Alain Giresse : « L’Algérie a beaucoup d’atouts, et on s’en méfie»

Après avoir assisté au tirage au sort à Malabo et visité les infrastructures à Mongomo, le sélectionneur du Sénégal Alain Giresse est rentré à Dakar avant-hier mercredi. Joint au téléphone par nos soins hier en matinée, l’entraîneur français nous parle de ce groupe C, mais aussi de cette équipe du Sénégal et de ses objectifs. Entretien.

Le Sénégal hérite du club C avec l’Algérie, le Ghana et l’Afrique du Sud ; d’abord votre avis sur ce groupe ?

C’est un groupe très relevé avec notamment deux équipes qui ont participé à la dernière Coupe du monde, en l’occurrence le Ghana et l’Algérie. Une Afrique du Sud qui a fait des qualifications tout à fait remarquables ; donc ça sera pour nous des adversaires qui seront de très haut niveau. En fait, un groupe difficile. 

Considérez-vous ce groupe comme étant celui de la mort ou c’est plutôt le groupe D, comme l’ont qualifié beaucoup d’observateurs ?

Vous savez, qualifier un groupe comme étant celui de la mort, c’est plus le jeu des observateurs. Moi je considère que cela n’est pas très important car quand on est de l’intérieur, on ne raisonne pas de la sorte. Moi, ce que je dis, c’est que nous sommes dans un groupe difficile et que nous serons confrontés à des sélections qui ne seront pas faciles à battre. 

Vous allez affronter le Ghana lors du premier match, pensez-vous que cette rencontre sera déterminante quant à la suite de votre parcours durant cette CAN ?

Elle sera importante, mais pas décisive. Ce que je veux dire, c’est que compte tenu de la valeur des trois équipes, je ne pense pas qu’une équipe battue lors du premier match sera totalement éliminée. Si le Ghana perd contre nous lors de la première rencontre, je ne pense pas que celui-ci abandonnera tout espoir de se qualifier pour le prochain tour, au vu de la valeur et de la qualité des joueurs qui composent cette équipe. En plus, j’estime que ces matchs se joueront à peu de choses, et donc cela ne voudra pas dire que les équipes battues sont forcément d’un niveau inférieur.

Vous enchaînez avec l’Afrique du Sud et vous terminerez avec l’Algérie, avez-vous suivi l’Algérie lors de la Coupe du monde, les éliminatoires de la CAN ? Si c’est le cas, à votre avis, quelles sont ses forces et ses faiblesses ?

J’ai suivi l’Algérie durant la Coupe du monde, bien sûr, mais pas lors des éliminatoires de la CAN, car je n’avais pas de raison particulière de les suivre du fait que je ne savais pas que j’allais les affronter durant cette Coupe d’Afrique des nations. Mais bon, je pense que les qualifications de cette sélection se sont faites dans la continuité de son parcours effectué au Brésil. C’est une équipe qui a retrouvé de la valeur avec de jeunes joueurs de qualité. Un jeu alléchant et unique, donc une équipe avec beaucoup d’atouts et d’arguments.

Qu’appréhendez-vous au juste chez cette équipe algérienne ?

Quand on affronte une bonne équipe comme l’Algérie, on la respecte forcément, mais on s’en méfie aussi bien évidemment. Ce qui est sûr, c’est que nous devons bien nous préparer afin d’être au maximum de nos moyens et de nos possibilités pour affronter l’Algérie, mais aussi les autres équipes. On ne peut pas entamer cette CAN en étant en deçà de nos qualités, ça c’est sûr. 

Vous jouerez l’Algérie à Malabo lors du troisième match ; finalement est-ce une bonne chose ?

Premier ou troisième dans ce groupe, ce n’est pas comme si vous aviez une équipe bien en dessous des autres. Quand vous démarrez avec le Ghana, vous enchaînez avec l’AFS et vous terminez avec l’Algérie, le meilleur ordre pour affronter ces trois adversaires, franchement je n’en vois pas.

Vous devez certainement connaître des joueurs composant cette équipe ; allez-vous prévoir des plans par exemple anti-Brahimi ou pour contrer Feghouli ?

De toute façon, si j’avais un plan, je ne vous le dévoilerais pas, donc si je devais mettre en place une stratégie par rapport à un secteur de jeu algérien particulier, je n’en parlerai pas et je pense que vous pouvez comprendre ma position. Mais c’est vrai que ce que je vois à travers les différents championnats européens, les joueurs algériens ont de la qualité, et c’est pour cette raison d’ailleurs que cette sélection a atteint ce niveau. Des joueurs qui évoluent dans de grands clubs européens, mais aussi fiers de porter le maillot algérien et cet investissement de tous ces joueurs professionnels qui permet à l’Algérie d’être forte aujourd’hui.

Christian Gourcuff, lors de sa dernière conférence de presse, nous a fait savoir que le Sénégal le fait penser au Mali que vous avez entraîné entre 2010 et 2012 ; êtes-vous d’accord ?

Vous savez, le Mali et le Sénégal sont deux pays voisins. Avant, ils composaient un seul pays, et c’est vrai que les caractéristiques sur le plan athlétique et de la valeur physique des joueurs maliens et sénégalais se ressemblent beaucoup. Après, il y a toujours des particularités par rapport à certains secteurs de jeu. Mais de façon générale, les joueurs des deux pays se ressemblent et Christian Gourcuff a raison à ce sujet.

En cas de qualification, ce sera l’équipe d’un autre groupe difficile avec le Cameroun, la Côte d’Ivoire et le Mali ?

Ce seront de belles affiches et l’équipe issue du groupe C ou D qui ira jusqu’au bout aura fait un parcours du combattant.

