Kourichi : «Halilhodzic a décomplexé les Verts»

C’est un Nordine Kourichi très fatigué par 42 jours de stage non stop avec l’équipe nationale, mais qui affichait un regard serein et un sourire qui traduit le sentiment du devoir accompli que nous avons rencontré. L’adjoint de Vahid Halilhodzic, qui habituellement ne donne pas d’interviews, devoir de réserve oblige, a accepté de revenir, pour les lecteurs de Compétition, sur le parcours de l’équipe nationale durant l’année écoulée, à travers le prisme qui est le sien, celui d’un technicien qui vit à l’intérieur de ce groupe Algérie. Un Nordine Kourichi qui s’exprime notamment sur la vie de ce groupe et nous parle aussi des futures échéances qui attendent les Verts.

- Nordine Kourichi, vous êtes présent à l’occasion d’un match gala entre l’équipe nationale des années 80 à Tremblay. Cela doit vous faire plaisir de retrouver vos anciens coéquipiers.

- C’est toujours un plaisir de retrouver mes anciens coéquipiers de l’équipe nationale. Des anciens joueurs avec qui j’ai participé à de belles histoires, qui en plus de me laisser de bons souvenirs et une grande nostalgie, ont marqué le football algérien. Entre autres les Coupes du monde 82 et 86. Quand je revois Belloumi, Fergani et les autres c’est toujours avec plaisir. D’autant plus lorsque c’est pour une cause humanitaire comme c’est le cas aujourd’hui, a fortiori, lorsqu’il s’agit d’enfants. C’est une grande fierté de participer à la solidarité nationale.

- Si vous le voulez bien Nordine, nous allons parler un peu de l’équipe nationale. Car depuis votre prise de fonction, on ne vous a entendu qu’une seule fois lors de la seule conférence de presse que vous aviez animée en juin 2012.

- C’est normal que je ne m’exprime pas dans les médias. Je suis tenu, de part ma fonction d’entraîneur adjoint de Vahid Halilhodzic, par un devoir de réserve. Dans notre staff, chacun a ses prérogatives et j’essaye d’exercer au mieux les miennes au service de mon pays et de l’équipe nationale. Tout ce que je peux vous dire c’est que cette équipe nationale vit bien.

- Peut-on dire, en faisant une métaphore que cette équipe d’Algérie a enfin trouvé son «régime moteur», son équilibre dans tous les domaines ?

- Cette équipe nationale n’a qu’un leitmotiv : le travail, encore le travail et toujours le travail pour atteindre ses objectifs. Je reviens de quasiment 42 jours de stage non stop avec des heures d’entraînement et trois matchs disputés et je peux vous dire que j’ai rarement vu dans une équipe de football, un tel état d’esprit, aussi bien lorsque j’étais joueur qu’entraîneur. Les résultats récents n’en sont que révélateurs.

-  Justement, quel est le secret de votre réussite ?

- Il n’y a pas de secret. Tout est une question de gestion, d’organisation et de préparation. L’équipe nationale a la chance d’avoir, au sommet de la pyramide, un président de fédération, Mohamed Raouraoua qui sait où il va, et qui met tous les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs assignés, à savoir la qualification à la Coupe du monde 2014. Il y a aussi un sélectionneur, Vahid Halilhodzic qui maîtrise totalement son sujet et qui obtient bien sûr des résultats. Un staff où chaque membre fait son travail et le fait bien. Et enfin, un groupe de joueurs talentueux, avec un superbe état d’esprit et qui adhère totalement à la méthode de travail de Vahid et du staff. C’est ça qui a fait la différence, selon moi.

- Ressentez-vous une forte adhésion des joueurs ?

- Honnêtement oui, et ça s’est vu sur le terrain. Même si face au Bénin, les conditions météo étaient meilleures, nos joueurs étaient conquérants et ont su remonter le score pour s’imposer à l’extérieur. Ce qui n’est pas courant depuis 20 ans en équipe nationale. Et que dire du match de Kigali où l’état du terrain et surtout la météo ont rendu les conditions très difficiles et nous avons su nous imposer. Tout ce groupe de joueurs veut aller en Coupe du monde, car ils ont conscience que disputer cette compétition est une aventure humaine fantastique. Ils savent aussi que tout le peuple attend cette qualification et ils feront tout pour l’obtenir.

- Justement, l’Algérie voyage mieux en Afrique noire aujourd’hui. Cela n’a pas toujours été le cas. Quelle en est la raison, selon vous ?

- Il y a deux raisons, selon moi. La principale c’est que l’équipe nationale actuelle est beaucoup mieux préparée physiquement, la preuve, c’est que nous avons tenu la distance à Kigali et à Pointe Noire sans problème. Et la seconde raison, c’est que ce groupe de joueurs a été vraiment décomplexé par le nouveau discours de Vahid qui ne leur demande pas d’aller jouer à l’extérieur pour ne pas perdre mais d’y aller pour gagner.

- L’échec à la CAN 2013 a-t-il aussi contribué à faire mûrir ce groupe ?

