnement du club ne m’a pas plu.

- Ou c’est parce que vous êtes un fan du Mouloudia?

- Non ça n’a rien à voir, à cette époque là, on vivait à La Casbah, on était tous mélangés et partagés entre le Mouloudia et l’USMA. Quand j’avais rejoint l’USMA, je n’ai pas été enchanté par l’environnement. Alors, quand j’ai rejoint le Doyen, j’ai trouvé un tout autre environnement qui correspondait mieux à mes attentes.

- N’empêche que vous êtes un supporter du Mouloudia ?

- Vous savez, quand j’étais petit, j’aimais les deux équipes, mais après, quand j’ai rejoint les Vert et Rouge, c’est bon. Le Doyen, c’est autre chose.

- En 1985, le Mouloudia était en D2 comment avez-vous vécu cet épisode ?

- Je me souviens, on avait fait une année en D2, on est remontés, puis je suis allé jouer une saison à Chéraga. J’en garde un bon souvenir  car lors de notre rétrogradation, on avait perdu face à Guelma. La vermine m’a accusé d’avoir vendu le match. Je leur ai dit s’il y a un homme parmi vous qu’il vienne citer des noms. C’est ce que j’aurais fait. Ils ont dit que Bencheikh avait sorti un camion Sonacome grâce à l’ancien dirigeant du CRB, Hechaïchi. J’ai sorti un camion je l’ai revendu, deux mois après, on a joué Guelma. Vous vous rendez compte, après deux mois je vends un match, c’est absurde.

- Il y a une photo où on voit Kouici accroché à votre maillot, sur le point de tomber, qui a fait beaucoup de bruit. Que s’est-il passé sur cette action ?

- Le ballon est venu côté poteau de corner, je l’ai couvert, Kouici voulait me jouer un vilain tour, il allait tomber, il s’est accroché à moi, voilà tout.

- On dit que ce dernier était votre pote, c’est vrai ?

- Exact, Mustapha est un très bon ami, tout comme Chaâbane Merzekane et plein d’autres joueurs. Cependant quand on s’affrontait en clubs, chacun défendait son équipe.

A. Z./M. Z./I. Z.

 

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