Vous avez eu l’occasion de visiter cette ville de Mongomo, ainsi que ses installations au cours de ces derniers jours. Vous en pensez quoi ?

La Guinée est malheureusement confrontée à un problème de temps par rapport à des besoins d’installation. Malabo et Bata sont déjà équipées, mais Mangomo, que j’ai eu l’occasion de visiter, pour ce qui est du terrain des compétitions, il y a tout à faire parlant surtout de la surface de jeu qui est totalement à refaire. Le temps sera-t-il suffisant ? Là je ne sais pas. Ensuite concernant les autres infrastructures, en l’occurrence les stades d’entraînement, et bien il existe un seul terrain sur Mongomo dont la pelouse est, elle aussi, à refaire. Un seul terrain pour quatre équipes, ça aussi une gestion compliquée. Il existe un deuxième stade, mais il est à une heure de route de Mongomo, ce qui n’est pas toujours simple pour les joueurs de passer beaucoup de temps dans le bus. Pour ce qui est de l’hébergement, nous avons visité trois hôtels avec des niveaux de qualité complétement différents. Donc, toutes ces conditions peuvent peser et entraîner des contrariétés au niveau du fonctionnement de l’équipe et peut-être même des répercussions sur le plan sportif, et c’est vraiment dommage.

Justement, on croit savoir que vous n’avez pas hérité du meilleur hôtel, est- le cas ? Et cela sera-t-il un problème ?

Tout à fait, nous avons hérité du troisième hôtel qui, malheureusement, n’est pas le meilleur. Il y a un grand hôtel avec beaucoup d’espace où deux équipes seront logées, un deuxième bon et un troisième qui n’est pas bon ;  c’est ce dernier qui nous a été affecté. Puisque nous ne choisissons pas car c’est la CAF qui attribue les hôtels en fonction du tirage au sort, on n’a pas trop le choix. Etre hébergés dans un pareil hôtel, c’est toujours compliqué car il y va du bien-être de tous et c’est surtout l’endroit où l’on va passer beaucoup de temps. Lorsque vous êtes engagés dans un tournoi, sur votre lieu d’hébergement, ce sera des moments de travail, de récupération et de détente. Et quand vous ne bénéficiez pas de tout cela, ça risque d’être difficile dans une compétition comme la CAN.     

On croit savoir que vous auriez décidé de vous préparer aux Emirats arabes unis…

Non pas du tout ! On ne va pas se préparer aux Emirats arabes unis ni au Sénégal, d’ailleurs. Pour ce qui est de notre lieu de préparation, nous sommes en train de finaliser car nous avons besoin de travailler dans de bonnes conditions de calme et de sérénité. On sera fixé au cours de la semaine prochaine.

Allez-vous disputer une rencontre amicale avant cette CAN ?

Ça dépendra des possibilités qui seront en place, à savoir les équipes qui se trouveront à côté de nous ou tout simplement des sélections qui pourront se déplacer. En fait, tout dépendra justement de notre lieu de préparation qu’on n’a toujours pas désigné.

Votre équipe, le Sénégal, a perdu un seul match lors de ces éliminatoires face à la Tunisie ; c’est quoi la force de cette équipe : le grand nombre de joueurs de talent ?

C’est une équipe composée de joueurs professionnels, proches en termes de qualités. Un groupe qui vit aussi bien ensemble avec un bon état d’esprit. Je ne vous cache pas qu’en ce qui me concerne, le choix est toujours très délicat car les joueurs se valent quasiment tous, mais c’est aussi la richesse de cet effectif qui fait la force de ce groupe…

Justement Claude Le Roy nous disait hier (ndlr : entretien réalisé hier matin) qu’Alain Giresse aura du mal à établir une liste de 23…

Mais ce n’est pas d’aujourd’hui, à chaque match, c’est la même chose. Il y a des entraîneurs qui ont le souci de trouver 23 joueurs, et bien moi je suis confronté au problème inverse.

André Ayew a déclaré cette semaine que dans ce groupe, il faudra surtout faire attention au Sénégal, vous en pensez quoi ?

Pour moi seul le terrain compte, les appréciations ou les suppositions, tout ça c’est secondaire car la réalité est sur le terrain où tout se joue et tout se gagne, et nulle part ailleurs. 

Finalement, c’est quoi l’objectif du Sénégal lors de cette CAN ?

Quand on joue une compétition, c’est toujours pour réaliser le meilleur résultat possible. C’est difficile de situer avec précision les objectifs sachant que des fois ça peut être restrictif, donc on doit tout faire pour aller au maximum de nos possibilités. Ça donnera ce que ça donnera sachant qu’on ne se fixe pas de limites.  

Le Sénégal n’a toujours pas remporté ce trophée ; une pression par rapport à cela ?

La pression populaire est énorme ici au Sénégal avec de grandes ambitions comme c’est souvent le cas, les Sénégalais réclament la coupe. Mais pour ce qui est des joueurs, ils vivent ça avec beaucoup de lucidité car il ne faut pas tout mélanger.

Des nouvelles de Demba Ba blessé au cours de ces derniers jours ?

Malheureusement, le joueur a contracté une fracture au niveau de l’orteil, pour l’instant on attend toujours. On dispose encore d’un peu de temps pour savoir si Demba Ba sera opérationnel ou non d’ici la CAN.

Asma H. A.

 

« J’ai du mal à composer ma liste avec tous ces joueurs sénégalais»

« Dans cette CAN, on ne se fixe pas de limites »

« Nous avons hérité du plus mauvais hôtel ; bien sûr que c’est un handicap »

« Un terrain d’entraînement pour quatre équipes, difficile à gérer »

« Dembaba forfait ou non ? On attend toujours »

 

 

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