C’est l’heure des bilans pour la délégation algérienne qui a quitté Rio pour rentrer sur Alger. Au final, deux médailles seulement en argent et ramenées par Taoufik Makhloufi aux 800 et 1500 m, un exploit pour l’athlète algérien qui entre définitivement dans le cercle très fermé des athlètes algériens ayant honoré le pays et médaillés dans la plus importante des compétitions internationales. Cependant, le vice-champion olympique en avait gros sur le cœur et il s’est carrément lâché en zone mixte pour tout remettre en cause et tacler de manière assez sévère les responsables algériens coupables, selon lui, du fiasco brésilien.
De mauvaises conditions de préparation
Ce qu’on peut dire, c’est qu’à chaque JO, la moisson des Algériens en termes de médailles se fait de plus en plus rare. Makhloufi a réussi à sauver la face à deux reprises que ce soit à Londres ou au Brésil. Cependant, il ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. Avant, l’athlétisme algérien dominait l’Afrique et le monde arabe avec les Baya Rahouli, Noredine Morceli, Benida Merrah ou encore Saïdi Syaf Ali. Une histoire ancienne. Désormais, les Algériens qui étaient craints par tous, sont de nouveau dans l’anonymat le plus absolu. Cela est dû aux mauvaises conditions de préparation car une compétition comme les JO ne se prépare pas en 3 mois mais sur des années pour avoir le plus de chances de rapporter une médaille.
L’exemple Bourrada
Durant ces JO, on a découvert un de ces athlètes qui ont souffert de la mauvaise préparation pour l’évènement en question. Larbi Bourrada s’est battu avec ses propres armes et n’a pas eu le soutien attendu de la part des décideurs. Pire, la voiture qui devait le transporter à la clinique pour une séance de récupération a été réquisitionnée par les responsables pour toute la soirée. Le décathlonien a dû prendre le bus et par la suite un taxi pour arriver à destination alors qu’il avait au départ une voiture à sa disposition. Un miracle qu’il ait pu finir à la 5e place et tout proche du bronze. Avec un peu plus de moyens, il aurait certainement décroché une médaille.
Le cri de détresse d’Abadli
Ce n’est pas seulement en athlétisme que cela s’est passé puisque le boxeur Abdali a aussi posté un message pour dénoncer les mauvaises conditions de préparation et faire savoir que les boxeurs n’ont pas eu ce qu’ils méritaient pour se préparer convenablement. Ce dernier a fait savoir qu’il n’a rien reçu comme prime ou encouragement pour s’être qualifié pour les JO. Il n’a pas eu l’argent nécessaire pour se préparer convenablement. Absence de considération, absence de subventions, il a lui aussi taclé indirectement les responsables qui n’ont pas rempli leur mission pour les mettre dans des conditions dignes afin de se préparer convenablement alors que l’équipe de football par exemple jouit de toutes les installations et l’aide nécessaire pour triompher.
Il faut revenir au système de Derouaz
Durant les années d’or de l’athlétisme algérien, les Benida Merrah, Saïdi Syaf, et Guerni Djabir recevaient des bourses directement sur les comptes personnels de la part du MJS. C’est Aziz Derouaz, alors ministre de la Jeunesse et des Sports qui avait installé cette politique. Ce dernier avait instauré ce mode de fonctionnement pour permettre à chaque athlète de se préparer convenablement et d’essayer de prendre une médaille. Cependant, depuis, ce système a disparu car depuis le retour de Mustapha Berraf, c’est le COA qui gère et chaque athlète doit se déplacer pour faire une demande. Cette politique a prouvé ses limites et un retour au système de Derouaz semble prioritaire pour essayer de relancer un sport qui est en net déclin et qui a enfanté tant de sportifs qui ont fait honneur au drapeau national.
I. Z.
Makhloufi lâche ses bombes
«Les responsables ont trahi le gouvernement»
Le double vice-champion olympique du 800 m et du 1500 m s’est lâché en zone mixte par rapport aux conditions dans lesquelles se trouvaient la délégation algérienne à Rio affirmant que son succès, il ne le doit qu’à lui-même après de grands efforts fournis et de l’argent déboursé de sa poche.
«Je l’ai fait pour les moudjahidine, pour l’Algérie pour le drapeau…, pas pour eux !»
L’athlète algérien n’a pas mâché ses mots et s’en est violemment pris aux responsables algériens qu’il accuse de trahison : «Où sont les promesses faites ? Que font ces responsables ? Je suis là pour l’Algérie, j’ai écrit une page d’histoire. Contrairement à eux, je ne cours pas pour l’argent. Je sais ce que veut dire le mot «moudjahid» je sais ce que ça vaut. Les martyrs ne sont pas morts pour rien.»