- J’ai envie de vous dire oui et non. Oui car un échec comme celui-là reste en travers de la gorge, vous fait grandir plus vite et vous montre vos faiblesses et l’étendue du travail qu’il reste à accomplir. Quelque part, la grinta de nos joueurs lors de ces 4 matchs post CAN vient sûrement de là. Mais d’un autre côté, le football a ses rasions que la raison ignore. Nous avions beaucoup travaillé pour réussir cette CAN, tous les observateurs ont salué notre jeu, mais il nous a manqué ce petit peu de réussite qui fait la différence. C’est comme ça le football. Ce n’est pas une science exacte c’est ce qui rend ce sport magnifique.

- Pensez-vous que le maintien du staff après la CAN ratée, a été aussi la clef de cette qualification au dernier tour ?

- C’est effectivement un bon choix du président. Un choix de la raison. C’est aussi un bon choix de Vahid qui a choisi de rester pour terminer les chantiers qu’il avait mis en place. La CAN a été un accident et même si c’est un échec, nous avons bien rebondi et nous avons confirmé que dans le football moderne, plus que les moyens, c’est la stabilité qui prime.

- Comment Vahid et vous allez gérer cette dernière étape, à savoir les barrages ?

- Nous allons les préparer comme il se doit. Nous avons un match amical en août et le dernier match des poules face au Mali, nous allons les utiliser du mieux possible. Nous allons nous renforcer en qualité tout en ayant des certitudes techniques et tactiques. Le 14 août ça sera un match amical mais en septembre face au Mali, ça sera un match officiel que nous devons remporter. Ne serait-ce que pour prendre notre revanche par rapport au match aller où nous avons été battus à Ouagadougou, mais aussi parce que nous aurons le grand bonheur de jouer devant notre public. Le but étant d’arriver aux matchs de barrage dans les meilleures conditions pour essayer d’accrocher une place pour le Mondial.

- Ce match barrage en aller-retour s’annonce déjà difficile. Êtes-vous inquiet ?

- Inquiet, non. Mais tant que le coup de sifflet final du match retour n’aura pas retenti, ne crions pas victoire. Nous,  staff et joueurs, en avons conscience, ainsi que la fédération qui mettra tous les moyens à disposition. Nous aurons besoin que toute l’Algérie tire dans le même sens, de l’adhésion totale du peuple et bien sûr du soutien inconditionnel de notre douzième homme, les supporters, pour y arriver.

- Face au Rwanda, il y avait Halliche, Djebbour, Ghilas et Soudani sur le banc. Mais, plutôt que de faire la tête, ils encourageaient leurs coéquipiers. Comment avez-vous réussi la performance de gérer ces égos ?

- Comme je vous l’ai dit, il y a une adhésion totale des joueurs au projet et à la méthodologie de travail de Vahid Halilhodzic. Dès le début du stage, nous leur avons dit que même si l’on ne peut faire jouer que 11 joueurs sur le terrain, plus trois remplaçants si besoin est, le véritable titulaire en équipe nationale c’est le groupe. Pour aller au Mondial, nous avons besoin de tous les éléments et tout le monde doit mettre la main à la pâte. Et ce discours est très bien passé, la preuve, si l’on compte le stage des locaux, nous avons fait 42 jours de stage en fin de saison, très éprouvant, certes, mais sans aucun heurt. Je tiens à en féliciter tous les joueurs.

- Vous représentez la première génération des «fils d’immigrés» qui ont choisi de jouer pour l’Algérie. Lorsque 30 ans après votre première sélection, vous voyez la troisième génération de joueurs, les petits fils d’immigrés, venir en E.N avec autant de fougue, que ressentez-vous ?

- C’est un grand sentiment de fierté qui m’envahi à chaque fois que je les vois arriver en stage. Je me dis que ma génération, même si elle est née et a grandi en France, a su transmettre cet amour de l’Algérie que nos parents venus du pays pour y travailler nous avaient transmis. En 82, c’était moi le jeune et j’étais animé, de part l’éducation de mes parents, d’un patriotisme et d’une envie de servir mon pays et de porter ce maillot. Aujourd’hui, je peux témoigner que ces jeunes sont animés du même patriotisme et de la même envie. Ils ont tous fait le choix de l’Algérie. Il y a une totale synergie entre ces jeunes-là et leurs compatriotes qui sont nés et qui évoluent ou ont évolué au pays. Ce n’est pas un choix par défaut comme certains le disent car certains de nos jeunes ont leur place dans l’équipe de France actuelle. Je suis énormément fier d’eux. Cette génération est décomplexée vis-à-vis de sa double culture et de ses origines.

- Dernière question, Kourichi est-il optimiste ?

- Très optimiste !

M. B.

 

- «L’EN actuelle est beaucoup mieux préparée physiquement»

 

- «La grinta de cette équipe vient de l’échec de la CAN 2013»

 

- «En septembre, nous devrons prendre notre revanche sur le Mali»

 

- «Pour aller au Brésil, nous aurons besoin de notre 12e homme»

 

- «On a la chance d’avoir un président comme Raouraoua»

 

 

 

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