Moussa Saïb : «La situation de la JSK me rend malade»

Surnommé "l'Élégant" en raison de son allure singulière sur le terrain, il a fait les beaux jours de la JS Kabylie. Moussa Saïb livre, ici, son analyse sur la situation actuelle de l’équipe. Il partage ses constats lucides et ses avis pertinents sur l’évolution de son ancien club. Entretien.

 

Que devient Moussa Saïb ?

 

Je vis en France avec ma famille, bien éloigné du milieu footballistique. Cela ne m'empêche toutefois pas de jouer encore au foot avec des amis. Nous sommes une dizaine, alors nous organisons des matchs ensemble.

 

Vous suivez toujours l’actualité de la JSK ? Si oui, que pensez-vous de la situation du club ?

 

Oui, je suis toujours tout ce qui concerne la JSK. Sincèrement, cela me rend malade de voir ce qui s’y passe. Parfois, quand j'apprends les nouvelles du club, nous avions cru que les cauchemars des années passées étaient derrière nous, nous avions cru aux nouvelles ambitions, mais en fin de compte, c'est toujours la même chose. Rien n'a changé, les années passent et se ressemblent.

 

Qu'est-ce qui n'a pas changé ?

 

Il y a eu un changement au niveau des salaires, avec des rémunérations élevées, mais rien d’autre. Je ne vois, à ce jour, aucun autre progrès. Rien du tout ! Toujours les mêmes problèmes qui reviennent : le départ de l'entraîneur, une équipe qui perd son coach à la 14ème journée. Il y a un magnifique public derrière le club, un nouveau stade, une nouvelle entreprise à sa tête, mais nous nous retrouvons avec une équipe sans entraîneur avant la fin de la phase aller et, malheureusement, toujours les mêmes problèmes techniques.

 

Comment jugez-vous les prestations de l'équipe jusqu'à l’heure ?

 

Concernant les performances, il y a du bon et du moins bon. De ce que nous avons vu des matchs, nous restons sur notre faim ; on n'a pas encore vu le vrai visage de la JSK. Personnellement, je n'ai pas vu le vrai visage de l'équipe : parfois elle gagne, parfois elle perd, avec un manque énorme de régularité. Ce n'est pas un bon signe pour une équipe qui veut jouer les premiers rôles.

 

Qu'est-ce qui n'a pas marché ?

 

C'est un tout. Quand il n'y a pas de sérénité dans le club, voilà le résultat. Je trouve qu'il y a beaucoup de choses au sein du club qui ne vont pas bien. Je fais mon constat de l'extérieur, mais quand on voit un entraîneur démissionner de cette manière, il y a forcément quelque chose que nous ne savons pas. En tant qu'entraîneur, on ne démissionne pas juste comme ça.

 

 

Que pensez-vous de l'effectif ? 

 

Le recrutement effectué, je ne peux pas le critiquer, mais certains joueurs n'ont pas donné satisfaction. Les dirigeants ont eu le temps pour faire un recrutement bien étudié. Mais quand on arrive à la mi-saison et qu'on constate que beaucoup d'éléments n'ont pas donné satisfaction, quelque part, on a échoué dans le recrutement.

 

 

Comment avez-vous pris l'élimination de la JSK en coupe d'Algérie ?

 

Franchement, cela ne m'a pas surpris. Dans le football, sans un commandant de bord à la tête de l'équipe, comment cela pourrait-il fonctionner ? Après la démission de l'ancien entraîneur, je n'attendais pas que l'équipe fasse un bon match en coupe d'Algérie, surtout face à une équipe plus motivée et plus déterminée. Quand on laisse un adjoint gérer un match, c'est ce qui arrive. Un adjoint reste un adjoint, et les joueurs ne respectent malheureusement pas un adjoint comme ils le feraient avec un entraîneur principal. J'ai été joueur, je sais de quoi je parle. De plus, les joueurs de la JSK n'ont pas bien préparé la rencontre, ce qui s'est vu sur le terrain.

 

Les choses peuvent-elles être réglées ?

 

Déjà, pour sauver le navire, il faut trouver un entraîneur à la hauteur, et des éléments de qualité pour renforcer l'équipe et remplacer ceux qui n'ont pas donné satisfaction. Sinon, ce sera du pareil au même. La chose primordiale est de trouver un entraîneur digne. Rien n'est encore joué, ils peuvent renverser la situation, mais il faudra se remettre en question. Les joueurs doivent faire correctement leur travail et se ressaisir, et les dirigeants également. C'est malheureux de voir la JSK ainsi, malgré les moyens à disposition et les fans qui suivent l'équipe partout, il faut au moins un minimum d'orgueil et de fierté pour le maillot.

 

Quel genre d'entraîneur ferait du bien à l'équipe et serait à la hauteur des attentes ?

 

Je ne suis pas au cœur du club pour vous dire exactement. On a tendance à dire "grand entraîneur", mais un grand entraîneur pour un grand championnat !

Je ne sais pas comment expliquer ce que serait un "grand entraîneur" pour nous. Il faut être réaliste : nous avons un championnat moyen. L'année dernière, par exemple, deux entraîneurs sans grand CV ont tout de même sauvé le club. Je pars du principe qu'il faut donner une chance à quelqu'un de courageux, qui connaît le championnat. Est-il sûr de ramener quelqu'un de l'étranger qui assurera la réussite ? On ne sait pas vraiment. Plusieurs ont fait leurs preuves en Algérie, donnons-leur une chance.

 

N'est-il pas le moment de ramener un Khalef ou un Stefan Żywotko, qui assurera stabilité et réussite ?

 

Aujourd'hui, peu de clubs assurent encore la stabilité, peut-être parce que les temps ont changé. À l'époque, c'était notre force à la JSK : un entraîneur et un adjoint, eux seuls avaient le pouvoir de décision. Maintenant, c'est une multitude de personnes qui décident à gauche et à droite. Je parle de tous les clubs en Algérie, il n'y a plus de projet sportif réel ; le seul projet de tout le monde semble être de promettre des recrutements ou des changements, mais les fans ne sont pas dupes. Quand on ne tient pas ses promesses, cela retombe sur votre tête. Il faudrait lancer de véritables projets sportifs. Depuis combien de temps la JSK n'a-t-elle pas joué les titres ? Si les projets étaient réels et que les dirigeants parlaient sincèrement, la JSK ne serait pas dans cette situation aujourd'hui. Chaque année, nous voyons des promesses, comment ne pas se heurter aux fans à qui on a promis des merveilles ?

 

Les fans doivent-ils encore attendre ?

 

Il n'est pas possible de jouer le maintien ou le milieu du tableau pendant des années puis de viser directement le haut du classement. Ce n'est pas du jour au lendemain que l'on construit une équipe solide. Le Barça, depuis le départ de l'équipe de Messi, est en phase de reconstruction, c'est ainsi que cela fonctionne. Maintenant, l'équipe est à la tête du classement provisoirement, il faut revenir à la raison, trouver un entraîneur à long terme et finir ce qui doit l'être. 

On verra ce que cela apportera, il reste une deuxième mi-saison à jouer. 

À la fin, si le bilan est négatif, les dirigeants ne s'accrocheront probablement pas à leur place. Une chose est sûre, il ne faut pas promettre la lune aux fans quand on n'a pas les moyens nécessaires, En 2008, nous nous sommes fait éliminer de la Coupe d'Algérie, mais il y a eu aucune réaction négative de la part des supporters car j'avais annoncé au début de la saison que la coupe ne m'intéressait pas et que je voulais que l'équipe se concentre uniquement sur le championnat. À la fin, nous l'avons gagné.

 

  1. I.

 

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