Berraf : «Le dispositif de marketing n’était pas conséquent»

Le 15 février dernier, il était le premier à déclarer que le Gabon sera le pays organisateur de la prochaine CAN. Cela avait donné naissance à une polémique. Le ministre des Sports Mohamed Tahmi avait rapidement démenti cette information qui n’était qu’une rumeur, d’après lui. 2 mois plus tard, la confirmation est là, l’Algérie a bel et bien perdu la bataille. Mustapha Berraf, le président du COA, nous en parle.

La décision de la CAF est tombée tel un couperet sur les Algériens ; les gens étaient choqués, mais pas vous apparemment, n’est-ce pas ?

C’était effectivement une déception, notre objectif était de faire une grande fête de football, parce que les Algériens sont de fervents supporters de football, de leur équipe et du sport en général. On a privé des millions de jeunes de ce bonheur. On souhaite bonne chance au Gabon. De ce côté-là, il n’y a aucun problème, le Gabon a eu les faveurs du vote, tant mieux pour eux, on leur souhaite bonne chance.

Vous dites vote, mais lorsqu’on compare ça avec vos propos d’il y a 2 mois, lorsque vous affirmiez que la CAF avait déjà choisi le Gabon, est-ce que c’est vraiment le vote qui a fait la différence ?

Le vote a été fait à bulletins secrets. Chacun est libre de voter comme il l’entend et suivant sa conscience et ce qu’il pense, mais, moi, je crois quand même que le fait qu’on ait privilégié le Gabon est un peu frustrant. Même si le Gabon est aussi un pays de sport, c’est un pays africain, qui a offert des garanties, il faut tourner la page et penser à organiser le football algérien, le sport, et permettre à nos équipes de se préparer pour affronter les grandes équipes et les prochaines échéances, notamment les prochains Jeux africains et les prochains Jeux olympiques.

Qu’est-ce qui a manqué au dossier algérien, selon vous ?

Je pense qu’il y a un probleme de marketing qui est entré en ligne de compte. Comme vous le savez, l’Algérie avait un dossier en béton, mais elle n’a pas eu la faveur du vote, car il y a eu un lobbying de grandes entreprises de marketing, qui ont fait pencher la balance du côté du Gabon. Je suis sûr que si le dispositif de marketing et de management avait été plus conséquent, on aurait eu cette CAN. Il ne faut pas oublier que le gouvernement a néanmoins fait beaucoup d’efforts, mais ça n’a pas suffi. La décision de la CAF est souveraine et exécutoire, même si on la considère un peu sévère.

Du coup, depuis mercredi, Hayatou s’est fait donner le nom d’ennemi numéro un du Maghreb et de l’Afrique du Nord, qu’en pensez-vous ?

Je ne pense pas que ça soit le cas. Je pense que Monsieur Hayatou ne vote pas et, comme je vous l’ai dit, chaque membre vote et le vote est à bulletins secrets.

Il paraît qu’il a voté…

Je ne pense pas, il est membre de la FIFA, donc il ne peut pas voter, mais, pour moi, l’important est que les dés son jetés, les jeux sont faits, il faut organiser le sport algérien et mettre en place un dispositif de lutte contre la violence et mettre en place des mesures rigoureuses pour lutter contre les fléaux sociaux qui sont en train de miner le sport algérien ; il faut se tourner vers l’avenir, ressourcer notre équipe et lui permettre de grandir. Elle est grande, elle est composée de jeunes, 23-24 ans, mettons les moyens à leur disposition et aidons-les à accomplir ce qui a été raté en Guinée équatoriale, c'est-à-dire remporter la coupe d’Afrique ; on a les moyens.

Cette même génération ne pourra pas soulever le trophée au 5-Juillet, c’est frustrant, non ?

Il faut revoir notre copie et tirer les enseignements ; l’organisation aurait nécessité beaucoup de moyens, on les avait, il y a eu un certain jeu de coulisses. Raouraoua a fait tout son possible, il n’y a rien à dire là-dessus, le ministre a fait ce qu’il devait faire, mais le sort a voulu qu’il en soit autrement ; il faut l’accepter, être fair-play et se préparer pour d’autres échéances. Nous avons les Jeux africains de 2018 qu’on va organiser, aussi nous avons toutes nos chances pour les Jeux méditerranéens de 2021, et c’est ça qu’il faut soutenir.

Vous évoquiez tout à l’heure le fléau de la violence, est-ce que la mort d’Ebossé ne nous a pas joué un vilain tour ?

Non, je ne pense pas que ça soit le cas, il y a eu plus graves dans d’autres pays africains, je ne vais pas en citer. C’est un événement extrêmement malheureux ; je peux vous assurer que les auteurs seront sévèrement punis par la loi algérienne, ils sont activement recherchés. Les camarades membres exécutifs de la CAF savent que l’Algérie maîtrise l’aspect sécuritaire.

Le Maroc et la JSK ont défié la CAF et ont eu gain de cause, en même temps, la FAF s’est un peu laissé faire notamment pour ce qui est de l’affaire de la sanction du CHAN qu’on pouvait contester. Est-ce normal de se ridiculiser comme ça devant une instance ?

Les affaires qui vont au TAS sont des affaires soumises à l’arbitrage et aux chambres des litiges ; dans ce cas, c’est vrai, on ne pouvait pas risquer la vie de nos athlètes ; dans un pays frère en situation délicate, la décision aurait effectivement été contestée ; il faut voir un peu les motivations de la fédération, ils ont leur raison.  

On a eu la chance de vous rencontrer en 2012 au Gabon pour la CAN, où vous aviez assisté à la demi-finale et la finale. Vous connaissez donc bien ce pays, mérite-t-il la CAN 2017 ?

C’est un pays africain, pays frère, qui a une bonne organisation, de bonnes prédispositions, mais si on fait l’analyse des dossiers, le nôtre est plus conséquent. C’est ce qu’a dit le ministre des Sports, mais le Gabon est un pays avec beaucoup de moyens. Ils ont dû présenter un dossier en béton, mais je pense qu’il ne faut plus s’apitoyer, plutôt se tourner vers l’avenir, se remettre en question, s’unir pour que l’Algérie sorte de cette preuve plus forte.

Le 15 février dernier, Monsieur Berraf avait déclaré ouvertement que l’Algérie n’aura pas la CAN et qu’elle ira plutôt au Gabon, qu’est-ce qui a motivé votre déclaration ?

J’aurais bien voulu que ça ne soit pas le cas.

Dans la rue, les gens ne parlaient que de vous et de vos affirmations du mois de février, d’où teniez-vous ce scoop ?

 Je ne peux pas vous dévoiler mes sources d’information, c’était des infirmations fiables. Moi, j’ai senti que c’était un devoir de porter ça à la connaissance du grand public. J’aurais bien voulu qu’on rafle la mise, à mon âge, je ne peux pas raconter des salades, cela fait quand même 17 ans que je suis vice-président de la CNOA (Comités nationaux olympiques d'Afrique).

Pour finir, qu’en est-il de l’incident que vous avez eu avec Hayatou à Alger. Est-il oublié ?

L’incident est clos. Il y a eu une réconciliation, je considère que l’incident est clos. Et comme je vous l’ai dit, bonne chance au Gabon dans l’organisation de la CAN 2017.

     S. M. A.

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