«Ils nous ont trahis, trahi l’Etat algérien, trahi le peuple !»
Apparemment déçu et révolté, le champion algérien fait savoir que ce qu’il a raconté n’est pas tout puisqu’il y a d’autres choses plus graves sans citer quoi que ce soit ni de noms : «Il y a encore d’autres choses qui sont plus graves. Je parle des responsables qui se croient puissants et qui disent qu’ils soutiennent les athlètes et qui ne font rien. Ces responsables n’ont pas fait ce qu’il fallait. Ils ont été mandatés par le gouvernement pour prendre en charge les athlètes et leur fournir tout ce dont ils ont besoin mais ils ne l’ont pas fait. Je sais que le gouvernement a déployé une aide conséquente.»
«Les gens qui travaillent forment des champions»
Makhloufi a dit les 4 vérités et est notamment revenu quelques années en arrière lorsqu’il a voulu s’entraîner avec le coach du nouveau champion olympique du 1500 m. Il avoue : «En 2009, je voulais m’entraîner avec le coach de l’Américain (qui a gagné la course). Il m’a dit, on le prépare pour en faire un champion. Les gens qui travaillent et y connaissent forment des champions. Nous on fait le contraire.»
«Bourrada, les boxeurs et les judokas auraient pu prendre des médailles»
Parmi les exemples cités par Makhloufi celui de Larbi Bourrada : «Bourrada et les boxeurs auraient pu prendre des médailles. Les judokas aussi. Malheureusement, devant la télé, ils font des déclarations mais il n’y a rien. Quand on voit comment les autres se préparent et comme nous on se prépare, il y a deux mondes.»
«Brahmia m’a humilié»
Continuant dans son intervention, le natif de Souk Ahras n’oublie pas d’adresser une pique bien destinée à Amar Brahmia, chef de délégation : «Il y a une année de cela, je devais partir en Afrique du Sud pour me préparer. Je contacte Brahmia et ce dernier me dit que je devais lui remettre une photocopie qui atteste que mon physio est bien arrivé en Afrique du Sud. Je ne sais pas s’il se moquait de moi (tmeskher bia) ou bien s’il m’a pris de haut, je n’vais pas le temps pour ça !»
«Si j’avais suivi les responsables, je serai resté à Souk Ahras»
Makhloufi a donc décidé de tracer son propre chemin et faire en sorte de se préparer comme il se doit car il assure qu’il n’aurait rien fait s’il avait suivi les responsables : «Si je les avais suivis, je serais resté chez moi à Souk Ahras. Mais j’ai choisi, pour moi et pour le peuple algérien de continuer à bosser. Ceci est le résultat de mon travail. Je me suis préparé avec mon propre argent…»
«Je suis content pour le peuple algérien»
Le coureur est ensuite revenu sur sa course et ses exploits et assure : «Je suis content car j’ai donné quelque chose à l’Algérie. Je suis rentré dans l’histoire. Dieu merci, je l’ai fait avec mes propres moyens. Le peuple algérien le mérite et je suis là pour eux. Si ce n’était que pour les responsables Wallah je ne serai pas venu car ils se cachent derrière mes résultats. Je les ai couverts en 2012, mais je refuse de le faire aujourd’hui.» Nul doute que cette sortie va faire des vagues et qu’il y aura encore plus de révélations lors des prochains jours.
«J’ai 28 ans, je ne suis pas fini»
A une question sur son âge et sur la possibilité que ce soit ses derniers JO, Mekhloufi dira : «J’ai 28 ans, je ne suis pas fini. Vous, vous croyez que si, attendez-moi dans les prochaines compétitions.».
«Oui, je suis Chaoui, Amazigh et musulman et je suis fier de l’être»
Lors de sa déclaration sur beIN Sports, Mekhloufi a dédié ses médailles au peuple algérien, aux Arabes et aux musulmans, en zone mixte, le champion algérien a tenu à dire ceci : «Oui, je suis Amazigh, comme l’est tout le Nord de l’Afrique. Je suis aussi Chaoui et fier de l’être. L’Islam nous a arabisés… mais je n’aime pas entrer dans ses considérations. Je suis avant tout Algérien, je dédie donc mes médailles à tous les Algériens.»
