Où en est la Société sportive par actions de l’ASMO ?
Depuis 2010, la SSA de l’ASMO essaie de se structurer. Comme vous le savez, notre société a posé le problème en termes législatif et réglementaire. Parce que l’ASMO est l’une des rares sociétés qui ont compris que, d’abord, on ne peut structurer la société qu’à ce niveau-là. Jusqu’à présent, il y a un vide juridique énorme qui ne permet ni à nous ni à d’autres clubs d’avancer. Nous estimons que la loi 13-05, qui est venue dernièrement, a apporté un plus en ce sens que pour la première fois, on trouve la nouvelle notion juridique de SSA, c’est-à-dire société sportive par actions. On considère que c’est un acquis. Parce que depuis 2010, ça fait maintenant quatre ans, nous luttons avec un certain nombre de clubs pour avoir cette nouvelle forme juridique, mais qui pose un autre problème, celui des statuts de la SSA.
C'est-à-dire…
A partir de cette nouvelle notion, nous sommes obligés d’aller vers de nouveaux statuts de la SSA. Et l’une des revendications majeures des clubs et celle qui pose le plus de problèmes, c’est cette situation relative à la faillite des clubs professionnels. La faillite est liée directement aux dettes fiscales et parafiscales. C’est pourquoi en établissant de nouveaux statuts, nous posons en même temps le problème du statut du joueur. Car, dorénavant, le joueur ne sera plus considéré comme travailleur au sens de la loi 90-11, mais comme prestataire de service. Bien sûr, il y en a beaucoup qui vont s’étonner mais nous on n’invente rien, nous nous basons sur un arrêt de justice, de la Cour suprême de notre pays. Ça veut dire que, dorénavant, le joueur devra payer ses propres impôts. Il sera astreint à la CASNOS.
Et vous allez revendiquer cette nouvelle donne ?
Ah oui, et c’est très important, c’est notre demande fondamentale. Ça va déranger beaucoup de gens et on pense qu’on ne peut pas le faire. Au départ, personne ne croyait à cette nouvelle forme juridique. Or, maintenant, elle est là noir sur blanc. Donc, la Cour suprême a tranché ce cas. Le joueur devra le faire au sens du code 546. Alors, il faut y aller car si on règle ce problème, on va régler le cas de la dette fiscale et parafiscale.
Et ce point sauvera les finances des clubs ?
Oui, mais d’abord il faudra savoir si la société est purement commerciale ou d’utilité publique ou d’intérêt général. On sait que la loi reconnaît l’intérêt général aux clubs à l’activité commerciale. L’utilité publique n’est reconnue qu’au niveau de la Fédération, ce qui est anormal. Les clubs ont pour mission la régulation sociale et le respect de la cohésion nationale. Donc, on voit très bien que ce n’est pas commercial. Donc maintenant, nous voulons aller vers l’intérêt public. Et si on veut un commerce sportif, automatiquement on devra aller vers le Pari sportif maintenant que nous sommes passés au professionnalisme. Alors qu’est-ce qui nous empêche soit de capitaliser le Pari sportif algérien ou d’avoir notre propre pari sportif. Je sais très bien que si on s’organise pour un intérêt commun, on sait très qu’on aura sauvé les finances des clubs.
En attendant, qu’a fait la société asémiste depuis sa création ?
Premièrement, elle a réussi à introduire la notion SSA au niveau du registre du commerce. Deuxièmement, elle a réussi à introduire cette même loi juridique à la loi 13-05 et nous considérons que c’est un acquis immense, voire extraordinaire. Cette loi stipule que juste après ça, nous pouvons aller vers les statuts particuliers de la société. Ça va être un grand débat, ce sera une grande bataille qu’il faut gagner. Parce qu’il y a aura certainement des intérêts ou des points sur lesquels on ne va pas être d’accord…
Avec qui ?
