Grand attaquant du MCO dans les années 80 et 90, Mourad Meziane avait commis la même erreur que Belaïli en fuyant l’Arabie saoudite. Mal lui en prit puisqu’il a été suspendu pendant de longs mois par la FIFA et a failli mettre en péril sa carrière de joueur. Dans cet entretien, il revient sur cette période trouble de sa carrière et affirme qu’il a beaucoup regretté de n’avoir pas respecté les termes du contrat qui le liait à Al-Wihda.
Ce mercredi, Al-Ahly Djeddah a envoyé un jet privé à Oran pour transporter Youssef Belaïli, mais ce dernier a refusé de rejoindre l’Arabie saoudite. Cette histoire ne vous rappelle rien ?
Vous faites certainement allusion à mon histoire avec Al-Wihda de La Mecque au début des années 90. Je peux dire à Belaïli que les Saoudiens vont utiliser tous les moyens possibles pour qu’il soit lourdement sanctionné. S’ils ont une occasion de le suspendre à vie, ils n’hésiteront à le demander. Lorsqu’ils constatent qu’un joueur étranger se moque d’eux, ils sont sans pitié avec lui. Youssef est averti, ils ne vont pas le lâcher ; s’il persiste à refuser de retourner là-bas, le grand perdant sera lui d’autant qu’il est en rupture de contrat.
A l’époque, qu’est-ce qui vous a poussé à refuser de réintégrer Al-Wihda de La Mecque ?
Dire que je n’étais pas bien traité serait mentir ; je ne manquais de rien, je percevais un salaire de 13.000 dollars, j’avais une belle maison, une voiture… Tout le luxe pour me concentrer uniquement sur mon travail sur le terrain. D’ailleurs, on me considérait comme l’un des meilleurs joueurs étrangers de la L1 saoudienne. Pour répondre à votre question, un jour en rentrant à la maison, je constate qu’elle a été visitée par des voleurs qui ont tout pris. J’ai craqué et même peur pour ma vie car les voleurs pouvaient m’assassiner, peut-être. Ce qui m’a marqué, j’habitais à 10 minutes de la Kaaba (lieu sacré de l’Islam) ; je n’imaginais pas un jour être victime d’un tel délit. Après, je suis rentré à Oran en refusant catégoriquement d’y retourner. Quelque temps après, deux dirigeants d’Al-Wihda se sont déplacés à Oran pour me convaincre de reprendre avec l’équipe, mais ils sont repartis bredouilles.
On dit que pour un jeune Oranais, il est difficile de vivre ailleurs…
Je n’en disconviens pas, j’étais assez jeune et la vie à Oran me plaisait beaucoup. Je passais mon temps à la plage (c’est un accroc des sports nautiques, ndlr). C’est normal que mon quotidien soit différent de celui de La Mecque. Sauf qu’avec du recul, j’ai beaucoup regretté ma décision. J’aurais dû réintégrer mon club. Je le dis d’ailleurs à Belaïli, la carrière d’un footballeur est éphémère. J’ai raccroché les crampons en 2003, ça fait déjà 17 ans ; comme le temps passe vite ! Youssef doit se sacrifier pour sa carrière ; après une fois à la retraite, il aura le temps de profiter des saveurs de la vie.
Cet acte vous a valu un arrêt pendant un an et demi…
Figurez-vous, les dirigeants saoudiens cherchaient tellement à me faire du mal que la FIFA m’avait suspendu pour une durée indéterminée en arguant du fait que mon dossier allait être rouvert. Heureusement que le jour de sa réélection à la tête de la FIFA, Joào Havelange avait décidé d’une amnistie générale pour tous les joueurs et autres acteurs du football suspendus. C’est grâce à cette amnistie que j’ai repris avec le MCO et même l’équipe nationale. D’ailleurs, je rends hommage au duo Ighil-Mehdaoui qui m’a aidé à revenir au premier plan après une année et demie sans compétition. Ighil et Mehdaoui, ce sont de vrais hommes et de grands éducateurs ; ce duo d’entraîneurs m’a beaucoup marqué.
Belmadi, qui a pris la décision de rappeler Belaïli, qui était blacklisté, serait déçu, on imagine, par son attitude…
Déjà avant qu’il ne revienne en sélection nationale, Youssef Belaïli avait une dette, celle de soigner son image auprès des supporters algériens. C’est Djamel Belmadi qui lui a permis d’atteindre cet objectif. Je crains qu’après ce dernier épisode, Belmadi va changer d’avis, car un entraîneur professionnel comme lui ne tolérerait jamais de tels comportements.
- S.