I. Z.
Brahmia : «Ils n’ont manqué de rien»
Dans un entretien accordé à un site algérien, le chef de mission de la délégation algérienne a tenu à donner sa version concernant cette histoire et selon lui, tout ce qui a été dit n’est que pure mensonge : «Nos athlètes n’ont manqué de rien. Nous n’avons enregistré aucune plainte de la part de nos sportifs. Tout ce qui a été rapporté par les médias n’est que pur mensonge. Je n’ai aucun problème personnel avec Makhloufi. J’ai répondu favorablement à tout ce qu’il a demandé. Les athlètes n’ont pas manqué de masseurs. Nous avons au moins 6 masseurs dans notre délégation sans compter les deux masseurs mis à la disposition de Toufik Makhloufi.» Concernant le second entraîneur de Bourrada, il dit : «C’est faux ! Nous n’avons jamais refusé un billet d’avion à Mohamed Hocine, le second entraîneur du décathlonien Larbi Bourrada. Il a pris le plus normalement possible le vol spécial de la compagnie nationale Air Algérie vers Alger.» Enfin concernant le budget, il assure que tout a été suivi : «Nous avons disposé de 31 milliards de centimes, soit plus de 3 millions de dollars. Tout a été bien géré et dépensé sous le contrôle strict du Comité olympique. Il n’y a aucun denier public qui a été détourné. Le séjour des athlètes, les voitures, le matériel protocolaire et tout le reste a été financé sur notre budget. Je vous le répète : nos athlètes n’ont manqué de rien.»
I. Z.
L’équipe de football a passé un séjour paisible
Alors que pour les autres disciplines, plusieurs défaillances ou difficultés ont été enregistrées, cela n’a pas été le cas des footballeurs qui ont disputé le tournoi de football. En effet, le président de la FAF bien qu’il n’ait pas fait le déplacement a veillé à ce que tout se déroule parfaitement bien pour ses joueurs durant leur court séjour au Brésil. Le fait que Raouraoua ait envoyé Kerbadj pour veiller au grain a été pour beaucoup car il restait constamment informé de tout ce qui se passait au quotidien pour Abdellaoui et compagnie.
Sellal félicite Taoufik Makhloufi pour le double sacre
Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, a adressé un message de félicitations à l'athlète Taoufik Makhloufi qui a remporté deux médailles d'argent au 800 m et au 1 500 m lors des Jeux olympiques 2016 de Rio de Janeiro.
«Félicitations et merci pour votre exploit. Avec ces deux médailles, vous rejoignez vos dignes prédécesseurs qui vous ont précédé sur le podium olympique. Vous êtes un bon exemple et un digne représentant de la jeunesse d'un pays au passé glorieux et à l'avenir prometteur», a écrit le Premier ministre dans son message.
Sellal a également adressé ses remerciements au décathlonien algérien Larbi Bourrada qui a occupé la 5e place dans cette discipline.
«J'adresse mes remerciements à Larbi Bourrada pour ses efforts qui lui ont valu la reconnaissance et le respect de tous les Algériens», a ajouté M.Sellal.
Ould Ali : «Le bilan se fera en toute sérénité et en temps opportun»
Le bilan de la participation algérienne aux Jeux Olympiques de Rio se fera «en toute sérénité et en temps opportun et des correctifs seront apportés dans notre stratégie en matière d'accompagnement de notre élite », a indiqué hier le ministre de la Jeunesse et des Sports, El Hadi Ould Ali.
« Les brillants résultats de notre champion Taoufik Makhloufi ainsi que de Larbi Bourrada, et ce, au moment où notre peuple célébrait la Journée nationale du moudjahid, et les performances réalisées par d'autres athlètes, nous confortent dans notre détermination à oeuvrer de concert avec tous les intervenants à la préparation des prochaines échéances sur la base d'un bilan exhaustif en toute sérénité et en temps opportun de notre participation aux Jeux olympiques et des correctifs seront apportés dans notre stratégie en matière d'accompagnement de notre élite», a indiqué M. Ould Ali dans un communiqué transmis à l'APS. Pour le ministre de la Jeunesse et des Sports, «nos athlètes qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes ainsi que leurs staffs techniques ont, pour certains, amélioré leurs performances et se sont mesurés à des statures internationales sans démériter ni abdiquer, dans un esprit de solidarité et d'engagement à honorer les couleurs nationales». L'Algérie, qui a pris part aux Jeux olympiques de Rio de Janeiro avec 64 athlètes dont l’équipe de football composée de 18 joueurs, a obtenu deux médailles d'argent grâce à Taoufik Makhloufi sur le 800 m et le 1500 m.