Oui, avec les clubs d’un côté, avec la Fédération d’un autre et avec les instances sportives internationales aussi…
Avec la Fifa donc…
Il ne faut pas oublier que nous sommes en relation avec ces instances, c’est-à-dire la Fifa et ce qu’elle représente. Ça va être dur mais moi je pense qu’on va y arriver. Car il faut être conscient qu’être sur le code 75 bis 20 du code du commerce, ce sera un danger pour l’ensemble des clubs.
Comment et pourquoi ?
Un danger, oui, parce que les clubs sont en faillite. La faillite est structurelle quelles que soient les sommes qu’on leur donne. La preuve, à la tête des endettés on trouve le club le plus riche du pays et dans les trois premières positions, les clubs supportés et assistés par les sociétés nationales. Donc, on voit très bien que ce n’est pas un problème d’argent. Le club le plus riche a un taux d’endettement de plus de 132 milliards.
Vous parlez de l’USMA…
(Il sourit) C’est vous qui le dites ! Bien sûr, c’est l’USMA. Puis il y a les autres comme le MCA dont le taux d’endettement est de 72 milliards. Donc, ce sont les clubs les plus riches qui sont touchés.
Et où en est l’ASMO ?
A l’avant-dernière place. Parce que le dernier, c’est le RCA qui fait ses débuts en première division. Donc, on voit très bien que le taux d’endettement touche les clubs les plus riches parce qu’il y a trop de dépenses, parce qu’il n’y a pas de produit.
Et de quoi a besoin la société asémiste ?
D’abord, elle a besoin de se structurer. C’est la première préoccupation. Parce qu’il faut suivre les règles de la Fifa qui sont intransigeantes. Et si on n’est pas en conformité avec ces règles dans un certain nombre d’années, il arrivera un jour où on n’aura pas la licence de club professionnel. Donc, on ne peut pas avoir de licence, alors que ne nous sommes pas en conformité avec sur le dos un dépôt de plainte pour faillite.
Donc, il faut éponger ces dettes ?
Exactement ! Pour votre information, on va se réunir pour discuter et trouver des solutions à ce problème de dettes fiscales et parafiscales. Nous sommes en train de faire des tas de propositions à la FAF. Mais d’abord, il faut régler ce problème de statut du joueur. N’oubliez pas que nous transgressons les lois quand on alloue des subventions aux clubs amateurs pour les transférer dans le compte des sociétés. Nous sommes obligés de le faire à cause de ce problème de statut. Mais puisqu’il y a l’intérêt de l’utilité publique, on fait avec d’autant que nous sommes couverts par un décret.
Et comment avez-vous réagi à la déclaration du ministre qui pousse les clubs à compter sur eux-mêmes à l’avenir ?
Moi, je me réfère beaucoup plus à la loi qu’à ce qui a été dit ou aux déclarations. Je pense peut-être que les propos du ministre ont été mal interprétés. Bien sûr quand il dit que les clubs devront compter sur eux-mêmes à l’avenir, mais pour le moment ce n’est pas possible. Les pays voisins, dont certains ont mis 30 ans pour démarrer dans le professionnalisme, bénéficient toujours de l’argent de leur Etat. Mais chez nous, il ne faut jamais perdre de vue cette notion de cohésion nationale. Le drapeau algérien n’a pas de prix. La loi reconnaît le droit de l’intérêt général, celui du pays. Personne n’a intérêt à arrêter les subventions étatiques surtout qu’en parallèle, il n’y a aucun produit qui est la propriété de l’Etat. Nous n’avons que des charges, en fait.
Vous pensez que les sociétés n’ont pas su ou pu suivre la politique du professionnalisme ?
Absolument, et il y a un problème sérieux. Je pense qu’on a été pris par le championnat, la « championite », comme l’a appelé Raouraoua, au lieu de donner plus d’importance aux sociétés. Nous ne pouvons pas avancer si les sociétés ne sont pas structurées. En réalité, personne n’est responsable de cette loi.
Est-ce une bonne idée de proclamer le professionnalisme ?
Je pense que c’est une réussite parce que les vrais problèmes ont été soulevés très tôt. C’est important parce que des pays ont mis 30 ans pour démarrer. Des pays de grands clubs. Je pense que nous sommes en avance, mais il faut changer des dizaines de textes pendant qu’on joue le championnat.
