La procureure de la République a requis dix mois avec sursis, et une amende de 45 000 euros et la diffusion de la décision sur Instagram pendant un mois.
Comme prévu, Youcef Atal a comparu hier devant le tribunal correctionnel de Nice, coupable d’avoir publié sur son compte Instagram une vidéo polémique. Tout vêtu de noir, l’international algérien se présente à la barre à 13h48. Il est venu avec une interprète, à qui il fera appel quand il y a une incompréhension. «Oui, je vais répondre à vos questions», s’engage devant la barre Youcef Atal. D’emblée, la procureure lui demande s’il prenait conscience sur les possibles répercussions d’un tel partage ? «C’est pour ça que je l’ai enlevé (vidéo). C’est pas mon but d’envoyer un message de haine, mais bien de paix», répond Atal qui ajoute : «Je vous ai répondu parce que je ne voulais pas envoyer un message de haine, juste de paix. Que les gens ne souffrent pas».
Il assure ne pas avoir regardé la vidéo
Interrogé sur la régularité de ses partages extra-sportifs sur les réseaux sociaux, Youcef Atal réplique : «Je partage aussi des vidéos ou photos pas en lien avec le foot». Avant de marteler quand on lui dit, il est difficile de croire qu’il n’a pas regardé la vidéo en entier avant de la relayer : «Mais c’est la vérité, je ne l’ai pas regardée en entier». La procureure lui rappelle un argument similaire après un like identique en 2022. Youcef Atal répond : «Je n’aimerais pas répondre à cette question. Quand j’ai fait ça, les gens m’ont parle par rapport à ce que j’ai fait». L’avocat de la partie adverse lui rappelle qu’il y a des photos de lui avec une écharpe de la Palestine. «J’ai fait la photo parce qu’en Algérie tous mes coéquipiers soutiennent la Palestine», affirme Atal qui signale : «Je ne suis pas un antisémite. Je ne suis contre personne». L’avocat de la LFP lui demande s’il ne repartagerait pas cette vidéo aujourd’hui ? «On m’a suspendu dans le foot, c’est le truc que j’aime le plus. Pour ça, je regrette d’avoir fait ça et je n’ai rien contre les autres. Comme je le dis, depuis le début, je voulais juste passer un message de paix.» L’avocat de la LFP rétorque : «C’est parce que vous avez été sanctionné que vous regrettez ?». «Non, je ne l’ai pas vue (la vidéo) jusqu’à la fin… Je ne suis contre personne, chacun à le droit de faire ce qu’il veut. Moi, j’ai été touché parce que je ne veux pas voir des gens souffrir, je ne veux pas que des gens meurent. Je ne suis ni contre les juifs, ni contre les chrétiens… Je suis avec la paix.» Le président lui demande alors : «Avez-vous rédigé le message d’excuses ?» Réponse de Atal : «Non, on l’a envoyé, je l’ai lu, je l’ai envoyé. C’est ce que je voulais dire». Puis d’expliquer comment les excuses ont été publiées sur son compte Instagram : «C’est moi qui les ai partagées avec mon Instagram. J’ai quelqu’un qui travaille avec moi, parce que je ne sais pas écrire le français». Le président rebondit : «C’est votre agent ou vous qui l’avez écrit ?». Atal répond : «Moi, je lui ai dit le message et lui il l’a écrit». Interrogé si comme il le prétend dans la vidéo qu’il a publiée, il y avait un message de paix, Youcef Atal explique : «J’ai entendu la vidéo en arabe et je pensais vraiment que c’était un message de paix».
Ses émotions et ses regrets
Répondant sans difficultés aux questions de la procureure et des avocats de la partie adverse, Youcef Atal a l’air ému. «Je pensais que c’était un message de paix, c’est la vérité. Avec du recul, je me dis que c’est des trucs importants et j’aurai dû regarder la vidéo jusqu’à la fin, je n’ai pas eu le réflexe de bien voir la vidéo, je l’ai vue, je l’ai postée pour que les personnes ne souffrent pas. Je ne me suis pas intéressé à la personne (le prédicateur Mahmoud Al Hasanat). Au début, il parlait des gens pour qu’ils ne souffrent plus et j’ai partagé. Je regrette par rapport à ça. Je voudrais juste ajouter que je ne suis contre personne. Je ne suis qu’un footballeur. Je n’essaie pas de faire de la politique ? Je suis contre la haine. On a déjà joué en Israël (match européen avec Nice contre le Maccabi Haifa), j’ai joué là-bas sans aucun problème.
Son avocat estime que la loi française n’est pas compétente dans ce dossier
Maitre Antoine Vey, l’avocat de Youcef Atal, soulève une question juridique, celle de la compétence de la loi française à juger ces faits. «Il y a une forme d’erreur matérielle. Les faits ne se sont pas produits à Nice ni sur le sol français (Atal était en sélection algérienne, donc depuis l’étranger, Ndlr). La vidéo a été publiée en arabe. Il l’a republiée sans commentaire à destination d’un public arabophone. Rien ne rattache les faits au peuple français. La question de savoir si l’on retombe dans la loi française mérite d’être posée», explique l’avocat du joueur algérien ; D’ailleurs, le rapport des enquêteurs précise qu’aucun message sur ce compte n’est en faveur de Hamas, seulement des messages de soutien au peuple palestinien. Pour ce qui est des excuses faites par Youcef Atal rédigées en français, son avocat reprend : «Il (Atal) a fait des excuses en français parce qu’il est poursuivi en France. S’il était en Ukraine, il l’aurait fait en ukrainien», estime Me Antoine Vey. «Le critère n’est pas de savoir si le public français peut se sentir visé, mais de savoir si vous avez un critère de rattachement suffisant pour que vos juridictions puissent juger cette affaire», déplore l’avocat de Atal. A noter que pendant l’interrogatoire, l’international algérien a campé sur sa position, à savoir déplorer les barbaries subies par la population de Ghaza en insistant qu’il voulait envoyer un message de paix à des gens (Palestiniens) qui souffrent.
M.S.