Que dites-vous du championnat de Ligue Mobilis, édition 2014-2015 ?
Tout le monde s’étonne par la tournure prise par l’actuel championnat, où autant d’équipes se retrouvent aussi rapprochées les unes des autres sur le plan comptable. Pour moi, au lieu de traduire une faiblesse, cela est plutôt un signe d’homogénéité de niveau, ce qui n’est pas mauvais. C’est parce que nous avons affaire à une génération de joueurs qui arrivent en même temps.
Pouvez-vous être plus explicite ?
Je veux dire que ce n’est pas comme à l’époque où, par exemple, j’étais à l’USMA, où il y avait des éléments avec une expérience de 15 ans tels les Dziri, Zeghdoud et autres. Les joueurs de la génération actuelle ont percé en même temps, voilà une première explication du niveau homogène. En plus, ce sont les mêmes éléments qui vont d’une équipe à l’autre, il n’y a pas de stabilité des effectifs qui permette d’améliorer le niveau. Les clubs changent d’équipe tous les deux ans pratiquement. Certains clubs recrutent des joueurs qu’ils chassent même au mercato suivant, c’est-à-dire en six mois. Ce nomadisme fait qu’on freine un peu l’obligation de progrès établi par les entraîneurs dans leurs plans d’évolution. On est tous en train de suivre les exigences des dirigeants plutôt que celles des techniciens.
En plus clair ?
Pour mieux illustrer mon propos, je vais prendre un exemple qui devrait être édifiant. Un entraîneur travaille pour produire un fruit bio. Les dirigeants se démènent pour récolter des fruits «surgonflés» aux produits chimiques pour avoir des résultats, cela ne les mène pas loin finalement. La preuve, la santé n’y est pas ensuite. S’il n’y a pas de stabilité d’encadrement de l’effectif, on ne peut pas améliorer le niveau du joueur du jour au lendemain. Quand on travaille, on doit faire confiance au temps. Il y a encore une autre raison qui fait que tous les évaluateurs du football national passent à côté.
Laquelle ?
Les paramètres de comparaison chez nous sont faux. Les gens se plaisent à faire le parallèle, par exemple, avec notre football au lendemain d’une demi-finale de Ligue des champions d’Europe ! On voit un Barça-Bayern dans la soirée et, le jour suivant, on se parle d’un ESS-MOB en disant qu’il n’a rien à voir avec. Mais c’est évident ! En revanche, si on compare avec le niveau africain, on réalisera que l’Algérie se porte mieux. C’est cet esprit-là qui nous suggère inconsciemment de ne pas comparer avec les bonnes références et c’est ce qui nous joue de mauvais tours aussi. D’ailleurs, c’est ce qui conduit l’Algérien, dans sa vie de tous les jours, à être mécontent. Dans l’économie, dans tout en fait, on se plaît à comparer avec les meilleurs qui ont une avance de 100 ans par rapport à nous. Un jour, je coachais l’USMA, un dirigeant du club est venu me voir, savez-vous ce qu’il m’a dit ?
Dites-le nous.
Il m’a laissé entendre : maintenant, il est temps pour nous de jouer la Coupe du monde des clubs ! Je tombais des nues. Pourquoi penser à ça avant de gagner la Coupe d’Afrique ? Il faut stabiliser le gain présent avant de songer à enrichir l’avenir, comme l’ont fait le Ahly du Caire ou l’Espérance de Tunis.
H. D.