Il y a le problème de mentalité à soulever…
Bien sûr, mais je pense qu’il y a un déclic. Déjà les débats sont plus importants parce qu’on commence à nous critiquer au sujet des statuts qu’on réclame. C’est un pas positif parce le débat est posé. Vous savez que certains clubs acceptent de ne pas porter la tunique professionnelle et de rester amateurs tant qu’ils peuvent continuer à jouer en Ligue1. On va justement se réunir pour faire comprendre à ceux qui le désirent de retourner au statut amateur où ils n’auront pratiquement plus de dettes. Seul le plan de développement fera la différence entre les clubs pros et les clubs amateurs.
Parlons de la société asémiste ; où en sont les projets de l’immobilier, du transport ou la communication ?
On n’a pas réussi à cause de cette loi dont je parle depuis le début. Si on n’arrive pas à développer l’image commerciale de notre société, on ne peut avancer.
Et cette histoire de salaires impayés des joueurs de l’équipe fanion…
Justement, j’allais vous en parler. Vous savez que les joueurs des clubs les plus riches du pays ne sont pas à jour. La masse salariale actuelle est énorme et on n’a pas les moyens pour ça. Nous avons un problème de trésorerie, pas de finances.
C'est-à-dire…
C'est-à-dire l’argent qui devait arriver à l’ASMO n’est pas encore rentré en matière de subvention. Et ce, par rapport à nos dépenses actuelles.
Sont-elles faramineuses ?
Ah oui, c’est colossal mais pas beaucoup par rapport à d’autres clubs. Disons que nous tournons autour de 18 milliards.
En revanche, le parcours de l’équipe fanion est fabuleux…
Nous avons une culture footballistique, donc un style de jeu. Nous avons des individualités valables qui, bon an mal an, font de bonnes choses. Avec elles, l’ASMO peut concurrencer n’importe quel club. Nous l’avons vu contre les grosses cylindrées du championnat. Sauf que faute d’expérience, elle peut avoir des hauts et des bas. Parce que tout se joue au niveau du mental. Techniquement, nous sommes parmi les meilleurs et ce, de l’avis de tout le monde, je pense.
Ce parcours se déroule en l’absence d’El-Morro et des dirigeants qui ne viennent presque jamais au stade, pourquoi ?
Vous savez, l’ASMO ne s’identifie plus à une personne ou deux ni à El-Morro. Ce n’est plus la personnalité de l’individu qui fait le club ou l’équipe. Ça se fait dans les clubs de quartier. Maintenant, l’ASMO a une aspiration professionnelle.
Le fait de léguer les affaires au CSA reste une aberration quand même …
C’est vrai, et c’est à l’image des statuts qui ne sont pas encore en conformité. Mais permettez-moi de saluer le travail des membres du club amateur. Le CSA a ramené l’accession. C’est une partie prenante dans les actions de la société.
Et cette histoire de centre de formation ?
La formation est le point le plus important dans la cohésion nationale. S’il n’y a pas de formation, il n’y a pas de développement du football algérien. C’est prioritaire avec la lutte contre la violence et la lutte antidopage. Pour vous répondre, je dirais qu’à la suite de la dernière réunion avec le DJS il était convenu qu’on édifiera la première pierre de construction du centre à Belgaid. Mais pour une histoire de calendrier du directeur ça été reporté. Pour votre information, on va opter pour un terrain hybride, c'est-à-dire semi-naturel semi-synthétique.
Enfin votre avis sur le projet de la création d’une école initiée par l’AAJ de l’ASMO…
D’abord, c’est une bonne initiative. Mais ce projet, il faudra lui donner un cadre réglementaire, comme ça ils pourront bénéficier d’une subvention étatique. Donc, c’est une bonne chose et personnellement je suis prêt à les aider.
L. M. A.
«En Algérie, nous sommes en avance, mais…»
«On devra aller vers le pari sportif pour sauver les finances des clubs»
«Nos dépenses tournent autour de 18 milliards»